Sauvetage de la Grèce, évasion fiscale, Mario Draghi, toutes les raisons
sont bonnes pour parler de la Grèce mais jamais de ce que subit au
quotidien sa population, il est temps d’établir le bilan de la politique
d’extrême austérité qui lui est imposée et ses
conséquences.
Par Quentin Georges.
La
crise, ah la crise ! Un mot tellement idyllique pour les gouvernements,
on l’utilise à toutes les sauces pour pouvoir
justifier n’importe quelle mesure austère et contreproductive. La
Grèce est aujourd’hui à la fois le cobaye d’une politique européenne
extrêmement dure et en même temps le désigné responsable de la
situation. Eh oui, la stabilité de l’euro est bouleversée par ce pays,
il faut donc lui appliquer une politique de la rigueur. Ah rigueur ! Un
qualificatif doux et sucré quand on ne regarde
pas ses conséquences…
Commençons
par la crise sanitaire immonde vécue par la population. Les hôpitaux
n’ont aujourd’hui plus de gants pour leurs employés
qui auscultent les patients sans aucune protection. D’ailleurs on ne
vous soigne pas non plus, les hôpitaux n’ont plus de médicaments et les
sociétés pharmaceutiques ne les livrent plus car
ils ne sont plus assez solvables pour les payer… Les cancéreux quant à
eux ne sont plus remboursés qu’à hauteur de 10% par leur mutuelle pour
leur traitement, autant dire que peu d’entre eux se
soignent. De toute manière, près de 40% des grecs ne sont plus
remboursés car n’ont plus d’assurance maladie. Pourtant, tous ces
hôpitaux avaient reçu une évaluation positive sur leur
fonctionnement courant 2010, c’est dire à quel point la situation
s’est dégradée rapidement. Selon le centre grec de contrôle des maladies
dénommé KEELPO, le SIDA se fait de plus en plus présent.
En effet nous sommes passés de 507 cas enregistrés en 2008 à 1043 cas
durant la période de janvier à octobre 2012, les plus nombreuses
victimes étant les utilisateurs de drogues injectables. Pour
finir sur ce point, on peut parler du retour de maladies que l’on pensait disparues telles que
la malaria, l’explication vient naturellement du fait que la population n’est plus vaccinée.
Du point de vue social et économique, il n’y a aucune raison de se réjouir non plus. Les chiffres du chômage n’ont cessé d’augmenter,
ainsi fin
2011 le taux de chômage était évalué à 19,7% de la population active
grecque selon l’autorité des statistiques grecques, fin 2012 il est
estimé à près de 27%. La zone du pays la plus touchée est
bien entendue l’agglomération d’Athènes. Ce taux est plus élevé chez
les femmes d’une part, et d’autre part pour la tranche âgée de moins de
34 ans. À cela, on peut ajouter que le salaire
des fonctionnaires a été baissé de 30% du jour au lendemain,
d’ailleurs le salaire moyen grec était évalué à 1200€ par mois avant
2010 alors qu’aujourd’hui il est environ de 700€, même les
représentants de la force publique c’est-à-dire les militaires et
les policiers ont vu leur rémunération fondre comme neige au soleil. Des
milliers de retraités et épargnants grecs se sont fait
voler par le gouvernement : ceux-ci ayant acheté des bons du trésor
grecs pour financer leur retraite devaient toucher les intérêts cette
année, or le gouvernement les a informés que les fonds ne
seraient disponibles qu’à partir de… 2042 ! Il y a tellement de
choses à dire sur le sujet qu’il est difficile de toutes les nommer,
nous finirons par cette réforme anti familiale qui peut
provoquer l’indignation chez n’importe qui. L’État grec a décidé de
surtaxer les familles ayant plus de trois enfants, ainsi par rapport à
une famille de deux enfants elle paiera près de 1600€
d’impôt en plus. La natalité n’est pas prête de monter.
Heureusement, un ancien ministre grec a trouvé une solution pour
relancer le pays, en effet M. Doukas propose de faire travailler les
citoyens grecs sans les payer ! Après le retour de la malaria, le retour de l’esclavage !
On peut
dénoter des faits assez incroyables se produisant et qui ne sont peu ou
pas relevés par les médias français. Par exemple, près
de 300 écoles ont dû fermées cet hiver puisque
celles-ci n’avaient plus les moyens de chauffer les salles alors que
les températures étaient très basses, ainsi l’éducation des enfants ne
peut même pas être assurée. C’est l’une des
conséquences de l’augmentation des énergies fossiles, mais ce n’est
pas la seule. En effet, les grecs se chauffent dorénavant
au bois, certains coupent du bois dans les forêts locales ce qui
fait apparaitre d’une part un phénomène de déforestation, et d’autre
part une pollution en raison de l’apparition d’une brume
composée de particules dangereuses pour l’organisme humain. Plus
« amusant », le club de football emblématique grec, le Panathinaïkos, a demandé à jouer pendant la journée car
le
club n’a plus les moyens d’assurer le paiement de sa facture
d’électricité ! Le club de Voukefala a même été jusqu’à demander à une maison close de les
sponsoriser pour tenter de stabiliser ses finances ! Toujours
dans le dément, et c’est sans doute une première dans toute l’histoire
de l’espionnage moderne, les services secrets
grecs se sont mis en grève pour contester la baisse de leur salaire,
du jamais vu !
Deux
conséquences principales apparaissent quant à cette situation. La
première est à saluer grandement, c’est l’apparition et la
résistance du quotidien grec Hot
Doc qui donne aux médias européens une belle leçon de
journalisme. C’est à eux que l’on doit la fameuse diffusion de la liste
Lagarde où, à titre d’exemple, on apprend la corruption de
nombreux politiciens grecs comme M. Papandréou dont la mère possède un
compte en banque en Suisse crédité de 500 millions d’euros ; il
convient de préciser que ladite mère est âgée de près de 90
ans. De même, on a pu voir l’évasion fiscale de nombreux députés des
partis Pasok et Nea Demokratia (l’équivalent du PS et de l’UMP) en
Suisse. Ce numéro s’est écoulé à près de 100.000
exemplaires. À ce propos, comme à l’époque napoléonienne, le gouvernement cherche à interdire la publication de ce journal. La
deuxième conséquence, et c’est sans doute le pire élément de ce bilan, se caractérise par la montée en puissance du parti néo-nazi l’Aube
dorée qui a obtenu lors des dernières élections législatives 21
sièges au Parlement. Salut nazi, croix gammée moderne, thèse raciste,
violence ethnique, tout est pourtant réuni pour
qu’un tel parti soit au plus bas dans l’opinion publique. Il connait
toutefois un grand succès puisqu’il lutte contre le plan de rigueur
imposé par le gouvernement grec et l’immigration illégale,
mais surtout agit clairement « sur le terrain ». À titre d’exemple,
ses adhérents organisent des chasses dans les marchés publics pour
trouver les marchands sans autorisation
officielle et saccager leur stand. La corruption des partis de
gauche et de droite et les conditions de vie très difficiles font que ce
parti, certes très dur mais actif contrairement aux autres,
connait un vif succès dans l’opinion publique.
L’inspiration
de cet article m’est venue suite à l’entrée officielle de la France en
récession. En effet la Banque de France a
confirmé ce jeudi 10 janvier que l’activité économique du quatrième
trimestre 2012 avait baissé de 0,1% alors qu’une baisse similaire avait
été constatée pour le troisième trimestre de cette année.
Beaucoup parlent des problèmes en Espagne, en Italie ou encore au
Portugal mais la situation est plus que préoccupante en France. La
question à se poser est tout simplement de savoir si les
Français, six fois plus nombreux que les Grecs, accepteront tout ce
qui a été accepté par le peuple grec comme sacrifice ou si, au
contraire, il se soulèvera…
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