POLITIQUE - Malgré les mises en garde adressées aux manifestants, et le renouvellement annoncé par Vladimir Poutine de l'élite politique russe après la présidentielle...
L'opposition russe continue de défier le pouvoir du Kremlin. Elle a organisé ce mardi à Moscou, pour la seconde journée consécutive, une manifestation contre Vladimir Poutine, malgré l'interdiction du rassemblement et l'arrestation d'un des organisateurs. Via Twitter et Facebook, les opposants ont appelé leurs sympathisants à rallier le cortège. Selon des reporters sur place, environ 600 personnes étaient présentes, cette estimation incluant toutefois des jeunes gens vêtus d'anoraks bleus scandant «Russie! Poutine!». Les contestataires répliquaient eux aux cris de «Liberté!» ou «la Russie sans Poutine!».
La foule a été contenue par des dizaines de policiers anti-émeutes. Au moins dix personnes ont été arrêtées après des échauffourées. La veille, 5.000 personnes environ avaient déjà battu le pavé, protestant contre la fraude électorale lors des législatives de dimanche et appelant à chasser du pouvoir l'ancien espion du KGB. Il s'agissait de la plus grande manifestation organisée depuis des années dans le pays. Environ 300 personnes ont été détenues après la manifestation et la police a diffusé ce mardi un communiqué prévenant qu'elle ne tolérerait aucune «provocation», un message clair aux velléités de contestation.
Condamnations
Un des organisateurs du défilé de lundi, Ilia Yachine, a été condamné à quinze jours de détention. «Il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une décision politique destinée à intimider, moi et mes collègues. Nous n'allons pas cesser notre lutte», a-t-il promis, soulignant que le jugement pouvait accroître le mécontentement populaire. Un autre blogueur en vue, Alexei Navalny, a été condamné ce mardi à deux semaines de prison.
Après le net recul de son parti aux élections législatives et à la colère de la rue, le Premier ministre russe a réagi ce mardi en promettant de renouveler le personnel politique. Fait quasiment inédit depuis 1999 et son accession au pouvoir, la mainmise de Vladimir Poutine sur la société russe semble avoir reculé. Au Parlement, sa majorité absolue a été ramenée à 13 sièges seulement, et son parti, Russie unie, est passé de 64% des voix à moins de 50% en à peine quatre années.
Le chef du gouvernement, qui devrait prendre la direction du Kremlin après la présidentielle du 4 mars prochain, s'est engagé à prendre en compte les aspirations à une modernisation émanant de la société russe. «Il y aura naturellement un renouvellement significatif des effectifs au sein du gouvernement», a-t-il dit aux membres de son parti. Il s'agit de la première déclaration montrant ouvertement l'inquiétude de l'homme fort du pouvoir russe après le scrutin de dimanche. Mais il faudra toutefois patienter, vraisemblablement après son accession à la présidence en mars, pour constater l'ampleur du renouvellement promis mardi.
«Sérieuses inquiétudes» d'Hillary Clinton
Dans un discours devant les membres de l'OSCE, Hillary Clinton a une nouvelle fois fait part de ses «sérieuses inquiétudes» sur l'équité du scrutin de dimanche. Le sénateur républicain John McCain a, lui, manié le sarcasme sur Twitter: «Cher Vlad, le printemps arabe vient d'un endroit pas très éloigné de chez toi.» Sur son blog, l'oligarque Mikhaïl Prokhorov, en disgrâce auprès du Kremlin après une brève carrière politique, a évoqué un pouvoir aux abois. «Si rien ne change, l'appareil (politique) va entièrement s'effondrer. Le système ne vas pas durer plus de cinq ans», écrit-il.
La Russie a jugé ces réactions «inacceptables» et a rejeté les critiques américaines: «Malheureusement, Washington s'en tient à des clichés hors d'âge et catalogue ce qui se passe dans notre électorat sans même essayer de comprendre», a dénoncé le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué. «Nous espérons qu'à l'avenir la partie américaine s'abstiendra d'attaques aussi hostiles qui vont à l'encontre des développements globalement positifs de nos relations bilatérale»", poursuivent les Affaires étrangères.
Si Russie unie a perdu la majorité des deux tiers nécessaires aux réformes constitutionnelles, Vladimir Poutine a souligné lundi que la majorité simple suffisait pour adopter la plupart des lois et le président Dmitri Medvedev s'est dit prêt à des alliances de circonstances sur certains textes. Dmitri Medvedev a noté que les électeurs avaient envoyé «un signal aux autorités» mais que certains mauvais résultats étaient de la responsabilité des dirigeants locaux.
Vladimir Poutine reste néanmoins, et de loin, la personnalité politique la plus appréciée. L'issue du scrutin présidentiel de mars ne fait guère de doute et le futur chef de l'Etat a fait savoir en septembre qu'il céderait alors la tête du gouvernement au président sortant Dmitri Medvedev. Des analystes politiques du monde russe jugent peu probable un soulèvement dans le pays, soulignant qu'en dépit de la révolution de 1917 le plus grand pays du monde par la taille n'a pas une grande habitude de la contestation populaire et que les dissidents sont souvent durement réprimés par le pouvoir.
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