Giotto : Le Rêve de Joachim
A
force d’ânonner sans conviction les mêmes prières depuis des siècles,
celles-ci se sont vidé de leur substance. Elles expriment pourtant
souvent des choses très belles un peu délaissées, comme la gratitude, le
remerciement, l’émerveillement, l'amour… Mais dans un monde désenchanté
elles ne sont devenues que mots appris par cœur, paroles répétées sans
foi, outils d’obéissance, alors qu’elles devraient être de magnifiques
portes vers le ciel.
Tout ça pour dire que dans un livre de Maud Séjournant (qu’il faut décidemment lire absolument !) :« La Spirale Initiatique » (Albin Michel), j’ai lu hier une bien curieuse chose.
Un érudit américain du nom de Neil Douglas-Klotz,
s’est occupé de retrouver les textes araméens à l’origine de la version
grecque de la Bible, version qui fut ensuite la source des traductions
en langue moderne (si ce fait t’avait échappé, et si j’ai bien compris,
la Bible fut d’abord écrite en hébreu, puis traduite en araméen qui
était la langue de l’époque dans cette région du monde, et entre autre
–plus tard- celle de Jésus ; puis traduite en grec, puis en latin, puis
dans les langues modernes. Les principales versions de la Bible que nous
connaissons, sont donc des traductions de traductions, de traductions,
de traductions, datant d’il y a bien longtemps…).
A la lumière de nos connaissances actuelles en hébreu
(langue éminemment complexe à traduire), innombrables sont les exégèses
qui reviennent sur des points de la Bible mal traduits, éclairant le
texte de nouvelles compréhensions (Annick de Souzenelle, entre autre, en
a beaucoup parlé).
Pourquoi les autorités vaticanes ne cherchent-elles
pas à médiatiser cette réflexion et ces nouvelles traductions, voilà une
question que l’on peut se poser, même si l’on a déjà une idée de la
réponse…
Donc cet érudit à retrouver ces premières traductions
de l’hébreu en araméen, les a traduites en anglais et les a publiées.
Ses livres n’étant pas à ce jour traduits en français, Maud Séjournant
propose dans son livre la traduction en français d’une des prières les
plus connues : le Notre Père.
Si tu l’as oublié, cette prière consiste en ceci :
« Notre Père qui êtes aux cieux,
Que ton nom soit sanctifié,
Que ton règne vienne,
Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour.
Pardonne-nous nos offenses,
Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés.
Et ne nous soumets pas à la tentation,
Mais délivre-nous du Mal.
Amen. »
Et en voici maintenant la version traduite directement de la traduction araméenne d’origine proposée par Neil Douglas-Klotz :
« Ô, Toi qui donnes vie, Père-Mère du Cosmos,
Dirige ta lumière à l’intérieur de nous, et rends-la utile
Pour que ton nom y vive pleinement,
Créé en nous maintenant ton règne d’unité,
Ton seul désir alors agit avec les nôtres, dans toute lumière et toutes formes.
Accorde-nous ce dont nous avons besoin chaque jour en pain et en conscience
Efface les traces que nos échecs ont créées e notre cœur
De même que nous nettoyons notre cœur du poison de la rancune.
Ne laisse pas la surface des choses nous maintenir dans l’illusion,
Mais libère-nous de ce qui nous entrave
De toi naissent toute volonté et le pouvoir d’accomplir,
Et le chant qui donne de la beauté à toute chose
Et qui à chaque instant renaît.
En toute vérité, ces paroles sont puissantes,
Qu’elles soient la terre où mes actions s’enracinent pour grandir ».
Avoue que ça change tout, n’est-ce pas ?...
Et puisque l’on est dans ce cercle-là, une autre chose intéressante.
Maud Séjournant, à un moment, parle de l’Immaculée
Conception. En expliquant que le sens de cette expression n’était pas
tant « née sans l’intervention biologique d’un homme », mais : « née
sans aucun péché ».
Or, il se trouve qu’il est dit que Marie est née d’un
couple très âgée ; sa mère avait même passé l’âge de la ménopause. Sa
théorie est que, de par leur grand âge, « ses parents avaient eu le
temps d’avoir fait un travail de réconciliation avec leur être profond
au travers de nombreux pardons, purifications, transformations. Bref,
ils s’étaient délivrés de leur ancien conditionnement et avaient
retrouvé leur condition d’innocence et de pureté originales que
certaines traditions appellent « l’éveil ». Donc, Marie n’a pas été
élevée avec le fardeau culturel véhiculé dans l’inconscience habituelle
mais avec l’amour inconditionnel de ses parents dans l’absence de
notions de faute ou de honte de ce qu’elle était ; c’est cela être né
sans le péché originel, c’est-à-dire sans aucun sentiment d’inadéquation
de ce que l’on est… »
Je trouve pour ma part cette hypothèse très
intéressante, dans la mesure où elle rejoint aussi certaines approches
de la psycho généalogie. En tout cas, ça ouvre des portes…
Une précision toutefois, le livre dont je cite les
extraits est un livre sur le chamanisme et plus précisément sur une
tentative d’inscrire ces pratiques dans le monde occidental. Cela pour
éviter toute confusion, les seules références à la religion chrétienne
dans ce livre sont celles que je cite, le reste parle d’autre chose, et
c’est tout autant passionnant, pour ne pas dire plus…
PS : Après avoir écrit ce texte, j’en ai, comme
toujours, cherché une illustration. A savoir ce « Rêve de Joachim » de
Giotto. Pour me rendre compte après
que Joachim était le prénom du père de Marie, et que c'est de lui qu'il
est question dans cette peinture… Ce que je ne savais pas ! Bizarre,
vous avez dit bizarre ?...
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