La société de défiance. Comment le modèle social français s'autodétruit par Yann Algan, Pierre Cahuc
La société de défiance. Comment le modèle social français s'autodétruit,
par Yann Algan, Pierre Cahuc
Coll. Cepremap, éditions rue d'Ulm, 100 p., 5 euros.
Coll. Cepremap, éditions rue d'Ulm, 100 p., 5 euros.
La thèse est simple: la société française est rongée par le
corporatisme et l'étatisme. Le premier engendre des inégalités et des
rentes de situation au profit de certains groupes; le deuxième affaiblit
la société civile et suscite des formes diverses de corruption pour
tourner les règles ou en tirer parti. Tous deux nourrissent un climat de
défiance qui, tout à la fois, réduit le bien-être et la croissance,
accroît le chômage, accentue la demande d'Etat au détriment de
l'adhésion syndicale, et suscite grogne et passe-droits. On pourrait
conclure "et voilà pourquoi votre fille est muette", tant ce genre de
causalités repose habituellement sur des affirmations invérifiables.
Sauf que, ici, les deux auteurs ont entrepris de les vérifier, en
mobilisant des sources diverses, dont certaines très originales, comme
par exemple le nombre de contraventions dressées aux diplomates des
différents pays.
C'est justement ce recours systématique à l'analyse quantitative qui
donne à ce petit livre non seulement son originalité, mais aussi sa
force de conviction. Comme "la confiance mutuelle et sa
contrepartie, la capacité à respecter ses engagements, semblent jouer un
rôle décisif dans l'efficacité du marché", ils attribuent une
large partie de la faible croissance française (donc du niveau de
chômage) à ce manque de confiance. Celui-ci n'étant pas une donnée
culturelle, mais un produit du corporatisme et de l'étatisme, les
auteurs plaident en faveur d'un droit social rompant avec ces deux
tares. Là réside le maillon faible de leur analyse: jouer davantage le
jeu du marché, dans une société qui n'est guère solidaire, n'est-ce pas
prendre le risque d'une aggravation des inégalités et du sort des moins
bien placés?
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