dimanche 8 décembre 2013

Douze groupes français parmi les 100 plus innovants au monde : le visage de la France qui avance

L'Hexagone conserve sa troisième place au classement annuel "Top 100 Global Innovators". Un résultat qui s'explique notamment par la méthodologie de l'étude, mais aussi par le crédit d'impôt recherche.

Cocorico

Publié le 7 décembre 2013

 Crédit Reuters

Non, la France n'est pas en panne d'innovation. Douze groupes tricolores figurent dans le classement annuel "Top 100 Global Innovators", dévoilé début octobre par le cabinet américain Thomson Reuters. Comme l'an dernier, la France monte sur la troisième marche du podium, derrière les Etats-Unis (45 groupes) et le Japon (28). La France est le premier pays européen, devant la Suisse (4 groupes), l'Allemagne (3), la Suède (2) et les Pays-Bas (1). 
Comment expliquer cette belle performance ? D'abord par la méthodologie. Quatre critères sont pris en compte pour classer les entreprises et les centres de recherche : le nombre de brevets déposés ; leur taux de succès (la différence entre les brevets déposés et ceux qui sont validés) ; leur portée internationale ; et leur influence (le nombre de fois où ils sont cités par d'autres demandeurs). Cette méthodologie explique pourquoi la Chine, numéro 1 mondial des dépôts de brevets, est aux abonnés absents.
"Même si l'on ne peut que se réjouir d'un classement favorable à la France, le nombre de dépôts de brevets ne permet certainement pas d'évaluer notre capacité d'innovation", explique Frédéric Fréry, professeur de stratégie à ESCP Europe. "Innover, ce n'est pas avoir des idées, c'est les mettre en œuvre. Comme le disait le sénateur texan Robert Duncan, 'l'innovation est la capacité à convertir des idées en factures'", ajoute-t-il.
"L'innovation ne nécessite pas nécessairement des idées nouvelles : copier, combiner ou transformer des idées existantes peut suffire. Apple, régulièrement salué pour sa capacité d'innovation, n'a inventé ni le lecteur MP3, ni le smartphone, ni la tablette." Ce qui manque à nos entreprises, "le plus souvent, c'est la capacité à maîtriser le processus complexe qui mène de l'idée au marché. Si la créativité est avant tout une question de psychologie, l'innovation est avant tout une question de management".
La liste des groupes français est similaire à celle de 2012, avec neuf entreprises (Alcatel-Lucent, Arkema, EADS, L'Oréal, Michelin, Saint-Gobain, Thales, Safran et Valeo) et trois organismes (CEA, CNRS, IFP Energies nouvelles). Seul changement : Renault, présent en 2012, n'y figure pas. Ces sociétés et organismes ont déboursé 49,9 milliards de dollars en recherche en 2012. "Les entreprises mises à l'honneur sont celles qui déposent le plus de brevets ou dont les brevets ont le plus d'impact. Ce sont donc de très grandes entreprises", résume Frédéric Fréry.
"Pour expliquer l'absence de Renault, mais aussi de PSA, on peut supposer que nos constructeurs automobiles, gravement touchés par la crise, ont drastiquement réduit leurs dépenses de R&D", analyse-t-il. "En ce qui concerne plus spécifiquement Renault, l'essentiel de son effort de recherche a porté ces dernières années sur sa gamme de véhicules électriques, qui a été lancée - sans grand succès - en 2013", ce qui expliquerait son recul dans le classement.
"Néanmoins, là encore, quelles sont les Renault historiquement considérées comme les plus innovantes ? La R16 ? La R5 ? L'Espace ? La première Twingo ?", s'interroge Frédéric Fréry. "Ces véhicules n'ont pas particulièrement innové par leur contenu technologique, mais par l'originalité et la cohérence de leur concept. On retrouve donc une fois encore l'idée que l'innovation n'est pas une question de recherche, ni même de technologie, mais bien la rencontre inédite entre une offre et une demande."
"Cette réussite est en grande partie due à la politique d'innovation [de la France] qui a institué un crédit d'impôt recherche", explique le cabinet. "Cela a effectivement encouragé les entreprises à développer des projets de R&D, ce qui s'est traduit, on peut l'espérer, par une meilleure performance en termes de dépôts de brevets", souligne Frédéric Fréry. Mais là encore, il y a confusion entre recherche et innovation. "A côté d'un crédit d'impôt recherche, on pourrait imaginer un crédit d'impôt innovation, qui favoriserait plutôt la conception, le financement et la commercialisation de nouvelles offres."
"Par-delà la créativité fiscale dont nos gouvernements se sont faits les champions, le plus efficace serait certainement des démarches administratives simplifiées, des réglementations moins fluctuantes et une meilleure tolérance à l'échec, ajoute-t-il. Pour favoriser l'innovation, plutôt que des chercheurs, il nous faut des entrepreneurs, y compris au sein des entreprises existantes. Or, les entrepreneurs ont besoin de structures économiques stimulantes, qui encouragent l'initiative et permettent de se projeter dans l'avenir avec confiance. Convenons que la France ne correspond pas exactement à ce descriptif."
Selon Thomson Reuters, ces 100 groupes les plus innovants ont réalisé un chiffre d'affaires total de 4 500 milliards de dollars en 2012 - c'est près de deux fois le PIB du Royaume-Uni. Ils ont aussi investi 223 milliards de dollars dans leur recherche et développement (R&D) et ont créé plus de 266 000 emplois.
M.S

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