mardi 3 septembre 2013

La vérité sur les armes chimiques en Syrie


Désintox. Les informations de ces derniers jours sur l’utilisation d’armes chimiques par le régime de Bachar al-Assad (entre 500 et 1 300 victimes civiles le 20 août dans une banlieue de Damas) méritent un éclairage rigoureux que trop d’« experts » autoproclamés et de commentateurs incompétents ne font pas. Photo © AFP

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Le problème est que le crédit accordé sans nuances à ces « expertises » risque d’entraîner l’Occident, la France au premier rang, dans une « réaction de force » (dixit Laurent Fabius). C’est peut-être l’intérêt de l’Arabie saoudite et de la Turquie, qui poussent à une intervention, mais pas forcément celui de notre pays dans cette région.
Sur le plan militaire et technique, il s’agirait d’une attaque à la roquette. C’est est peu crédible. L’armée du régime en est capable mais elle possède des vecteurs aériens, plus précis. Il est dit aussi que le gaz employé est du sarin. Les commentateurs expliquent que les blessés bavent et ont les yeux écarquillés. Cela s’appelle une mydriase. Le problème est que le sarin provoque un myosis (le contraire d’une mydriase), marqué notamment par un rétrécissement de la pupille. En voici les grandes caractéristiques :
  • Nez qui coule
  • Yeux larmoyants
  • Petites pupilles ou micropupilles 
  • Douleurs aux yeux
  • Vision brouillée
  • Bave ou sudation excessive 
  • Toux
  • Serrement de poitrine
  • Respiration rapide
  • Diarrhée
  • Miction accrue
  • Confusion
  • Somnolence
  • Faiblesse
  • Maux de tête
  • Nausées, vomissements, et/ou douleurs abdominales
  • Fréquence cardiaque lente ou rapide / tension basse ou élevée
Sur le plan politique, une telle action, en ce moment, serait aberrante de la part du régime Assad. En plus de quarante ans de pouvoir, il a employé les moyens les plus durs contre son peuple, contre son voisin Le Liban ou les soldats français à Beyrouth, à une certaine époque. Sa dureté ne fait aucun doute. Mais Assad est aussi conseillé sur la meilleure stratégie à adopter, sur le terrain militaire comme dans la manœuvre médiatique qui l’accompagne. Ce n'est pas au moment du retour des inspecteurs de l'AIEA, autorisés à se rendre en Syrie, qu'il était le plus judicieux de lancer une telle opération chimique, aussi provocatrice. L’emploi de ces armes est de plus aléatoire. Les retombées médiatiques d’une telle action s’annonçaient plus désastreuses que les effets escomptés - rarement obtenus - sur les objectifs visés.
Hypothèse. Sans négliger la cruauté intrinsèque du régime Assad, on ne peut écarter la capacité de nuisance des plus extrémistes des insurgés, dont certains se sont emparé de stocks chimiques. Ils seraient capables de les activer et de les retourner de telles armes contre des civils, avec trois objectifs : provoquer une levée de bouclier internationale, déclencher une intervention d’urgence, faire vaciller le soutien de la Russie et de l’Iran à Assad.
Les spécialistes ont en mémoire des cas de manipulation de ce type. Deux exemples : le faux charnier de Timisoara (Roumanie, décembre 1989), cas d’école d’une intoxication réussie des médias occidentaux ; les bombardements suspects de civils bosniaques à Sarajevo (Bosnie), entre 1993 et 1995, qui entrainèrent une robuste intervention occidentale armée. En Syrie, comme hier en Roumanie ou en Bosnie, le plus grand discernement s’impose. Dans tous les cas, l’emploi d’armes chimiques reste un crime de guerre dont les commanditaires, quels qu’ils soient, devront un jour s’expliquer devant la justice internationale.

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