Maladie nerveuse se manifestant par des mouvements brusques et désarticulés
Cette expression française est d'origine médicale.
Vitus équivalent de Saint-Guy en latin, était le patron des épileptiques. Son nom a été utilisé pour désigner une maladie nerveuse qui se manifeste chez les enfants qui bougent beaucoup avec des mouvements incontrôlés.
Ceci est plus une appelation qu'une expression.
Et si les expressions françaises peuvent souvent donner lieu à des dérives humoristiques, ce n'est pas le cas de celle-ci qui correspond à une maladie nerveuse touchant les enfants (chorée de Sydenham) ou les adultes (chorée de Huntington) et qui se manifeste, entre autres, par des mouvements brusques, désordonnés et incontrôlables, surtout dans les membres
L'appellation danse de saint Guy semble dater du IXe siècle, après des guérisons miraculeuses lors du transfert des reliques de saint Guy de Saint-Denis vers la Saxe. Le culte de saint Guy, en tant que protecteur des épileptiques et des malades atteints de chorée, s'est alors développé1.
Au Moyen-Âge, les malades atteint de chorée était souvent considérés comme possédés par le démon et brûlés vifs.
Mais pourquoi avoir appelé cette maladie la danse de saint Guy ?
Son histoire exacte n'est pas vraiment connue, mais une légende dit que Vitus (équivalent latin de Guy), né en Sicile, fut martyrisé d'abord à 12 ans dans son pays par son gouverneur, Valérien, parce qu'il refusait d'adorer les idoles.
Provoquant des guérisons miraculeuses, il fut ensuite amené devant l'empereur Dioclétien qui lui fit subir diverses choses peu agréables qui ont finalement abouti à son décès
C'est au IXe siècle, parce qu'il se produisit des miracles au cours du transfert des reliques de saint Guy de Saint-Denis, en France, vers la Saxe, que le culte de saint Guy, protecteur des épileptiques et des malades atteints de chorée, se développa.
Bizarrement, ces malades souffraient de troubles variés s'amplifiant à l'approche de la fête de la saint Guy, et ils se rendaient alors en pélerinage dans l'une ou l'autre église qui lui était consacrée pour y danser afin, en théorie, de se libérer de leurs angoisses et de leur mal.
La chorée de Sydenham, nommée ainsi d'après Thomas Sydenham, est une maladie infectieuse du système nerveux central, apparaissant après une infection à streptocoques bêta-hémolytique du groupe A, avec fièvre, caractérisée par des mouvements involontaires et contractions des muscles du tronc et des extrémités. Elle touche les enfants de 7 à 14 ans suite à une contamination aux streptocoques. Les antigènes streptococciques ressemblent à ceux retrouvés au niveau des tissus nerveux, ce qui entraîne un rhumatisme articulaire aigu (RAA). Elle se guérit naturellement.
En langage courant, elle est appelée la « danse de saint Guy ».
Pluie de saint-Guy, C'est tout l'an qui rit (Proverbe français)
Tiens hier c’était la saint-Guy.
Il est une expression française attribuant à un quidam le geste incongrue de la « danse de saint-Guy »
Pour des raisons qui échappent à priori à la raison, le susdit quidam semblera en effet pris d’une folie soudaine à se tortiller grave ; à se trémousser frénétiquement ; à contorsionner son corps dans tous les sens articulés ou non ; il saute sur place ou dans tous les sens ; il se dandine ; il se tord ; il sautille tout azimut ; il bondit même ; bref, quelque musique inaudible au spectateur atterré semble le faire danser d’une façon la plus sotte et la plus grenue qui soit.
Bon, le plus souvent notre danseur n’aura fait que se cogner grave un orteil tout nu dans une kalachnikov qui traînait par terre et le ballet dramatique s’achèvera par une jolie poupée autour du membre rougi et tuméfié et un sermon raisonneur de notre part sur la grande vertu de ranger ses outils à leur place après chaque usage ; laquelle vertu, comme chacun le saura enfin, devant être intégrée profond par tout le monde, y compris par l’insurgé enragé, le terroriste frappé dingue ou l’anarchiste génocide.
En fait trop d’assassins se blessent inutilement en ne rangeant pas leur chambre, voilà.
Cela étant, il ne s’agissait en aucun cas de la vraie « danse de saint-Guy » qui n’est en fait que le stigmate d’une maladie fort ancienne, rare, orpheline, neurologique et génétique en diable que l’on nomma la « chorée de Sydenham » pour les enfants ou « chorée de Huntington » pour les adultes.
Le mot « chorée » vient du Grec « choros » (danse) et « Sydenham » et « Huntington » sont les noms des médecins ayant étudié les premiers ces maladies et qui les ont ainsi sorties des flammes de la Sainte Inquisition.
Car en vérité je vous le dis les gens, la danse macabre de saint-Guy envoya plus d’un malheureux au pal, aux lions, au pilori ou au bûcher.
En effet, ces supplices étaient en quelques sortes d’une part une délivrance tant pour les malades qui dansaient dans des transes irrépressibles, épuisantes jusqu’à une mort naturelle inexorable et épouvantable, que pour les autres d’autres part, qui étaient soit accablés de supporter une telle folie dingue agitant leur proche soit contents de trouver enfin un idéal et gras bouc émissaire atteint d’une tremblote qui n’était que possession et manifestation satanique en diable en corps et en âme.
Bref, on le brûle ce danseur démoniaque et on retourne aux champs ou aux chants, tranquilles et purifiés.
C’est ainsi que plus d’un Guy de tout poil et de tout sexe anima avec ses ballets frénétiques le peuple maudits des sorciers et des sorcières et ce dans toute l’Europe et depuis la nuit des temps.
L’expression « danse de saint-Guy » existe en effet dans toutes les langues européennes et particulièrement en Anglais, en Italien et en Allemand car c’est en Angleterre, en Italie et en Allemagne que certains cas dégénérèrent en une folie collective, un délire insurrectionnel ou une sorte de carnaval qui fut parfois réprimé dans le sang par une armée toute entière.
Du reste, la maladie traversa l’Atlantique car on dit que certaines des célèbres sorcières américaines de Salem étaient atteintes de la maladie d’Huntington et que la Canada connut aussi de tels « spectacles »
Pour les spécialistes, c’est le gène « IT15 » qui serait la maître de ballet (et de balais) de nos saints Guy et ils pensent que seule la génétique peut permettre d’éradiquer ce terrible mal qui se manifeste par à-coups et curieusement par épidémie.
Saint Vite (en latin Vitus) ou saint Guy, saint Guido, originaire de Sicile, provoqua des guérisons miraculeuses et mourut en martyr vers 303, à Rome, sous l'empereur Dioclétien.
Saint Guy, qui est l’un des quatorze saints thaumaturges (guérisseurs), fut le protecteur des épileptiques et des malades de chorée. Ses reliques furent transférées de Saint-Denis (France, 9-3) en Saxe et en Westphalie d’où quelques os furent envoyés à Prague dans la cathédrale qui porte encore son nom.
La légende de ce saint fut sans doute l’agrégation d’autres histoires ancestrales et mythes de toute l’Europe car tout ce qui touche à l’épilepsie, la transe, la tremblote ou la chorée a marqué les imaginations et les superstitions de tous les temps.
Par ailleurs, le nom de la plante « le gui » vient du Latin « viscum » par le francique *wîhsila ou la racine indo-européenne « *wid- » qui aura sans doute donné aussi le prénom germanique « Wido » qui se transforma en « Vitus » puis en Vite et enfin en « Gui » et « Guy »
Sachant que le gui (la plante parasite des arbres) fut sacré pour les druides gaulois et que le ci-dessus « Wid- » plus ou moins celte signifierait « bois ou forêt » ; sachant que le fruit du gui était réputé soigner l’épilepsie ; sachant que le Sylvain, le Satyre ou le Faune (de Faunus, fils du Grand Pan) était un être assez bizarre qui se promenait « en dansant » dans la vaste forêt qui couvrit toute l’Europe du mont Lycos en Arcadie à la Laponie en passant par Rome, ville fondée par des siens cousins, etc. etc. etc.
La saint-Guy est célébrée le 12 juin maintenant, mais elle le fut longtemps le 15 juin soit quelques jours avant le 20 juin, premier jour du solstice et avant le 24 juin, la Saint-Jean Baptiste.
Sachant que Jean le Baptiste (comme Jean l’évangéliste) est gardien d’un solstice comme le fut Janus le dieu romain et que ledit Janus (Jean) aurait été le Dieu des Dieu, la divin Chaos (alias Pan) etc. etc. etc.
Sachant que le Baptiste fut décapité à la suite d’une danse d’une certaine Salomé…
Sachant qu’une vieille tradition germanique organisait des « nodfyr » au solstice d’été (Un genre de feux de la Saint-Jean quoi !) où il fallait sauter par le dessus des feux et la fumée ou « danser » sur des braises ardentes afin de se purifier et se protéger des fièvres et autres folies dansantes ou pas…
Bon, je vous laisse-là car j’ai un cours de tecktonic et de rap.
Note : Ce billet fort long et chiant est quelque peu synthétisé par mon très hermétique iCul d’hier auquel les lecteurs pressés pourront se rapporter.
Illustration : Michael Wolgemut (1434-1519) Danse macabre (1493) Gravure sur bois.
Cathédrale Saint-Guy
La Cathédrale Saint-Guy de Prague est le plus grand édifice religieux de Bohème et de Moravie.C’est en son sein qu’étaient couronnés les rois de Bohème ; les joyaux de la couronne et la tombe du roi Venceslas sont d’ailleurs hébergé par la cathédrale.
Le mal
de saint Vit ( ou saint Guy )
Claire Biquard
(E.H.E.S.S.)
Or comme les Méridionaux sont exempts d'une
infinité de maladies pléthoriques qui viennent d'abondance de sang, ausquelles
sont sujets les Septentrionaux comme fièvres, fluxions, tumeurs, folie avec
risée qui les incite à dancer et sauter durant l'accez, qu'ils appellent mal S.
Vitus, et le guarissent par musique. Ambroise Paré, Oeuvres complètes, éd. Malgaigne, I, p.52.
Le mal de saint Vit a été observé principalement en Allemagne et en
Alsace du Moyen Age au XVIIIème siècle. Nous ignorons l'origine exacte de ce
mal, mais il était bien connu au XVe siècle sous le nom de "morbus sancti
Viti". Il se rapporte à des malaises d'ordre variable attribués à saint
Vit. Les personnes touchées par ce mal ressentaient chaque année, à l'approche
de la fête de saint Guy, une angoisse extrême et souffraient de troubles
variés. Elles attendaient impatiemment la fête du saint pour se rendre en
pélerinage dans une église ou une chapelle qui lui était consacrée. Là,
accompagnées de musiciens, elles dansaient pour se libérer de leur oppression.
Ce mal pouvait atteindre les hommes
comme les femmes. Pourtant les jeunes gens des deux sexes en étaient les
principales victimes 1. Une représentation
très intéressante des danseurs de saint Guy, peinte vers I57O, en témoigne2. Elle figure sur le volet d'un maître autel situé
dans une chapelle de la cathédrale de Cologne. Saint Guy se trouve dans une
niche ornée d'un baldaquin en style gothique tardif. Il est représenté sur le
panneau selon la technique de la grisaille. Au dessous du saint, dans des
motifs de ramage et de feuillage, on peut voir un groupe de trois jeunes
adolescents entraînés dans un mouvement de danse3. Sur l'autre volet est figuré saint Valentin et trois jeunes garçons
effectuant aussi une danse en son honneur.
Tout d’abord, qui est saint Guy ?
Saint Guy
1) La vie de saint
Guy
Le martyr du saint est mentionné pour
la première fois dans le martyrologe hiéronimien. La plus ancienne mention
annonce à la date du 15 juin : "In Lucania Viti", mais à la même date
on trouve une seconde mention qui semble bien être une addition postérieure
:"In Sicilia Viti, Modesti et Crescentiae". Seul Guy se révèle être
un authentique martyr dont le culte est très ancien. Mais on ignore tout de son
histoire réelle qui a été embellie au fil du temps par des récits fabuleux où
il est associé à un précepteur, saint Modeste, et à une nourrice Crescence et
qui placent ses origines en Sicile4.
D'après la légende, telle que la
rapporte Jacques de Voragine, Guy, enfant distingué et fidèle, n'avait que 12
ans lorsqu'il fut martyrisé en Sicile. Son père, Hylas, avait coutume de le
frapper car il refusait d'adorer les idoles. Le gouverneur de Sicile, Valérien,
en fut informé. Il convoqua l'enfant et le fit flageller pour qu'il renie sa
foi. Mais aussitôt les bras du bourreau et la main du gouverneur furent frappés
de paralysie. Sur la prière de Guy, le gouverneur retrouva l'usage de sa main.
Il enjoignit pourtant au père de l'enfant de le faire changer de religion.
L'enfant fut ramené chez lui et son père s'efforça de changer son coeur par la
musique, la compagnie de jeunes filles et par toutes sortes de plaisirs. Puis
il l'enferma dans une chambre. Une merveilleuse odeur en émana et embauma son
père et toute sa famille. Alors Hylas regarda par le trou de la serrure et vit
sept anges auprès de son fils. A cette vision il devint aussitôt aveugle. Il
fut conduit au temple de Jupiter et promit, s'il recouvrait la vue, d'offrir un
taureau avec des cornes dorées. Comme il n'obtenait rien, il implora son fils
de le guérir. Grâce aux prières de son enfant, il recouvra la vue. Un ange
apparut alors à Modeste, le précepteur de l'enfant, et lui ordonna de le faire
monter dans un bateau pour le conduire vers une autre terre (l'Italie). Dans ce
nouveau pays, un aigle les nourrissait et ils accomplissaient de nombreux
miracles. Bientôt il fut appelé par Dioclétien afin de guérir son fils qui
était possédé par un démon. Celui-ci avait déclaré qu'il ne s'en irait point si
l'on ne faisait venir Guy de Lucanie. L'enfant imposa ses mains sur le possédé
et, aussitôt, le démon s'enfuit. Malgré ce miracle, l'empereur voulut le forcer
à sacrifier aux dieux. Guy refusa et fut jeté en prison avec son précepteur.
Mais leur chaînes tombèrent et leur cachot s'emplit d'une lumière admirable.
Apprenant cela, l'empereur fit jeter le saint dans une fournaise ardente, mais
il en ressortit intact5. On le livra ensuite à un lion
féroce qui s'adoucit devant la foi de l'enfant. Dioclétien ordonna alors qu'on
le suspende à un chevalet avec son précepteur Modeste et sa nourrice Crescence
qui l'avait toujours accompagné. Soudain l'air se troubla, le tonnerre gronda,
la terre trembla et les temples des idoles s'écroulèrent, écrasant de
nombreuses personnes. L'empereur épouvanté et frappé par cette malédiciton
s'enfuit. Un ange ramena les trois martyrs aux bords d'un fleuve (en Lucanie)
et là, après s'être arrêtés quelque temps et avoir prié, ils rendirent leur âme
au Seigneur. Leurs corps, gardés par des aigles, furent retrouvés par une
pieuse femme, Florence, à qui saint Guy était apparu. Elle prit les corps et
les ensevelit avec solennité6.
2) Le culte de
saint Guy7
Nous savons par les lettres de saint
Grégoire le Grand qu'il y avait déjà au VIème siècle en Sicile et en Sardaigne
un monastère placé sous le patronage de saint Guy. A Rome, au temps du pape
Gélase (+ 496), une église lui était dédiée. Au VIIème siècle, les marchands de
l'Italie du Sud apportèrent son culte à Rome. Il devint bientôt le patron d'une
diaconie (Saint-Vit in Macello).
Dès le VIIIème siècle il est inscrit
dans les livres liturgiques. Le sacramentaire gélasien contient des oraisons
pour sa fête que l'on retrouve dans le sacramentaire grégorien. Il est marqué
dans le martyrologe de Bède.
Il était invoqué en Italie contre la
morsure de chiens enragés ou celle de la tarentule (en Sicile) et contre les
piqûres de serpents. Ses reliques passaient pour guérir spécialement les
maladies d'origine démoniaque.
Au VIIIème siècle la vénération du
saint martyr fut diffusée en France. Fulrad, prieur de Saint-Denis voulut se
procurer pour son monastère des reliques de saints. Accompagné de parents, il
se rendit à Rome et réussit à ramener le corps du martyr.
En 836, l'abbé Hilduin le céda au
monastère de Corvey fondé en Saxe, terre qui venait d'être christianisée. Les
reliques de saint Guy furent solennellement transférées en Saxe. Cette
translation fut marquée par de nombreux miracles. De là, le culte se répandit
dans toute l'Allemagne et devint si populaire que saint Guy fut placé au nombre
des 14 saints auxiliateurs comme protecteur des épileptiques et des malades
souffrant de ce qu'on appela "la danse de saint Guy".
Le culte du saint se répandit également
dans les régions de l'Europe de l'Est où la divinité principale était le dieu
soleil Svantovit.
Sans doute pour tirer parti de la
similarité des noms, les moines de Corvey introduisirent le culte de saint Vit
dans l'île slave de Rügen qui était le foyer principal du culte de Svantovit.
Le saint fut particulièrement honoré en
Bohême. La cathédrale de Prague fut consacrée à saint Guy par Charles IV. Saint
Guy fut aussi proclamé saint patron de la Bohême par cet empereur.
Plusieurs patronages ont encore accru
sa popularité. Il fut choisi comme patron par la corporation des chaudronniers,
en raison du chaudron d'huile bouillante dans lequel il avait été supplicié. Il
devint aussi le patron des danseurs en raison de la "danse de saint
Guy".
Les pélerinages dédiés à saint Vit
Il ne nous reste que peu de témoignages
relatifs à ce mal et à ces pélerinages dansants. Ils proviennent du milieu médical,
dès le XVIème siècle. Ce type d'affection, relevant traditionnellement des
soins de l'Eglise, attira alors l'attention des médecins et fut l'objet de
leurs recherches. Les premières descriptions médicales sont très précieuses car
les médecins qui les ont faites avaient observé eux-mêmes les manifestations de
ce mal.
A la fin de sa vie, Jean Schenck de
Grafenberg (1530-1598), médecin ayant exercé principalement dans la ville de
Fribourg, rédigea une remarquable collection d'observations médicales. Il
relate que, dans le Brisgau et les environs, les malades invoquaient saint Guy
pour leur guérison mais aussi saint Jean
(tous deux étaient réputés guérir les affections convulsives) :
"Chez nous aussi (comme en Grèce les personnes en proie à "l'enthousiasme")
on a recours aux personnes célestes, à saint Guy ou à saint Jean-Baptiste. Nos
habitants du Brisgau et des districts environnants qui sont touchés par ce
délire accourrent en foule chaque année lors de la fête de saint Jean-Baptiste
à deux sanctuaires, l'un consacré à saint Guy à Biessen près Breisach, l'autre
dédié à saint Jean près de Wasenveiler. Ils y viennent pour accomplir un voeu
ou dans l'espoir que ces saints les délivreront de leur folie. Ce qui étonne le
plus est que durant tout le mois qui précède la fête de saint Jean, ils sont
tristes, craintifs, anxieux, l'esprit tendu et souffrant dans leur corps de
douleurs lancinantes, de mouvements convulsifs qui précèdent et amènent le mal.
Ils sont convaincus qu'ils ne seront jamais soulagés ni délivrés de leur
maladie à moins de participer aux danses dans les sanctuaires consacrés à ces
saints. Leur espérance se réalise le plus souvent et, après avoir achevé ces
danses annuelles qui durent trois heures, on les voit le reste de l'année exempts
de ce délire"8.
Un peu plus tard, également dans un
ouvrage consacré à ses observations médicales, Grégoire Horst (1578-1636),
médecin à Ulm à partir de 1622, évoque le pélerinage très renommé à la petite
chapelle dédiée à saint Vit à Drefelhausen près d'Ulm auquel il a assisté
lui-même :
"Je me souviens d'avoir parlé, le
printemps dernier, avec plusieurs femmes qui chaque année rendent visite à la
chapelle de saint Vit qui se trouve à Drefelhausen, non loin de Geislingen,
près de Weissenstein, dans le territoire d'Ulm. Ces femmes dansent jour et
nuit, les sens altérés, jusqu'à tomber en extase, de telle façon qu'elles
semblent guérir au point de ne plus ressentir de troubles durant toute l'année,
jusqu'au mois de mai suivant, mois pendant lequel elles se voient affligées
d'une agitation des membres - disent-elles - et, par suite, contraintes de se
rendre de nouveau au temple de la fête de saint Vito, au lieu réservé pour la
danse. Une de ces femmes a dû chaque année danser dans la chapelle de saint Vit
et ceci pendant vingt ans et plus, une autre pendant trente deux ans. En dehors
de la superstition, aucune raison valable ou naturelle n'explique pourquoi
juste au commencement du printemps de telles crampes devraient se manifester dans
les membres et se disssiper grâce à la danse jointe à un état d'excitation et à
l'espoir de guérir par l'intercession de saint Vit. Puis ceux qui souffrent
peuvent s'attendre à récupérer leurs forces et à être préservés d'une nouvelle
crise pendant une année. Plusieurs semaines avant de se rendre à la chapelle de
saint Vit ils soufffrent de crampes dans leurs membre, d'un sentiment de
fatigue et de pesanteur dans la tête. Ils restent dans cet état jusqu'à ce
qu'ils arrivent à l'endroit consacré à la danse et au saut. Quand ils entendent
les instruments de musique joués pour leur soulagement, ils sont incités à
danser et à sauter tandis que leur esprit se trouble de plus en plus (peut-être
sous l'effet de la rencontre à la fois de l'impression causée par une vision
plus forte, et de l'espoir de guérison) comme il arrive généralement aux
personnes qui ont été piquées par la tarentule selon le témoignage de
Matthiole"9.
Il ressort de ces descriptions que les
symptômes de ce mal étrange réapparaissaient tous les ans à l'approche de la
fête de saint Guy et que, chaque année, les malades avaient recours au
pélerinage et invoquaient la grâce du saint en dansant. Ils étaient ensuite
libérés de leurs souffrances pendant une année entière. Les malades demeuraient
donc en principe liés durablement à la personne de saint Guy.
Les maladies convulsives de divers
types étaient fréquentes au Moyen Age et au delà . A côté de maladies nerveuses
comme l’épilepsie ou de maladies mentales, de nombreux troubles étaient liés à
l’angoisse et au malheur. “Il faut songer, ainsi que l’écrit Jacques Le Goff, à
cette fragilité physique, à ce terrain physiologique propre à entretenir en de
brusques floraisons de crises collectives, les maladies du corps et de l’âme,
les extravagances de la religiosité”10. De nombreux saints étaient donc voués à la
guérison de ces maux. Saint Guy était très réputé à cet égard en Allemagne et
en Bohême. Il était devenu si populaire qu’il fut plaçé au nombre des 14 saints
auxiliateurs, comme protecteur des épileptiques et des malades souffrant de la
maladie appelée “danse de saint Guy”. Cette spécialité thérapeutique a été
expliquée en référence à la légende du saint qui établissait son pouvoir sur la
possession11. Cependant, pour comprendre l'association de
saint Guy à ce mal et à une danse supposée être curative, il faut se rappeler
que la fête du saint était célébrée peu de temps avant la fête de saint Jean.
Or, celle-ci était propice à la guérison des maladies convulsives et la danse
de saint Jean était avant tout une danse médicale12.
Pour les médecins, le mal de saint Vit
représentait une forme de folie. A leurs yeux, il était un vestige de ces
épidémies saltatoires qui avaient bouleversé l’Europe médiévale et surtout
l’Allemagne et les régions rhénanes à partir du XIVe siècle, à cette période de
troubles et de déséquilibres, marquée par la peste noire: “Nos pères se souviennent, écrit Jean
Schenck, qu’une étonnante forme de démence qui subsiste encore de nos jours a
fait de grands ravages en plusieurs contrées et principalement en Allemagne”.
Ils assimilaient ce délire à l'enthousiasme des grecs et le
rapprochaient de celui qui était
attribué à la tarentule, en Italie du Sud, et dont on guérissait en dansant au
son de la tarentelle. Pour Jean Schenck, par exemple, ces deux affections
présentaient des symptômes analogues et étaient soignés grâce aux mêmes remèdes
: la musique et la danse.
Le tarentisme a été particulièrement
étudié ces dernières années. E. de Martino13 souligne les affinités existant entre le
tarentisme et le mal de saint Vit tel qu'il est présenté précédemment14. Il établit aussi des
corrélations entre le tarentisme et les rites de possession nord-africains et
afro-américains15. G. Lapassade16 et G. Rouget17 considèrent que le tarentisme fait partie de
l'ensemble des rites de possession
Le mal de saint Vit a aussi été comparé
au mal de saint Jean qui se rencontrait en particulier dans les Flandres18. Le
peintre Pierre Bruegel l'Ancien a donné une illustration célèbre des pélerins
qui se rendaient chaque année à Molenbeek près de Bruxelles. Ce dessin à la
plume, daté de 1569, porte une légende écrite à la main permettant d'en
comprendre le sens à une époque où, peut-être, les rituels dansés étaient déjà
en recul : "Ceux-ci sont des pélerins qui, le jour de saint Jean, doivent
danser à Molenbeek, près de Bruxelles, et s'ils ont dansé et sauté par dessus
un pont, ils sont guéris du mal de saint Jean pendant une année entière"19. Là aussi, des musiciens entraînent les
malades dans la danse. On voit notamment un joueur de cornemuse mettant en
contact son instrument avec la tête de l'une des danseuses. Pour G. Rouget
cette scène est évocatrice d'une séance de ndöp en Afrique20. Elle est aussi proche du tarentisme. Dans ce rite, les musiciens
approchaient leurs instruments de l'oreille des tarentulés21.
A la fin du XVème siècle, le mal de
saint Vit fut communément appelé "danse de saint Guy". Ainsi l'usage
identifia le mal à la danse des pélerins en l'honneur du saint23.
Mais quel est le rôle de saint Guy dans
la maladie qui porte son nom ?
De la nature du mal
Saint Guy est assurément la figure centrale de ce phénomène religieux.
Il est la clé de tout le processus allant de l'origine de la maladie à la
guérison.
Ce mal, aux manifestations insolites,
inspirait de la crainte car, selon les conceptions du temps, il était attribué
à une cause surnaturelle. Il était perçu comme un châtiment du Ciel. C'était,
croyait-on, un mal que saint Guy avait le pouvoir de guérir mais aussi
d'infliger. Ce saint est caractérisé par l'ambivalence. L'aspect maléfique du
saint, son pouvoir d'infliger la maladie transparaît dans des formules de
malédiction qui étaient très usitées autrefois : "Que Dieu t'envoie saint
Guy", "Que saint Guy t'invite à danser" ou "Puisse saint
Guy t'affecter". Cette dernière formule se trouve fréquemment chez les
auteurs alsaciens des XVème et XVIème siècles.
Le célèbre médecin de la Renaissance,
Paracelse, retrace ainsi l'origine et les croyances relatives à ce mal. Selon
Paracelse, c'est une femme nommée Trofféa qui manifesta la première les
symptômes étranges de cette maladie24:
"Cette maladie a une curieuse origine,
différente de celle des maladies dont nous avons parlé jusqu'ici. Une femme du
nom de Troffea manifesta la premiere les
symptômes et l'humeur étrange de cette maladie. Comme son mari lui avait
commandé quelque chose qui ne lui plaisait pas, pâle de colère, elle fit comme
si elle était malade et elle imagina une maladie utile en l'occasion : elle se
mit à danser et elle affirma qu'elle ne pouvait s'arrêter. Car rien n'irrite
plus un homme qu'une femme qui danse. Et pour que l'affaire parût suffisemment
sérieuse et pour confirmer l'apparence de la maladie, elle se mit à sauter, à
faire des bonds, chantant, fredonnant, s'effondrant par terre, la danse finie,
tremblant un moment puis s'endormant: ce qui déplut au mari et l'inquiéta
fortement. Sans rien dire et prétextant cette maladie, elle berna son mari. Or
d'autres femmes se comportèrent de la même manière, l'une instruisit l'autre,
et tout le monde finit par considérer que la maladie était un châtiment du
Ciel. A partir des symptômes du mal on se mit à chercher une cause à la maladie
afin de s'en débarrasser. On crut d'abord que c'était Magor25,
un esprit païen, qui était la cause de cette maladie. Peu de temps après, saint
Guy pris sa place et on en fit une idole. Et c'est ainsi que la maladie reçut
le nom de la danse de saint Guy. Par la suite cette croyance se propagea et la
maladie finit par recevoir droit de cité..."26.
Cette affection était donc désignée
comme un "mal de saint". La croyance au "mal de saint",
attestée dans toute l'Europe, fait référence à un double pouvoir du saint sur
la maladie qui porte son nom. Etant le seul à pouvoir guérir ce mal, il peut aussi le provoquer ou l'infliger27. Comme le
souligne G. Charuty, le "mal de saint" désigne une étiologie
spécifique. Il est assimilé à une forme d'agression surnaturelle, et semble constituer une alternative soit à
l'agression provenant des sorciers, soit à celles provenant des morts familiaux28.
Cependant, pour G. Charuty, plusieurs
indices suggèrent qu'entre mal de saint et mal des morts, il n'y a pas de
véritable alternative. A son sens, les saints (saint Paul, saint Donat, et les
saints qui gouvernent l'épilepsie et les maladies convulsives) seraient
maléfiques parce qu'il se conduisent comme des mauvais morts qui n'ont pas
encore quitté définitivement le monde des vivants29.
De nombreuses croyances sont attachées
au culte des saints. Parmi celles-ci, la croyance en l'ambivalence des saints
est une des constantes de la dévotion populaire30 et celle-ci se retrouve dans d'autres cultures31. Elle est liée à une
conception ambivalente du sacré héritée du paganisme. Pour J. Peyronneaud
" si le paganisme existe dans le christianisme, c'est sans doute là, non
dans les figures des saints, mais dans les représentaions ambivalentes du sacré"32.
Le mal de saint est donc un langage
religieux qui offre à ceux qui souffrent de troubles somatiques et psychiques
la possibilité de les interpréter en termes d’agression surnaturelle. En adhérant à la croyance au “mal de saint”,
le malade comprenait pourquoi il était malade mais aussi et surtout quel était
le traitement approprié pour le guérir.
Le rite thérapeutique
Selon la croyance commune, les victimes d'un saint ne pouvaient
retrouver la santé qu'en implorant l'aide de ce saint. Le remède préconisé
était le pélerinage auprès du saint pour l'apaiser et obtenir sa grâce. La
thérapie, comme la conception de la maladie, est donc fondamentalement
religieuse.
Pour obtenir la guérison les malades avaient recours à la musique et à
la danse. Les attitudes des danseurs lors de ces cérémonies, leurs danses,
comportant les mouvements violents des danses sacrées et allant juqu'à
l'évanouissement, sont significatives. Le "bal" des victimes de saint
Guy présentent certains caractères bien connus de la transe. Ici, comme dans
des thérapies analogues connues dans d'autres cultures, la transe joue un rôle
privilégié dans le processus de guérison.
Les danseurs étaient accompagnés par des
musiciens instrumentistes. On reconnaissait à la musique la vertu de soulager
les malades. Cette vertu était souvent attribuée à l'action bienfaisante de la
musique33. Jean Bodin, par exemple, évoque les danseurs
de saint Guy et leur guérison par les harmonies musicales:
Or la varieté des insensés descouvre l'humeur
naturel du peuple...vers le Septentrion, (les fols) qui ne font que danser,
rire, et sauter en leur folie, et s'appelle en Allemagne la maladie sainct
Victus, qu'on guarit avec instruments de musique: soit que la cadence
harmonieuse et mesurée, reduit la raison esgarée à son principe: soit que la
Musique guarit les maladies du corps par le moyen de l'ame, comme la medecine
guerit l'ame par le moyen du corps: soit que les malins esprits qui agitent
quelquefois aussi bien les uns que les autres, ont en horreur l'armonie divine,
prenant plaisir aux discordes..."34.
Pourtant ici, comme en témoigne G.
Horst , la musique ne soulageait pas les malades en vertu de sa magie propre,
mais en les amenant à entrer en transe
et à danser :
" Quand ils
entendent les instruments de musique joués pour leur soulagement, ils sont
incités à danser et à sauter tandis que leur esprit se trouble de plus en
plus... "35.
Dans de tels rites, ainsi que l'a montré
G. Rouget, la musique joue un rôle déterminant car elle peut établir la
communication avec les dieux36. Son rôle est aussi de soutenir
la transe jusqu'à sa fin, ce qui est souligné par J. Schenck.
Les médecins qui nous décrivent ces
comportements utilisent le terme d'extase37 et ils comparent les danseurs à ceux qui étaient
"tourmentés" par l'enthousiasme
dans la Grèce ancienne. O. Brunfels est le premier à avoir assimilé les
danseurs de saint Vit aux Corybantes:
" Que sont-ils d'autre, en effet que des
.Corybantes quand, emportés par leur délire, ils mènent en choeur leurs danses
sans fin ? " 38.
Dans son étude sur la musique et la
transe, G. Rouget a bien montré ce qui distingue la transe de l'extase. L'une
et l'autre font référence à un
"changement d'état". Ces termes ont souvent été employés de
manière interchangeable mais ils recouvrent
des réalités (sensorielles, comportementales et psychiques) bien différentes.
Ce sont deux voies distinctes de la communication avec les dieux. L'extase
s'accomplit plutôt dans la solitude, le silence et l'immobilité. Au contraire
la transe suppose la musique, la danse, le bruit, la présence d'un public et se
manifeste souvent de façon violente39.
.
G. Rouget distingue également trois
grands types de transe mystique liés à des idéologies très différentes de la
transe : la transe de possession, la transe communielle et la transe
d'inspiration40.
Rappelons ici que, dès les premiers
temps, le christianisme s'opposa à la pratique de la transe. Déjà l'apôtre
Paul, dans sa première épître aux Corinthiens (XIV, 26 sq), marquait sa
méfiance envers ce moyens d'accès à la communication avec les dieux41. Ainsi la transe ne fut jamais favorisée dans
l’Europe chrétienne, catholique surtout, comme c’est le cas dans d’autres
cultures ou, encore aujourd’hui, elle est
recherchée et instituée.
Dans le rituel dédié à saint Guy, les
malades ont recours à la transe pour communiquer avec le saint et pour
l’apaiser. C'est un rite de transe communielle42, qui n'est pas sans évoquer
celui des Aissaouas au Maroc, par exemple. Sa finalité est thérapeutique.
Dans ce contexte, la danse et la musique
ont une valeur curative car elles aident les malades à communiquer avec le
saint. En outre, la danse permet aux participants d'exprimer en profondeur des
aspects refoulés de leurs personnalités et c'est un exercice physique qui aide
aussi au soulagement des malades.
Le but de cette thérapie est donc
d'instaurer une relation positive avec le saint tenu pour responsable des
troubles et de le convertir en une puissance bénéfique. La "guérison"
du malade est liée à cette nouvelle relation avec le saint qui, désormais, le
protège et lui accorde sa grâce. Toutefois, pour trouver un apaisement durable,
les malades ont à refaire chaque année leurs dévotions envers le saint afin de
renouveler l’alliance nouvellement établie avec lui. Ainsi, pour la victime
d'un saint, la cure consiste à devenir un dévôt du saint.
L'instauration d'une relation positive
et durable avec l'esprit tenu pour responsable des troubles est le but des
thérapies religieuses par la transe. Et, comme l’a montré notamment V.
Crapanzano, elle a une valeur thérapeutique certaine43. Cette nouvelle relation est
capable d'induire une transformation de l'état psychologique et même
physiologique de celui qui souffre et aussi d'agir sur sa personnalité sociale.
Dans ce processus, le saint ou l'esprit pathogène joue le rôle de passeur
aidant le malade à évoluer d'un état à un autre44.
Pour G. Charuty,
et dans l'optique qui est la sienne, "tous les actes cultuels habituellement destinés à réactiver le
contact avec les puissances célestes..., deviennent des rituels de séparation
et de mise à distance afin que chacun, humble fidèle ou ombrageux martyr,
regagne sa place dans l'ordre métaphysique du monde "45.
Nous ne connaissons pas la nature
réelle des maux dont souffrent ceux qui attribuent leur mal à saint Guy. Aucun
renseignement ne nous est donné concernant leur histoire personnelle, et c'est
souvent le cas dans les récits de thérapie rituelle. Il apparaît, cependant,
que les troubles qui suscitent l'intervention de ce type de thérapie sont à
mettre en relation avec les tensions psychosociales, la maladie ou les
événements malheureux de la vie.
V. Crapanzano a montré avec pertinence
que les personnes atteintes de tels troubles ne peuvent pas être simplement
considérées comme des malades mentaux et traités d'hystériques ou de
psychotiques. Il considère que si ces personnes étaient sérieusement atteintes,
elles ne seraient pas à même de recourir à un système de croyance leur
permettant d'exprimer et de résoudre symboliquement leurs problèmes personnels46.
Il est possible, néanmoins, que l'on
ait tenté d'agir par les danses sur des malades atteints d'une maladie
neurologique ou psychique déterminée. Mais, dans ce cas, cette thérapie
n’aurait pu donner les résultats constatés par les médecins qui avaient observé
les danseurs de saint Guy.
Le mal de saint Vit et sa thérapie
offrent donc à ceux qui souffrent un moyen de surmonter les moments critiques
de leur existence. Ce système religieux et thérapeutique nous éclaire sur un
aspect particulier et localisé du culte de saint Guy. Mais son intérêt
historique provient également du fait qu’il a joué un rôle dans l’évolution de
la pensée médicale au XVIe siècle.
Paracelse
Comme nous l’avons indiqué, le mal de saint Vit suscita l’intérêt des
médecins à partir du XVIè siècle. Paracelse (1493-1541) fut le premier à donner une interprétation nouvelle de ce
mal, éloignée de toute conception religieuse. Il proposa une approche
naturaliste du mal de saint Vit. Paracelse était médecin, théologien et
alchimiste. Il était animé par la volonté de réformer la médecine de son temps.
Il a été diversement apprécié, considéré comme un génie et comme un charlatan.
Aujourd'hui, on estime qu'il joua un rôle considérable dans l'histoire de la
médecine47.
F.H. Garrisson voit en lui "le penseur médical le plus original du XVIème
siècle".
Pour ce médecin de la Renaissance, le
mal de saint Vit et toutes les formes de maladie pouvaient être expliquées par
des raisons naturelles. Paracelse avait été précédé timidement dans la voie de
la recherche de l'explication naturelle des maladies par des médecins comme
Arnaud de Villeneuve (+ 1311) ou encore le chirurgien Henri de Mondeville48. Deux siècles plus
tard, l'esprit de la Renaissance, en glorifiant la liberté de pensée, créait le
climat favorable à cette recherche.
Paracelse fut le premier à attribuer
des raisons physiques et psychologiques au mal de saint Vit. Toute son approche
de ce mal témoigne de sa témérité et de sa liberté intellectuelle49. Pour Paracelse, le
mal de saint Vit ne relevait pas de la religion mais du savoir médical. Il
l'avait classé parmi "les maladies qui privent l'homme de raison".
Dans la préface de son traité consacré à ces maladies, il écrit que "la
nature est l'unique origine de la maladie" et il réfute la conception du clergé
de son temps concernant l'origine des maladies psychiques :
"Dans la nature il y a non seulement des
maladies qui affligent notre corps et notre santé, mais quantité d'autres qui
nous privent de la saine raison, et celles-ci sont les plus graves. En parlant
des maladies naturelles et en observant à quel point et combien gravement elles
affligent diverses parties de notre corps, nous ne devons pas oublier
d'expliquer l'origine des maladies qui privent l'homme de raison, car nous
savons qu'elles viennent du caractère de l'homme. Aujourd'hui le clergé
d'Europe attribue ces maladies à des êtres fantomatiques et à des esprits
triples; nous ne sommes pas enclins à les croire. Car la nature prouve que de
telles explications par des dieux terrestres sont inexactes et, comme nous
l'allons montrer dans ces chapitres, que la nature est l'unique origine de ces
maladies"50.
Paracelse se refusait également à
admettre que les saints puissent être tenus pour responsables d'une maladie ou
d'un fléau:
" Nous ne voulons pas accorder que les
saints donnent des maladies, et que celles-ci doivent recevoir d'eux leurs
noms, quoiqu'il y ait beaucoup de gens qui en font toute une théologie, et les
attribuent plus à Dieu qu'à la nature, ce qui n'est qu'une idée absurde. Pour nous,
nous n'aimons pas ce verbiage qui ne recèle rien de vrai, et n'est fondé que
sur la superstition, erreur autant contre nature, qu'elle déplaît à Dieu"51.
Paracelse réfutait donc la croyance
commune faisant du mal de saint Vit un mal de saint. A cet égard, il peut être
comparé à Hippocrate dépossédant les dieux de tout rôle dans l'origine de
l'épilepsie. Avec d'autres médecins de la Renaissance (par exemple, Ambroise
Paré en France, ou Weyer en Hollande), Paracelse contribua ainsi au retour de
la médecine vers le refus hippocratique du surnaturel52.
Paracelse ne niait pas le surnaturel.
Il pensait que la connaissance des lois de la nature permettrait de mieux
comprendre la maladie. Cependant pour Paracelse, comme pour son temps, l'ordre
naturel pouvait toujours être bouleversé par une intervention surnaturelle.
Dieu pouvait intervenir dans le monde qu'il avait crée et envoyer la maladie à
l'homme pour l'éprouver ou le punir de ses fautes53 . Ainsi, par exemple, il ne
contestait pas aux dieux le pouvoir de punir une personne voluptueuse avec
cette maladie.
Afin de soustraire le mal de saint Vit
de toute connotation religieuse, Paracelse lui donna l'appellation générique de chorea. Il distinguait trois formes de
la maladie et prescrivait un traitement approprié à chacune d'entre elles :
- La chorea
vitista "était selon lui la maladie d'origine. Elle avait hérité son
nom de saint Vit qui était supposé infliger la maladie. Il l'appelait aussi chorea imaginativa , aestimativa car elle était le fruit de l'imagination et de
la suggestion.
- La chorea
lasciva était provoquée par des
désirs sensuels et affectait plus les hommes que les femmes en raison de leur
plus grande force imaginative et de leur tempérament.
- La chorea
naturalis avait pour origine des
causes corporelles54.
Selon l'analyse de Paracelse, la
maladie peut être crée par le seul pouvoir de l'imagination ou de la foi. Pour
ce médecin, l'imagination est la puissance magique par excellence. Elle est une
force qui peut s'exercer dans tous les domaines de l'être et produire des
effets réel55. La foi est également une imagination et l'imagination de la foi est une
puissance psychique analogue à celle de l'imagination56. La foi peut être utilisée pour le bien comme pour le mal. Par le
pouvoir de notre foi nous avons la possibilité de faire naître ce à quoi nous
croyons. Ainsi nous avons la capacité de nous rendre malades nous mêmes. Il
suffit de s'imaginer être malade pour le devenir réellement à force de le
croire. Selon Paracelse, la foi peut engendrer toutes les maladies. Le mal de
saint Vit est un exemple de ces maladies de la foi chez les adultes comme chez
les enfants:
" Ainsi la cause de la maladie, chorea lasciva, est une simple opinion et idée nourrie par
l'imagination, affectant ceux qui croient une telle chose. Cette opinion et
idée sont l'origine de la maladie et chez les adultes et chez les enfants. Chez
les enfants, la cause est aussi une idée imaginée, basée non pas sur la pensée
mais sur la perception, parce qu'ils ont entendu ou vu quelque chose. La raison
en est celle-ci : ils ont la vue et l'ouïe si forte qu'inconsciemment ils ont
des fantasmes au sujet de ce qu'ils ont vu ou entendu. Et dans ces fantasmes,
la raison est prise et détournée dans la forme imaginée"57.
Et pour montrer les oeuvres d'une foi erronée,
Paracelse évoque les Anabaptistes qui, en proie au délire de leur imagination,
n'hésitent pas à se livrer au flammes. Il compare d'ailleurs les danseurs de
saint Guy aux Anabaptistes : "... ceux qui sont possédés de la danse ont à
ce point perdu la raison qu'ils sont de la même race que les Anabaptistes
..."58.
Les maladies de la foi et de
l'imagination constituent pour ce médecin de véritables "fantasmes"
qui annihilent la raison et s'imposent à tout l'être.
Comme théologien et métaphysicien,
Paracelse invitait à cultiver la foi en Jésus-Christ " qui nous rend
bienheureux ". Si nous recherchions la foi en la miséricorde divine, nulle
maladie ne pourrait nous atteindre en ce monde"59.
Les idées développées par Paracelse
expriment sa conviction qu'il existe une corrélation étroite entre le corps et
l'esprit (comme entre le microcosme et le macrocosme) et que l'influence du
psychisme sur l'être humain est déterminante. A cet égard, son rôle dans
l'histoire de la médecine psychosomatique a été souligné. Pour certains
auteurs, il est l'un des précurseurs de la médecine psychosomatique. Pour H.
Schott, au contraire, la médecine psychosomatique moderne dans sa forme
sécularisée reflète les thèses occultes,
magiques et religieuses des écrits de Paracelse 60.
A partir de
Paracelse, les manifestations du mal de saint Vit seront de plus en plus
considérées comme étant l'expression de désordres nerveux ou psychiques61.
Conclusion
Le mal de saint Vit est un phénomène religieux et culturel. La croyance
au mal de saint est l'élément central de ce phénomène.
Le mal de saint, dont la croyance s'est
maintenue jusqu'à nos jours, est la réponse qui a été donnée dans l'Europe
chrétienne pour donner un sens métaphysique à des troubles certainement liés au
malheur et à la maladie et pour les guérir. Comme l’a montré C. Lévi-Strauss
dans son article sur L’efficacité
symbolique, il est nécessaire de donner un sens au mal afin de pouvoir le
maîtriser et chaque société élabore un système de représentation de la maladie
et de la thérapie.
Le mal de saint, que l’on pourrait
comparer à la possession dans d'autres cultures, est un langage religieux et
symbolique qui permet à ceux qui souffrent d'exprimer et d'articuler leurs
problèmes personnels, puis de les résoudre sur le plan rituel en transformant
leur relation avec le saint tenu pour responsable de leurs maux. La thérapie
consiste à établir une relation d’entente avec le saint. Une relation positive
avec le saint est synonyme de joie et de santé. Elle est la source de la
guérison. Le saint, ici saint Guy, est donc la figure clé de ce système
mythico-rituel duquel dépend, selon la tradition, la maladie mais aussi la
guérison.
La transe est au centre des
pélerinages dansants dédiés à saint Guy. Elle permet de communiquer avec le
saint pour l’apaiser et obtenir sa grâce. Mais, nous l’avons vu, cette thérapie
par la transe est le plus souvent une entreprise de longue durée. C’est en
s’adonnant régulièrement au culte du saint que le malade peut espérer trouver
un soulagement durable à ses troubles et une transformation de sa vie.
La pratique de la transe trouve ses
racines dans un passé qui remonte aux sources de l’humanité. Et elle a été
utilisée depuis des temps très anciens à des fins thérapeutiques. La danse des
victimes de saint Guy (héritée de la danse curative pratiquée lors du solstice
d’été), celle des tarentulés ou des danseurs de saint Jean montrent que cette
pratique était populaire dans l’Europe d’autrefois. Et elle encore recherchée
de nos jours pour la guérison.
La thérapie des victimes de saint Guy
était donc profondemment ancrée dans les croyances et les traditions rituelles
propres à l'Allemagne et à l'Europe du Nord d'autrefois. Elle témoigne d’un
aspect particulier du culte de saint Guy et de la vie religieuse de ces régions . Elle a également joué un rôle
dans l’évolution de la pensée médicale au XVIè siècle.
NOTES
1 Saint Guy était l'un des saints protecteurs de la
jeunesse.
2 Cf. E. Schmitz-Clever,"Zur
Darstellung des Heiltanzes in der Malerei um 1500", dans Medical Hist. Journal, 1975, p. 307-316
3 A.
d'Aumont écrit également que les jeunes gens étaient plus sujets que d'autres à
cette affection et qu'il s'en rendait un grand nombre à une chapelle dédiée à
saint Guy près d'Ulm pour obtenir la guérison de leur mal. Cf. "Danse de
Saint-Weit" dans Encyclopédie ou
Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, Paris, 1754,
t.4, p. 629.
" De même, selon l'historien Grandidier, au printemps un grand
nombre de jeunes gens se rendaient à la chapelle de saint Vit près de Saverne
mêlant le plaisir de la danse aux exercices de piété. Ils dansaient sans cesse,
prétendant éprouver des secousses dans les bras et dans les jambes, ce qui les
faisait gesticuler involontairement". Cf. Manuscrits de Grandidier, Generallandessarchiv Karlsruhe, Fonds
Turckheim 69.
4 D.
H. G. E. XXII, 1241-1243.
5 Ce
miracle a souvent été représenté dans l'art. Saint Guy est immergé dans un
chaudron, l'instrument de son martyr.
6J.
de Voragine, La légende dorée,
Traduction J-B, M. Roze, Garnier Flammarion, 1967.
7 A. S.., juin III, 491-519
Vie des Saints, VI, 248-250
D. H. G E XXII, 1241-1243
8 J. Schenck von Grafenberg, Observationum medicarum, rararum, novarum,
admirabilium et monstrosarum, .L. VII, Francfurti, 1609 p. 136.
9 G. Horst, Observationum
medicinalium singularium, L.I, p. 374, Ulm, 1628.
10 J. Le Goff, L’Occident médieval, Paris, 1964, p.303
11 Il avait guéri le fils de Dioclétien, supposé
avoir été épileptique. Or, le mal de saint Guy était souvent assimilé à une
forme de possession, de même que la folie et l'épilepsie.
Pour expliquer ce lien, on a aussi évoqué un autre fait de sa légende et
le fait que son père, en vue de le faire abjurer la religion chrétienne,
l'avait exposé à la tentation de voir de belles jeunes filles danser devant
lui. Cf. A.S., juin III, 500
De même, d'après une légende née vers le XIVème siècle, saint Guy, avant
de mourir, aurait demandé à Dieu le pouvoir de protéger de ce mal tous ceux qui
célèbreraient l'anniversaire de sa mort. Une voix venue du Ciel lui aurait
répondu :"Guy, ta prière est exaucée". Cf. J. Agricola, Sybenhundert und fünffzig Teutscher Sprichwörter, n° 497, Haguenau,
1537
12 Les fêtes de saint Guy et de saint Modeste (15
juin), proches de la fête de la saint Jean, étaient célébrées avec de rites
analogues à ceux de la saint Jean. Or la fête de saint Jean, qui remplaça
l'ancienne fête du solstice d'été, confondait en elle des rites purificateurs
du solstice. La danse pratiquée lors du solstice était avant tout une danse
médicale destinée à guérir ou à préserver de la maladie pendant une année.
Celle-ci avait le caractère d'une danse orgiaque. La danse curative effectuée
par les Germains lors du solstice avait pour but la guérison des maladies
convulsives et de l'épilepsie. Les fêtes de saint Jean et de saint Guy
restèrent particulièrement propices à la guérison de ces affections. Les herbes
de la saint Jean étaient réputées guérir l'épilepsie et les maladies nerveuses.
Saint Jean et saint Guy furent donc voués à la guérison des maladies
convulsives (dans certains cas, ils furent même considérés comme étant les
auteurs de la maladie) et les danses curatives s'organisèrent lors de leurs
fêtes. Ceux qui souffraient périodiquement et momentanément de crises
convulsives invoquèrent en particulier saint Guy qui avait le pouvoir de guérir
ce type de maux. Le saint, très populaire en Allemagne, devint même le
protecteur attitré des malades souffrant de la "danse de saint Guy"
et des épileptiques. Il fut placé au nombre des 14 saints auxiliateurs, et vers
1500, dans de nombreuses régions allemandes, il supplanta saint Valentin,
également protecteur des épileptiques et des malades souffrant de convulsions.
H. Königs cite à ce propos un autel qui, dédié en 1350 à Notre-Dame, à saint
Valentin et à d'autre saints, portait en 1523 le nom de saint Vit. Cf. H. Königs, Der heilige Vitus und
seine Verehrung, Diss. Munster, 1939, p. 203-204. Cf. aussi P.
Diepgen, Deutsche Volksmedizin,
wissenschaftliche Heilkunde und Kultur, Stuttgart, 1935.
Une autre hypothèse a encore été émise
concernant ce patronage du saint. Avant d'être révéré en Allemagne, le saint
était très populaire en Italie où il était invoqué notamment contre les
morsures symboliques (chien enragé, tarentule ). Il est donc possible que ceux
qui souffraient d'un mal offrant des symptômes analogues dans les régions de
l'Europe du Nord aient eu recours à sa protection. Cf. E. von Kraemer "
Les maladies désignées par le nom d'un saint", dans Societas Scientiarum Fennica, Commentationes Humanarum Litterarum, 1950, XV. 2., p.87
13 E.
de Martino, La terre du remords.
Traduit de l'italien par Cl. Poncet, Paris, Gallimard,
I966.
14 Ibid., p. 267.
15 Ibid, chapitre
"Parallèles ethnologiques et folkloriques".
16 G.
Lapassade, Les rites de possession,
Paris, 1997, ch. 7, p. 65-72.
17 G.
Rouget, La musique et la transe,
Paris, Gallimard, 1990, p. 296-308.
18 Cf. E. von Kraemer, "Les maladies
désignées par le nom d'un saint...” ,
p.2.
19 Ce
dessin se trouve au Musée Albertina de Vienne.
20 G. Rouget, La
musique et la transe... p. 509.
21 E.
de Martino, La terre du remords... p. 69.
23 L'appellation
"danse de saint Guy" est ancienne. Elle désigna tout d'abord
l'ancienne danse curative du solstice maintenue lors de la fête de saint Guy.
Cependant, pendant longtemps, elle fut utilisée pour désigner des phénomènes
divers dans lesquels on trouvait des mouvements choréiformes (ainsi le mal de
saint Vit et, à partir de 1518, les épidémies de danse du Moyen Age). Puis les
médecins l'appliquèrent à toutes les affections qui donnaient lieu à des gestes
convulsifs, même si ceux-ci ne rappelaient pas les mouvements des danseurs.
Aujourd'hui la "danse de saint Guy" désigne une affection bien connue
médicalement: la chorée de Sydenham. C'est une maladie de nature infectieuse
ayant des relations avec le rhumatisme articulaire aïgu et qui atteint surtout
l'enfant.
Les phénomènes recouverts par la danse de saint Guy ont été analysés et
précisés pour la première fois par P. Diepgen, Deutsche Volksmedizin, wissenschaftliche Heilkunde und Kultur,
Stuttgart, 1935.
24 On
ne trouve aucune mention de l'histoire
de Trofféa ailleurs que dans Paracelse.
25 Ce
terme ne paraît pas avoir été employé par d'autres auteurs que Paracelse. Selon
Grillot de Givry il désignerait une entité mauvaise. Cf. Oeuvres de Paracelse (traduction Grillot de Givry), Paris,
1913-1914, p. 298, note 3.
26Paracelse, Oeuvres médicales
. T raduction
B. Gorceix, Paris, 1968,p. 211.
27 Henri Estienne se moquait en ces termes de
cette croyance: "Chacun de ces saints peut envoyer la mesme maladie de
laquelle il peut guarir... Ainsi ne faut-il douter que sainct Antoine et autres
semblables saincts n'ayent été adorez autant et plus pour crainte du mal qu'ils
pouvoyent faire, que pour esperance de quelque bien". Cf. L'introduction au traité de la conformité
des merveilles anciennes avec les modernes ou traité préparatif à l'apologie
pour Hérodote (1566),I, p. 596-97.
28 G.
Charuty, A l'épreuve des saints et des morts", dans Ethnologie des faits religieux, 1993, p. 187
29 Ibid.
p. 187
30 Cf. P. A. Sigal: "Un aspect du culte des
saints: le châtiment divin aux XIè et XIIè siècles d'après la littérature
hagiographique du Midi de la France" dans Cahiers de Fanjeaux, 1976, n° 11, p. 54.
La
croyance en la vengeance des saints (ou en l'aspect vengeur de la vengeance
divine) a été longtemps entretenue par l'Eglise, notamment à partir du XIIIè
siècle où fut développé un enseignement de la peur et du péché. Mentionnons,
par exemple, ces récits de danseurs maudits ou divinement punis qui circulèrent
afin de détourner les fidèles de danser dans les lieux saints. Le plus connu est celui des danseurs maudits
de Kölbigk.
31 Concernant
les saints musulmans de l'Islam maghrébin contemporain E. Dermenghem écrit:
"Les saints populaires sont facilement sévères, irrascibles, susceptibles
et jaloux, comme les forces de la nature dont il n'est pas facile de comprendre
du premier coup les lois. Ils punissent durement des manquements ou des
offenses apparemment légères. Ils supportent mal la contradiction ou la
résistance, déchaînent les catastrophes sans prendre le temps de la moindre
réflexion; en un mot, semblent se conduire de la manière exactement opposée au
saint véritable, dont la première règle est de
contrarier son âme et de résister
à ses passions". Cf. Le culte
des saints dans l'Islam maghrébin, Paris, 1954, p. 15-16
32 J.
Peyronnaud, Du dieu slave Volos à saint
Blaise, thèse, Paris, 1987, p. 336.
33 L'idée de la thérapie à travers la musique est
une idée ancienne empruntée aux philosophes grecs, notamment à Platon et à
Pythagore. Elle connaît un essor particulier à la Renaissance. A l'époque de la
Renaissance et à l'âge baroque la musique tint une place qu'elle n'avait jamais
occupée par le passé. Jamais on ne se soucia autant du pouvoir de la musique.
On lui reconnaissait la possibilité d'agir non seulement sur l'âme humaine mais
aussi sur le corps.
34 J. Bodin, De
la République, 1576, livre V, ch.I,
p. 681.
35 G.
Horst, Observationum... p. 374.
36 G.
Rouget, La musique et la transe... p. 288.
37 C'est
seulement vers 1930 que le terme de transe est employé en ethnologie.
38 O.
Brunfels, Onomasticon medicinoe,
Argentorati, 1524, art. Corybantes.
39 G. Rouget, La
musique et la transe... p. 45.
40 Dans la transe de possession, "le sujet
est vu comme ayant changé de personnalité, celle d'un dieu, d'un esprit, d'un
génie, d'un ancêtre, disons d'une divinité ayant pris possession de son corps,
s'étant substituée à lui et agissant à sa place".
La transe communielle
"consiste en ce que la relation
entre la divinité et le sujet en transe est vu comme une rencontre vécue par le
sujet, suivant les cas, comme une communion, comme une révélation ou comme une
illumination".
Dans la transe d'inspiration,
"le sujet est vu... comme étant investi par la divinité ou par une force
émanant d'elle, celle-ci coexistant en quelque sorte avec lui, mais en le
dominant et le faisant agir ou parler en son nom".Cf. G. Rouget, La musique et la transe... p. 79-80.
41 P. Bourcier, Danser devant les Dieux, Paris, 1989, p. 226
Au
XVIIè siècle, la danse de saint Guy, considérée comme une superstition,
fut interdite par l'Eglise.
42 Cette
cérémonie religieuse ne paraît pas être un rite
de possession. Rien n’indique que l’imaginaire des danseurs soit celui
de la possession. Les danses effectuées ne présentent apparemment aucun aspect
de mime ou d’identification avec saint Guy.
43 V. Crapanzano, Cases studies in spirit possession, New York, 1977, p. 19.
Voir, bien sûr, les travaux fondateurs de Cl.
Lévi-Strauss en ce domaine: "L'efficacité symbolique", dans Anthropologie structurale, Paris, 1958.
44 F.
Laplantine, Anthropologie de la maladie,
Paris, 1986, p. 215
45 G. Charuty, Folie, mariage et mort...p. 291.
46 V.
Crapanzano, Cases studies...p. 13-14.
47 B. Gorceix, "Paracelse", dans Encyclopédie Universalis, vol. XII,
1972.
48 Cf. A. Nicaise, "Paracelse", dans Revue de chirurgie, 1897, p. 247.
49 Ceci a été souligné par G. Zilboorg dans son
introduction au traité de Paracelse: "Les maladies qui privent l'homme de
raison,comme la danse de saint Vit, l'épilepsie, la méléncolie et la folie, et
leur traitement" (1567), dans Henri H. Sigerist (ed.), Quatre traités de Paracelse, traduction
et introductions de C. L. Temkin, G. Rosen, G. Zilboorg et H. Sigerist, Baltimore, 1941.
50 Henri E. Sigerist, Quatre traités..., p. 142
51 Ibid, p. 157-158.
Dans le traité consacré aux "maladies invisibles et à leurs
causes" (1531-1532), Paracelse réfute également les fausses croyances qui
transforment les maladies naturelles en maladies surnaturelles et qui forgent
des saints imaginaires. Il ne veut pas admettre que saint Valentin envoie
l'épilepsie, que saint Quirin et saint Jean couvrent le corps d'ulcères et de
plaies ou que le feu sacré soit l'oeuvre de saint Antoine. Cf. B. Gorceix
(trad.), Paracelse, Oeuvres médicales,
Paris, 1968.
52 Cf. I. Veith, Histoire de l'hystérie. Traduit de l'américain par S. Dreyfus, Paris, 1973, p. 124
53 Cf.
L. Braun, Paracelse, Lucerne, 1988,
p. 121.
54 Henri
H. Sigerist, Quatre traités... p.
181-182.
55 A. Koyré, Paracelse
(1493-1541), Paris, 1997, p.44.
Paracelse n'est pas le fondateur de la
théorie de l'imagination. Il adapta les idées de son temps à ses objectifs
propres. Le rôle magique de l'imagination était admis dans l'Antiquité et le
haut Moyen Age et il joue un rôle de premier plan dans la philosophie de la
Renaissance. On le retrouve ensuite avec le Romantisme. Cf. A. Koyré, La philosophie de J. Boehme, Paris,
Vrin, 1929.
56 Paracelse
distingue deux sortes de foi. La foi qui nous a été donnée par dieu dont il est
ici question, et la foi en Jésus Christ qui nous sauve.
57 Henri
E. Sigerist, Quatre traités...p. 158.
Paracelse évoque ici la suggestibilité
inconsciente des enfants. Il n'était pas en accord avec la conception
traditionnelle selon laquelle les enfants n'étaient pas doués d'une faculté
imaginative.
58 B.
Gorceix, Paracelse... p. 213
59 Ibid.
p. 212.
60 H.
Schott, "Des maladies invisibles". Imagination
and magnetism: Paracelsus and the consequences, dans Paracelsus. The man and his refutation, his ideas and their
tranformation, ed. by Ode Peter Grell, S. Pumfrey..., Leyden: Brill, 1998.
61 Evoquons, par exemple, les analyses de J. M. Charcot (Leçons sur les maladies du système nerveux,
1873) et de P. Janet (Les névroses,
1901) selon lesquelles l'hystérie et l'hystério-épilepsie jouaient un rôle
prédominant dans ces processions dansantes.
Aujourd'hui les médecins considèrent que les
malades de saint Vit ne pouvaient souffrir ni d'une maladie neurologique ni même d'une maladie infectieuse. Le
conditionnement temporel de la maladie, la réapparition annuelle des symptômes
et de la danse en relation avec la fête de saint Guy interdisent de poser un
tel diagnostic. Cf. L. J. Donaldson, J. Cavanagh, J. Rankin:
"The dancing Plague: a public health problem", in Public Health, 1997. Cf. aussi N.
Harding Mc Alister, " The dancing pilgrims at Muelenbeek", in Journal of the history of medecine, July
1977.
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