Rod, via Flickr CC License by.
«Le jeu d'échecs possède cette
remarquable propriété de ne pas fatiguer l'esprit et d'augmenter bien
plutôt sa souplesse et sa vivacité», écrivait Stefan Zweig dans Le Joueur d’échecs.
Il aura fallu attendre plusieurs dizaines d'années avant qu'une étude
ne prouve scientifiquement cette affirmation. Rapportée par le Pacific
Standard, elle tend à démontrer —on n'en sera pas surpris— que «les joueurs d’échecs font preuve d’une intelligence supérieure à la moyenne».
Psychologue à l'université de Göttingen, Roland Grabner
explique que plusieurs études utilisant des tests psychométriques
d'intelligence réalisés sur des joueurs experts et novices «démontrent qu'à la fois l'expertise et l'intelligence impactent les performances de tâches liées au domaine d'expertise». C'est
à dire que la réussite aux échecs serait dû à la fois à une pratique
assidue et à une intelligence innée. D'où la conclusion du chercheur,
qui estime que «le jeu d'échecs expert n'est pas isolé de l'intelligence».
Une telle étude peut paraître anodine mais elle vient mettre à mal
une théorie assez répandue aux États-Unis, celle de la règle des 10.000
heures. Popularisée en 2008 par le livre Outliers: The Story of Success de Malcolm Gladwell, elle avance que la réussite serait liée à la pratique répétée et non à des capacités innées. «Plus les psychologues regardent les carrières des gens talentueux, plus le talent semble jouer un rôle faible et plus la préparation semble jouer un rôle fort», écrivait encore très récemment Gladwell dans le New Yorker.Pour appuyer sa théorie, Gladwell cite l’exemple des soeurs Polgár. Entraînées par leur père, László Polgár, qui estime que «le génie est acquis, pas inné», les trois soeurs sont toutes devenues des grands maîtres internationaux des échecs. Le journaliste du New Yorker oublie toutefois de préciser que si elles ont toutes les trois connu la réussite, cela n’a pas été à la même échelle. Ainsi la benjamine, Judìt, est la plus connue puisque considérée comme la meilleure joueuse mondiale de l'histoire des échecs (elle a été la plus jeune grande maître).
Temple Grandnin, chercheuse mondialement connue atteinte d'autisme et auteur de The Autistic Brain, reproche d'ailleurs sur le site Wired au journaliste du New Yorker de résumer le succès à dix années de travail alors que ce serait plutôt pour elle le fruit «du talent et du travail».
Preuve de l'actualité de ce débat, le site Chess News a lui par ailleurs entamé la publication d'un article en deux parties démontrant mathématiquement que les champions du monde d'échecs ne sont pas plus chanceux que leurs adversaires, mais bel et bien plus talentueux.
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