PARIS (Reuters) - Le rapport de la Cour des comptes publié mardi en France brise le dogme du "nucléaire pas cher" et balaie les vertus supposées de l'atome, estiment des écologistes, centristes et membres de la gauche radicale.
L'étude souligne que prolonger la durée de vie des centrales nucléaires au-delà de 40 ans semble inévitable sauf à accepter des investissements difficilement réalisables ou une baisse de la consommation d'électricité.
Dans l'hypothèse d'une durée de vie de 40 ans et d'un maintien de la production à son niveau actuel, il faudrait "un effort très considérable d'investissement équivalent à la construction de 11 (réacteurs de type) EPR d'ici la fin de 2022", écrit la Cour.
En tenant compte des dépenses de recherche, publiques et privées, qui représentent 55 milliards d'euros, le montant total des investissements passés ressort à 188 milliards d'euros, auxquels il faut ajouter les futures dépenses de démantèlement des 58 réacteurs du parc actuel, estimées à 18,4 milliards.
Dans un communiqué, le ministre de l'Industrie, Eric Besson, assure qu'au vu de ce rapport, le coût de l'électricité d'origine nucléaire "reste nettement inférieur à celui des autres sources de production dans toutes les hypothèses et quelle que soit la méthode de calcul."
Selon lui, la première conclusion de ce rapport "est que le mythe du coût caché du nucléaire s'effondre." "La deuxième c'est qu'il y a certes des incertitudes sur les coûts du démantèlement et des déchets, que nous nous efforçons d'ailleurs de réduire, mais surtout que ces incertitudes ne font évoluer que marginalement le coût du nucléaire", ajoute-t-il.
Mais pour l'Observatoire du nucléaire, un organisme indépendant, l'étude de la Cour des comptes marque "la fin de 50 ans de mensonges" des promoteurs de l'atome "qui n'ont cessé de prétendre que l'électricité d'origine nucléaire était de loin la moins chère."
"Ce rapport fera date car il confirme le coût faramineux du nucléaire futur", souligne l'adjoint au maire écologiste de Paris, Denis Baupin, sur son blog.
"Qu'on choisisse de prolonger la durée de vie des réacteurs existants (en les sécurisant et en tentant de les faire tenir dix ou vingt ans de plus), ou que l'on choisisse de construire des réacteurs de nouvelle génération EPR pour les remplacer, le coût du kWh produit sera près de deux fois plus élevé que le prix artificiel actuel", ajoute-t-il.
INCERTITUDES SUR LE CHIFFRAGE FUTUR
Greenpeace estime pour sa part que le "verdict" de la Cour des comptes "est sans appel pour l'EPR", puisque le mégawattheure produit par Flamanville "coûtera entre 70 et 90 euros, soit aussi cher que l'éolien terrestre."
"De quoi sérieusement compromettre l'avenir de ce type de réacteurs", dit l'organisation dans un communiqué.
Jean-Luc Bennahmias, vice-président du MoDem de François Bayrou et écologiste, estime lui aussi que le rapport de la Cour des comptes "vient ouvrir une nouvelle brèche dans l'argumentaire du gouvernement et des opérateurs."
"Le nucléaire coûte cher - les investissements déjà réalisés sont de l'ordre de 228 milliards d'euros - et cela ne risque pas de s'arranger", écrit-il.
Il souligne que la Cour des comptes "fait état des incertitudes qui règnent quant au chiffrage des investissements et opérations futures."
"Combien coûte le démantèlement ? A combien s'élève la gestion des déchets radioactifs ? Ou encore, à combien reviendra la prolongation de la durée de vie des centrales ?", demande-t-il.
Pour le Parti de gauche, tous ces éléments sont "autant d'arguments à prendre en compte pour le grand débat citoyen" que le Front de Gauche et son candidat à la présidentielle, Jean Luc Mélenchon, appellent instamment sur la politique énergétique de la France.
Gérard Bon, édité par Gilles Trequesser
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