vendredi 13 août 2010

René Girard, Penseur de la violence

"De livre en livre, Girard approfondit ce qu'il appel son hypothèse :
la mise en évidence du rôle de l'imitation, de la mimésis, dans le fonctionnement du désir et tout ce qui en résulte, notament le sacrifice d'un bouc émissaire par un groupe humain en proie à la réciprocité concurrente du désir. Pour Girard, et pour Freud, qui l'avait pressentie dans "Totem et tabou", ce meutre inaugural, ce lynchage d'une victime par ses persécuteurs est le fondement antropologique de toutes les cultures humaines.
Le groupe, en somme, refait son unité sur le sacrifice d'un seul, sacrifice qui ramène temporairement le calme tandis qu'est promue une "vérité" unanime, celle des persécuteurs.
Cette fausse vérité sert de fondement culturelle à la persécution des victimes puisqu'elle les présente comme des coupables, des trublions, des menaces. Ainsi la foule des persécuteurs se convainc elle de la justesse ontologique qu'elle exerce. Les foules en mal de lapidation sont "unanimes", chaque résolution se nourrissant, par contagion mimétique, de la résolution des autres.

La subversion radicale du Christianisme, à ne pas confondre avec son instrumentalisation historique par la chrétienté, tient au fait qu'il déconstruit le discours des persécuteurs, en montre la fausseté, et contribue de siècle en siècle, à le rendre illégitime.

Extrait de "Le Nouvel Observateur, Les géants de la pensée, 5 au 11 août 2010".

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