dimanche 26 février 2012

L'esprit des steppes, transe chamanique en Mongolie


altaltaltaltaltalt

Corine Sombrun passe son enfance en Afrique à Ouagadougou (Burkina Faso). Sa mère est rédactrice et présentatrice des journaux d’information de la radio nationale; son père dirige l’installation du réseau téléphonique en brousse. De retour en France elle se consacre à des études de Musicologie, piano et composition. Lauréate de concours nationaux et internationaux, elle obtient une bourse de l’Office Franco Québécois pour la Jeunesse et part à Montréal, étudier auprès de performers multimédia et de compositeurs. Elle dirige ensuite une école de musique.

En 1999, après le décès de la personne dont elle partageait la vie, elle part s’installer à Londres où elle travaille comme pianiste et compositrice : Sacred Voice Festival of London (Création d’une pièce pour piano préparé et percussions iraniennes avec Bijan Chemirani) , Drome London Bridge theater («The Warp», pièce-performance de 24h mise en scène par Ken Campbell),
BBC World Service, Turner Price, October Gallery, 291 Gallery, Price Water House Cooper Atrium Gallery… Puis fait des reportages pour BBC World Service, dans le cadre d’un programme sur les religions.

En 2001, au cours d’un reportage en Mongolie (Mongolian Mysteries, diffusé sur BBC Wolrd Service en 2002), le chamane Balgir lui annonce qu’elle est chamane. Pourquoi? Dans cette région du monde, les chamanes accèdent à la transe grâce au son d’un tambour spécifique. Un son auquel, lors de cette première expérience, elle réagit violemment, jusqu’à perdre le contrôle de ses mouvements. Pour Balgir, elle a donc bien les capacités chamaniques et « sa voie » dit-il, sera de suivre leur enseignement pour les développer.
Elle va ainsi passer plusieurs mois par an à la frontière de la Sibérie, auprès de Enkhetuya, chamane de l’ethnie des Tsaatans, chargée de lui transmettre cette connaissance. Après huit années d’apprentissage - au cours desquelles elle sera un sujet d’étude pour les anthropologues L.Merli (Dct EHESS, Paris) puis J.Hangartner (Dct Université de Berne) - elle devient la première occidentale à accéder au statut de Udgan, terme mongol désignant les femmes ayant reçu le « don » puis la formation aux traditions chamaniques.

En 2002 elle publie chez Albin Michel le premier récit de ses aventures, Journal d’une apprentie chamane (Albin Michel 2002, Pocket 2004). Suivront, Une parisienne en Mongolie (Albin Michel 2004, Pocket 2006), Dix centimètres loi Carrez (Belfond 2004), Les tribulations d’une chamane à Paris (Albin Michel 2007, Pocket 2009), Sur les pas de Geronimo (Albin Michel 2008). Plus de 80 000 exemplaires de ses livres ont été vendus en France. Ils sont également traduits en Espagnol, Allemand, Italien, Russe, Hollandais...

En 2005 elle part au Nouveau Mexique rencontrer
Harlyn Geronimo, medicin-man et arrière petit-fils du célèbre guerrier Apache. Selon une légende Apache en effet, ce peuple serait originaire de Mongolie. Ensemble, ils vont donc échanger leurs connaissances respectives sur les traditions Apaches et Mongoles, dont certaines sont effectivement très ressemblantes, et remonter le temps dans un voyage-pèlerinage jusqu’aux sources de la Gila, le lieu de naissance de Geronimo. De ces mois de complicité va naître l’idée du livre Sur les pas de Geronimo, l’histoire de cette rencontre et l’unique récit de la vie de Geronimo, racontée par l’un de ses descendants directs.

En 2008 elle poursuit ses recherches sur la migration des peuples de Mongolie et se rend en Alaska, où elle entre en contact avec les Indiens Athabaskans, ancêtres des Apaches et descendants supposés des Mongols. Elle découvre un peuple engagé dans un travail remarquable pour la préservation de l’environnement, et dont certaines traditions ancestrales sembleraient effectivement pouvoir corroborer la théorie d’une relation de descendance avec le peuple mongol. La prudence restant néanmoins de mise dans un domaine où les preuves scientifiques sont difficiles à apporter, ces recherches feront l’objet de nombreux autres séjours.


Parallèlement à ses voyages d’étude, Corine Sombrun est compositrice pour différentes sociétés de production, donne des conférences et poursuit son travail sur les Etats Modifiés de Conscience.

Son expérience dans la pratique de la transe chamanique et sa capacité à l’auto-induire (la provoquer par la seule volonté) intéresse désormais les scientifiques. Définie comme psychonaute (terme dérivé du mot spationaute pour désigner les explorateurs des fonctions cérébrales) elle collabore depuis 2006 avec le Dr Etevenon, Directeur de recherche INSERM honoraire. Il l’a mise en relation avec différents chercheurs dont le but est de découvrir les mécanismes physiologiques liés à cet état de Transe (Etat de conscience volontairement modifié) et son influence sur le fonctionnement des hémisphères cérébraux. Les premiers résultats (obtenus en 2007 par analyses d’EEGs sous la direction du Pr. Flor-Henry / Alberta Hospital - Canada) ont montré que cette transe chamanique, dont les mécanismes d’action sur le cerveau restent inconnus, modifiait effectivement les circuits du fonctionnement cérébral.
En repoussant les limites des connaissances actuelles, ces résultats ont ouvert de nouvelles perspectives et sont à l’origine de la mise en place d’un premier protocole de recherche sur la transe chamanique étudiée par les neurosciences; Une tentative d’exploration des phénomènes liés aux capacités du cerveau humain et des fondements neuronaux de la Conscience.

Pianiste de talent initiée au chamanisme en Mongolie, Corine Sombrun nous guide sur les pas des nomades d'Asie centrale et des Indiens d'Amérique. Portrait.

La Mongolie, elle y était encore le mois dernier. "Mais pour une fois, c'était en vacances! Maintenant que l'initiation est terminée, je vais pouvoir davantage découvrir le pays", souffle Corine Sombrun, marraine de cette nouvelle édition de La 25e Heure du Livre. A 42 ans, cette femme énergique, friande de thés et de havanes, n'a pourtant rien d'une touriste en goguette. Voilà près de dix ans qu'elle se rend régulièrement dans ces steppes d'Asie centrale où elle a reçu l'enseignement des chamans mongols. Une expérience singulière et tout à fait inattendue pour cette Parisienne, pianiste de formation, au parcours étonnant.

Au départ, il y a une déception sentimentale. "La douleur m'a poussée à découvrir de nouveaux horizons. Je suis donc partie à Londres, où j'ai été embauchée par BBC World Service pour une série de reportages sur la religion." Après une première expérience au Pérou, où elle découvre les effets de l'ayahuasca, la jeune femme s'envole vers Oulan-Bator pour une étude des mystères mongols. "Pendant une cérémonie tsaatane, le son du tambour m'a fait un effet irrésistible. Le chaman m'a alors fait cette révélation: j'avais été choisie par les esprits et devais accomplir mon initiation pour devenir chamane à mon tour." Intriguée, la jeune femme va s'engager sur cette voie secrète et recevoir huit ans durant l'enseignement d'Enkhetuya, chamane devenue une proche amie. Elle tirera de cette expérience plusieurs livres (Journal d'une apprentie chamane, Les tribulations d'une chamane à Paris), évoquant ses années d'apprentissage, mais également le décalage culturel propre à une telle aventure. "Je suis aujourd'hui contactée par beaucoup de lecteurs qui me demandent de les aider. Mais je n'ai pas moi-même la preuve que les rituels chamaniques fonctionnent! Je ne connais que les effets de la transe, cet état particulier qui abolit le "je" et donne des forces supplémentaires. Je serais bien incapable sans cela de brandir un tambour de huit kilos à bout de bras pendant plusieurs heures! "

Pour mieux comprendre ses pouvoirs, cette "psychonaute" au sourire franc s'est lancée depuis deux ans dans un programme d'études sur la transe chamanique et les états modifiés de conscience, à l'hôpital d'Edmonton, au Canada. Une exploration scientifique complétée par plu- sieurs voyages d'études plus insolites, à la rencontre des Indiens Athabaskans en Alaska, ou des Apaches dans le sud-est des Etats-Unis. "La légende veut que ces peuples descendent de tribus mongoles qui auraient franchi le détroit de Béring. Et on trouve en effet des similitudes entre leurs rituels chamaniques." De ces séjours dans les plaines nord-américaines naîtra un livre rédigé avec Harlyn Geronimo, arrière-petit-fils du grand guerrier Apache. La transe serait-elle d'ailleurs propice à l'écriture? "Tous les auteurs vous diront qu'ils sont en transe lorsqu'ils écrivent", sourit notre chamane, moins mystique que psychologue. "On oublie le temps, l'espace, et on se fond dans l'écriture, comme on pourrait le faire avec la musique ou la marche. Au fond, je crois que nous avons tous la capacité de nous dépasser."


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.