Des travaux récemment parus dans la revue Science montrent que le champ magnétique terrestre, relativement stable entre 1590 et 1840, a amorcé une baisse sensible depuis le milieu du XIXe siècle. La conséquence la plus probable est que l’atmosphère terrestre a été plus sensible qu’auparavant aux variations du rayonnement solaire et du rayonnement cosmique. Ce qui n’est probablement pas sans conséquence sur le climat et le réchauffement récent, amorcé lui aussi au milieu du XIXe siècle.
Dans cette étude parue dans Science, David Gubbins et ses collègues ont analysé les variations du champ magnétique terrestre depuis 1590. Les mesures systématiques du géomagnétisme ont commencé en 1837, sous l'impulsion du mathématicien C.F. Gauss. Plus de 200 centres répartis à travers le monde surveillent aujourd’hui ce champ magnétique, dont les variations semblent dues aux mouvements de dynamo du noyau interne et du noyau externe de la Terre. Les mesures récentes sont précises, avec une marge d’incertitude de l’ordre de 0,1%. Il n’en va pas de même pour les mesures plus anciennes, notamment pour les données archéomagnétiques (environ 10% de marge d’erreur).
Pour affiner les estimations anciennes, l’équipe de David Gubbins a collecté un maximum de données de navigation depuis la fin du XVIe siècle. Entre 1510 et 1930, on dispose ainsi de 150.000 notes sur la déclinaison et 19.000 sur l’inclinaison du champ magnétique. L’avantage de ces consignations de marins est qu’elles sont en général datées avec précision. Pour interpréter ces données anciennes, Gubbins et al. proposent aussi une nouvelle méthode (inversion stochastique couplée à l’analyse statistique standard) dont l’effet est de minimiser les marges d’erreur dans la reconstruction.
Le résultat des chercheurs est intéressant. Après une période relative stabilité entre 1590 et 1840 (déclin du dipôle terrestre de 2,28nT / an, ±2,72), le champ magnétique semble avoir baissé beaucoup plus rapidement, d'environ 5% par siècle (rythme accéléré de 15 nT / an, soit six à sept fois plus que les deux siècles précédents). La figure ci-dessous illustre la tendance (en grisé une déviation standard de marge d'erreur dans la reconstruction, en pointillé la tendance attendue si le rythme actuel était constant depuis 1590). Depuis 2500 ans, ce champ magnétique terrestre est en phase de baisse (40% sur toute la période), avec semble-t-il un rythme comparable d’alternance de périodes de pause et de chutes plus importantes.
En quoi ces travaux peuvent-ils intéresser la science climatique ? Il se trouve que le champ magnétique terrestre produit autour de notre planète une enveloppe protectrice (la magnétosphère) dont le principal effet connu est de détourner les flux du rayonnement solaire et du rayonnement cosmique. La perte d’intensité de ce champ magnétique, qui correspond avec le début du réchauffement récent, signifie donc que notre atmosphère a été globalement plus sensible aux rayonnements venus de l’espace qu’elle ne l’était dans les siècles précédents. Comme l’irradiance solaire se trouve dans le même temps en phase de hausse, l’effet sur le climat n’est probablement pas nul, quoique difficile à qualifier et quantifier avec précision en l’état de nos connaissances. Il est également probable que la baisse du champ magnétique a eu des effets sur les échanges entre l’ionosphère et la stratosphère, dont la physique reste cependant encore incertaine aujourd’hui.
Référence
Gubbins D. et al. (2006), Fall in Earth's magnetic field is erratic, Science, 312, 900-902.
Dans cette étude parue dans Science, David Gubbins et ses collègues ont analysé les variations du champ magnétique terrestre depuis 1590. Les mesures systématiques du géomagnétisme ont commencé en 1837, sous l'impulsion du mathématicien C.F. Gauss. Plus de 200 centres répartis à travers le monde surveillent aujourd’hui ce champ magnétique, dont les variations semblent dues aux mouvements de dynamo du noyau interne et du noyau externe de la Terre. Les mesures récentes sont précises, avec une marge d’incertitude de l’ordre de 0,1%. Il n’en va pas de même pour les mesures plus anciennes, notamment pour les données archéomagnétiques (environ 10% de marge d’erreur).
Pour affiner les estimations anciennes, l’équipe de David Gubbins a collecté un maximum de données de navigation depuis la fin du XVIe siècle. Entre 1510 et 1930, on dispose ainsi de 150.000 notes sur la déclinaison et 19.000 sur l’inclinaison du champ magnétique. L’avantage de ces consignations de marins est qu’elles sont en général datées avec précision. Pour interpréter ces données anciennes, Gubbins et al. proposent aussi une nouvelle méthode (inversion stochastique couplée à l’analyse statistique standard) dont l’effet est de minimiser les marges d’erreur dans la reconstruction.
Le résultat des chercheurs est intéressant. Après une période relative stabilité entre 1590 et 1840 (déclin du dipôle terrestre de 2,28nT / an, ±2,72), le champ magnétique semble avoir baissé beaucoup plus rapidement, d'environ 5% par siècle (rythme accéléré de 15 nT / an, soit six à sept fois plus que les deux siècles précédents). La figure ci-dessous illustre la tendance (en grisé une déviation standard de marge d'erreur dans la reconstruction, en pointillé la tendance attendue si le rythme actuel était constant depuis 1590). Depuis 2500 ans, ce champ magnétique terrestre est en phase de baisse (40% sur toute la période), avec semble-t-il un rythme comparable d’alternance de périodes de pause et de chutes plus importantes.
En quoi ces travaux peuvent-ils intéresser la science climatique ? Il se trouve que le champ magnétique terrestre produit autour de notre planète une enveloppe protectrice (la magnétosphère) dont le principal effet connu est de détourner les flux du rayonnement solaire et du rayonnement cosmique. La perte d’intensité de ce champ magnétique, qui correspond avec le début du réchauffement récent, signifie donc que notre atmosphère a été globalement plus sensible aux rayonnements venus de l’espace qu’elle ne l’était dans les siècles précédents. Comme l’irradiance solaire se trouve dans le même temps en phase de hausse, l’effet sur le climat n’est probablement pas nul, quoique difficile à qualifier et quantifier avec précision en l’état de nos connaissances. Il est également probable que la baisse du champ magnétique a eu des effets sur les échanges entre l’ionosphère et la stratosphère, dont la physique reste cependant encore incertaine aujourd’hui.
Référence
Gubbins D. et al. (2006), Fall in Earth's magnetic field is erratic, Science, 312, 900-902.
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