Comment
s'organisera une journée de travail en 2053? Plusieurs experts se sont
posé la question, et expliquent notamment que la retraite aura
potentiellement disparu, ainsi que la hiérarchie dans les entreprises,
tandis que l'alternance des métiers sera devenue la norme.
Imaginez: nous sommes en 2053. La notion de
«bureau» a quasiment disparu, les usines ne sont peuplées que de robots,
qui ont fait disparaître la notion de pénibilité au travail, les
métiers manuels sont devenus minoritaires... À l'occasion du 40e
anniversaire de l'
Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail
(Anact), célébré mardi, des experts, des syndicalistes ou des
représentants du patronat se sont prêtés au jeu de se projeter 4quarante
ans en avant, et d'essayer d'imaginer, ce qui va potentiellement
changer dans notre quotidien au travail. Pour
Jacques Froissant,
fondateur du cabinet de recrutement Altaïde, les prévisions observées
sont plutôt réalistes. «À la vitesse où la technologie accélère nos vies
au quotidien, il est légitime de penser que le travail aussi, devra
s'adapter», explique-t-il.
• Travailler plus longtemps, mais sur des périodes plus courtes.
En 2053, «nous travaillons plus longtemps mais sur des périodes plus
courtes», souligne Hervé Lanouzière à l'AFP, en réaction à
l'augmentation de l'espérance de vie. «Certains scientifiques prétendent
qu'il n'est pas absurde de penser que les enfants qui naissent
aujourd'hui pourront vivre bien au-delà des 100 ans... Ce simple constat
fait réfléchir à la façon dont la notion même de travail va être
bouleversée!», explique Jacques Froissant.
• La «retraite» n'existera plus.
Le concept de «retraite» sera complètement tombé en désuétude. À la
CGT, Maryse Dumas souligne que la notion de retraite qui «recouvrait une
idée de retrait de la vie sociale» a disparu et qu'au-delà de 60 ans -
car le rythme biologique l'exige - les personnes sont libres de leur
participation».
• Les robots auront pris le contrôle des métiers manuels (et auront supprimé la notion de pénibilité).
Les robots ne nous auront pas débarrassés de toutes nos tâches, mais au
moins une bonne partie. De nombreux métiers manuels auront disparu. «On
disait déjà il y a 30 ans que les robots allaient prendre notre
travail, ce n'est pas nouveau. Mais là, ça se concrétise. Des robots qui
seront en vente dans cinq à dix ans seront en mesure de reproduire
exactement les mêmes gestes qu'un humain... Et déjà actuellement, il y a
de nombreuses usines qui sont simplement peuplées de robots, et sans
présence humaine», observe Jacques Froissant. Une part «non négligeable»
de la production est «prise en charge par des robots, des ordinateurs
ou même des avatars» ce qui a «supprimé le concept de pénibilité».
• La notion de «bureau» et d'entreprise physique aura disparu.
En 2053, nous «n'irons» plus au travail. Philippe Durance, chercheur au
Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) explique que «la
disparition du lieu de travail (...) touche quasiment toutes les
catégories professionnelles». On travaillera depuis son domicile, dans
des espaces de «co-working», dans les transports, dans les lieux de
restauration, dans des parcs... Le «bureau» à l'ancienne existera
peut-être, mais il sera la plupart du temps vide. Il sera un espace de
travail aussi éphémère que les autres. «Pourquoi s'embêter à se rendre
dans un lieu pour effectuer des tâches que l'on peut faire dans
n'importe quel autre lieu?», questionne Jacques Froissant.
• Les «chefs» n'existeront plus, et l'avis de tout le monde sera pris en compte.
Que ceux qui aspirent aujourd'hui à devenir des petits - ou grands -
chefs se fassent une raison: les managers n'existeront plus, et les
organigrammes complexes des entreprises auront disparu. «Les niveaux
hiérarchiques seront au maximum de deux!», prédit Christian Leroy,
représentant du Medef dans le Nord-Pas-de-Calais, qui explique aussi que
la parole des salariés «sera systématiquement prise en compte», les
représentants du personnel ayant «été intégrés dans les structures de
gouvernance des entreprises».
• «Alterner» les métiers sera devenu la norme.
Selon Maryse Dumas, les parcours professionnels ne seront plus
linéaires et permettront «d'alterner des métiers, des fonctions, des
filières différentes», avec des droits nouveaux «attachés à chaque
personne» et «mis en œuvre tout au long de l'activité professionnelle».
Une tendance dont les prémisses sont déjà visibles actuellement.
«L'explosion des offres de formation et l'incitation à se reconvertir
sont des éléments déjà très en vogue! De même que cumuler plusieurs
activités professionnelles est aujourd'hui à la portée de n'importe
qui!», insiste Jacques Froissant.
• La technologie au service de la surveillance.
Certains responsables de l'Anact imaginent des cas où «les compétences
sont validées par des tests génétiques», les neurosciences «ayant
conforté l'idée de la différence femme-homme» ou un monde où la
technologie est au service de la surveillance. Ainsi, dans certaines
suppositions, «le télétravail ne pourrait être rendu possible que si
l'opérateur accepte un implant intégré à l'avant-bras pour surveiller
ses gestes en temps réel» et des ordinateurs permettent «de décompter du
salaire le temps où le salarié gère ses mails et affaires
personnelles».