Il n'est pas le seul faiseur de roi de cette élection, mais avec ses 9,13% de voix au premier tour, François Bayrou détient une des clés du second.
Le candidat du MoDem n'a pour l'instant donné aucune consigne de vote. Il devrait annoncer sa décision jeudi 3 mai, au lendemain du débat entre Nicolas Sarkozy et François Hollande. Il a indiqué que son choix dépendrait autant des programmes que de "l'attitude personnelle" des deux candidats.
Le 25 avril, François Bayrou a adressé une lettre aux deux candidats sélectionnés pour le second tour. Dans les deux pages de cette lettre, le député béarnais aborde cinq grands thèmes : la nécessité d'un redressement des finances publiques, la crise de l'école, le "produire en France", la moralisation de la vie publique et la construction européenne.
Nicolas Sarkozy et François Hollande lui ont répondu, soulignant chacun leurs convergences avec les propositions du MoDem tout en laissant apparaître des différences.
- Le ton
Avec sept pages, la réponse de Nicolas Sarkozy est beaucoup plus longue que celles de son concurrent. Le président sortant s’adresse plus directement à François Bayrou, à grand renfort de "vous", quand François Hollande opte pour un ton neutre, se rapprochant de celui utilisé pour exposer un programme.
Nicolas Sarkozy utilise également cette lettre pour lancer des piques à son adversaire, tandis que François Hollande évoque certes le bilan du quinquennat de Nicolas Sarkozy mais ne mentionne pas directement son adversaire.
L'exercice de la réponse s'avère relativement plus délicat pour Nicolas Sarkozy. En effet, dans sa lettre, François Bayrou épingle la "complaisance à l’égard des extrêmes" et mercredi 25 avril, il a accusé Nicolas Sarkozy de "valider la thèse du Front national".
- La bonne gestion des finances publiques
Nicolas Sarkozy lui répond en réaffirmant sa volonté d’inscrire la règle d’or dans la Constitution, s’il le faut en la soumettant à référendum. Il qualifie ses prévisions de "crédibles et raisonnables" et dit avoir prévu une réserve de 6 milliards d’euro au cas où la croissance s'avérait plus faible que prévu. Il en profite pour taper sur François Hollande, affirmant que son programme ne prévoit aucune réduction des dépenses publiques.
Pour sa part, François Hollande défend son "sérieux budgétaire", rappelle son objectif d'équilibre des finances publiques à la fin du quinquennat mais souligne aussi la nécessité de relancer la croissance et de mener une réforme fiscale ambitieuse pour atteindre cet objectif.
- L'école
Nicolas Sarkozy embraye sur ce point, assurant que ce n’est pas en créant 60 000 postes qu’on résoudra la crise de l'école mais par un nouveau projet éducatif. Il souligne qu'il a recentré en 2008 les programmes sur les savoirs fondamentaux et entend continuer à revaloriser le savoir, l’effort et la considération due aux professeurs. Il s'engage à "développer massivement l’apprentissage".
Hollande commence par mettre en avant le bilan qu'il juge désastreux pour l'école du quinquennat qui s'achève. Il défend la création de 60 000 postes dans l’Éducation nationale et insiste sur le fait que cette mesure ne fera pas augmenter le nombre de fonctionnaires, un point sur lequel il n'a pas toujours été si catégorique.
Sans évoquer directement l'apprentissage, il dit vouloir "faire de l'enseignement professionnel une voie d'excellence".
- Le "produire en France"
Il souhaite aussi "plus de démocratie sociale" : "la représentation des salariés, avec droit de vote, au conseil d’administration des grandes entreprises, serait un signe déterminant dans ce sens".
Nicolas Sarkozy accuse les réformes de la retraite à 60 ans et des 35 heures d’avoir contribué à paupériser l’industrie française et affirme avoir réussi à enrayer la perte d’emplois industriels. Il explique que la "TVA anti-délocalisation", ex-TVA sociale, va permettre aux produits français de monter en gamme et plaide pour un Small Business Act, une mesure que François Bayrou proposait également.
Hostile à la mesure sur les conseils d'administration, qui introduirait de la "confusion", Nicolas Sarkozy tempère ce refus par un couplet sur les rémunérations indécentes de certains dirigeants, où il se dit favorable à la présence des salariés dans les comités de rémunérations.
François Hollande est moins spécifique dans sa propre réponse, collant à son programme : création d'une banque publique d'investissement, séparation des activités des banques, contrats de relocalisation signés avec les entreprises, qui seront sommées de rembourser les aides touchées si elles délocalisent.
- La moralisation de la vie publique
Hollande lui promet "une grande loi" sur ce thème et, "s’il y a blocage", de consulter les Français par voie référendaire. Il rappelle aussi qu'il s’est engagé à baisser de 30% les rémunérations du président et des ministres.
Sarkozy souligne qu'il a soumis la présidence de la République au contrôle de la Cour des comptes. et s’engage à soumettre une loi sur les conflits d’intérêts dès le début de la législature. Il est réservé quant à une consultation des Français sur la moralisation de la vie publique, car un référendum ne doit pas selon lui porter sur trop de questions à la fois.
Le président sortant se dit favorable à une dose de proportionnelle, qu’il ne précise pas, et au non-cumul d'un ministère avec un mandat exécutif local.
- L'Europe
"Je suis Européen" tente de le rassurer François Hollande, tout en maintenant qu'il souhaite renégocier le traité budgétaire.
Nicolas Sarkozy se défend pour sa part d'avoir voulu revenir sur cet "acquis fondamental" qu'est la libre circulation dans l'Union européenne, tout en maintenant qu'il ne faut pas avoir peur de "corriger les défauts" de l'Europe et de la réformer.
Reste à savoir si cet exercice d'équilibrisme aura convaincu François Bayrou. En 2007, il n'avait donné aucune consigne de vote au second tour.
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