Meg Whitman, 55 ans, a dirigé le site d'enchères eBay de 1998 à 2008. En 2010, elle a été candidate malheureuse au poste de gouverneur de Californie. Depuis le 22 septembre, elle a pris la tête de Hewlett-Packard (HP) alors en pleine tourmente. Milliardaire, diplômée de Princeton et de Harvard, Meg Whitman a été choisie pour relancer le numéro un mondial des technologies de l'information. HP est moins rentable que Apple et IBM mais plus gros par son chiffre d'affaires (127,2 milliards de dollars). Son prédécesseur, Leo Apotheker, avait envisagé, cet été, la vente de la division PC, qui contrôle 20% du marché mondial et réalise plus de 40 milliards de dollars de chiffre d'affaires. Ces décisions ont fait plonger d'un tiers le cours de l'action HP. Au contraire, Meg Whitman a décidé de relancer HP dans les PC et les tablettes.
LE FIGARO. - Apple devrait devenir numéro un mondial des ordinateurs personnels en 2012, selon Canalys. Partagez-vous cette prévision ?
Meg WHITMAN. - Oui. Je pense que c'est possible si vous intégrez les tablettes. Apple réalise un travail formidable. Nous avons besoin d'améliorer notre jeu et nos produits pour reprendre la place de leader. Apple pourrait passer devant HP en 2012. Nous essaierons de redevenir le champion en 2013. Il faut du temps pour que les produits sur lesquels j'ai de l'influence arrivent sur le marché.
Pourquoi HP s'est-il fait dépasser par IBM dans les serveurs d'entreprise ?
Nous avons été le champion pendant de nombreuses années. Nous avons perdu cette position à cause de notre faiblesse grandissante dans les très gros serveurs, utilisés pour des opérations critiques dans les entreprises. Nous sommes en train de renouveler notre gamme Superdome.
Quand HP sera-t-il le numéro un mondial en termes de profits ?
HP a énormément d'atouts. Mon objectif est de positionner HP, qui a déjà 70 ans d'histoire, pour les soixante-dix prochaines années. Nous avons beaucoup de travail à réaliser. Je suis là pour redonner un avenir au groupe. Les changements importants d'une compagnie prennent de trois à cinq ans. Dans cinq ans, HP sera plus solide qu'aujourd'hui.
Pourquoi avez-vous décidé de garder les PC ?
Cent personnes, réparties en deux équipes, ont dû y réfléchir. Une équipe devait étudier les raisons de se séparer des PC, l'autre les motifs pour les conserver. Au terme de cette réflexion, il m'a semblé clair que nous devions conserver cette division pour trois raisons. Nous séparer des PC aurait eu un coût de près de 1 milliard de dollars. Ensuite, l'impact sur notre chiffre d'affaires aurait été trop important. Car les entreprises qui achètent nos serveurs, nos réseaux et nos équipements de stockage achètent aussi des PC. Enfin, la marque HP est liée de manière indiscutable à nos PC.
Pourquoi lancer le Slate 2, votre deuxième tablette, après avoir bradé le TouchPad ?
Nous allons revenir sur le marché des tablettes. Le Slate 2 signe notre retour. Nous avons arrêté les produits qui utilisaient notre système d'exploitation WebOS. Nous reviendrons en 2012. Nous aurons une tablette Internet qui utilisera Windows 8 de Microsoft.
Une tablette est-elle comparable à un PC ?
Pas pour l'instant. Les tablettes Internet servent surtout à consommer des médias et aux courriels. Si vous voulez utiliser des logiciels de productivité, comme ceux de Microsoft, vous ne le pouvez pas. Nos études prouvent qu'il s'agit d'un achat supplémentaire qui ne vient pas empiéter sur le marché des PC. C'est un domaine important sur lequel nous voulons aller.
Qu'allez-vous faire de votre système d'exploitation WebOS ?
Nous devrions annoncer notre décision dans les deux prochaines semaines. Ce n'est pas une décision facile, car nous avons une équipe de 600 personnes qui est dans le flou. Nous avons besoin d'avoir un autre système d'exploitation.
Êtes-vous plus prudente en matière d'acquisitions ?
En 2012, après le rachat d'Autonomy pour 7,1 milliards de livres (8,3 milliards d'euros), nous devons reconstruire le bilan du groupe. Nous ne devrions pas réaliser de gros achats. Je pourrais regarder les opportunités au-dessous d'un milliard de dollars, mais je ne pense pas que nous réaliserons de telles acquisitions.
Dans les services, avez-vous la même stratégie qu'IBM ?
Les PC, les imprimantes, les serveurs, les réseaux, le stockage représentent 70% de notre chiffre d'affaires. Nous n'allons pas désinvestir le matériel pour les services. En quinze ans, IBM est devenu un groupe orienté vers le conseil et les technologies. De notre côté, nous resterons spécialisés dans le matériel de pointe, complété par des logiciels et des services.
Augmenterez-vous les efforts de recherche et le développement ?
Il est souhaitable d'investir davantage dans notre recherche et développement. Nous n'avons pas un objectif rapporté à notre chiffre d'affaires global. Nous devrons investir davantage dans le stockage, les réseaux et les serveurs pour nous aligner sur nos concurrents comme EMC et Cisco. Notre dernier serveur, qui utilise un processeur ARM, est plus efficace en termes de consommation d'énergie. Nous avons besoin de ces innovations majeures pour nous différencier.
Vous à la tête de HP, Ginni Rometty chez IBM, les femmes prennent-elles le pouvoir ?
Oui, nous sommes trois à la tête de groupes high-tech, car Xerox est dirigé par Ursula Burns. Nous sommes bonnes, c'est tout ! Lorsque j'ai été diplômée, moins de 20% des étudiants étaient des femmes. Maintenant, elles sont aussi nombreuses que les hommes. Leur pourcentage va donc augmenter parmi les dirigeants des grandes entreprises.
Allez-vous reprendre la politique ?
À moyen terme, non. J'ai dû m'engager pour plusieurs années. HP a déjà eu trois directeurs généraux en moins de deux ans. Je dois donc rester. Même si mon ami Mitt Romney devient le prochain président des États-Unis, je ne le rejoindrai pas à Washington.
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