mercredi 21 mars 2012

To Loose

On y est ; ce matin, au réveil, on se retrouve dans un quartier de Toulouse a priori tranquille, cerné depuis ce matin par une meute de policiers. Et sur le téléviseur, un homme fort disert, que l'on sent bien rongé par une satisfaction intérieure. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, qui nous annonce beaucoup de choses sur ce qui est en cours là-bas. Le fait que le "Breivik français" a été cerné dans la nuit, et que c'est tout autre chose que ce que j'ai pu annoncer ici. A savoir un "salafiste", "algérien" d'origine, annonce-t-il, avec une certaine satisfaction, visible sur un visage qui se voudrait impassible. Un Claude Guéant bien prolixe au point d'indiquer beaucoup trop de détails qui à l'analyse risquent fort de se retourner contre lui. Car ce que nous dit ce matin l'homme de l'art, c'est que ça fait longtemps que ses services suivaient ces exploits. D'où un doute énorme qui émerge aussitôt sur la manipulation du personnage, dont le potentiel de dangerosité était connu de toute la police française depuis au moins un an. L'étranger en avait même averti la France, nous assène sans sourciller un ministre décidément bien en langue matinale...

Claude Guéant ce matin, au micro de BFM, dont on peut ici saluer les équipes pour leur étonnnante réactivité, donne beaucoup (trop) d'indications sur l'opération qui est encore en cours, indique en effet d'emblée que l'homme avait été logé par son adresse mail dès le premier meurtre, grâce à l'IP avec laquelle il avait posté ses réponses à la petite annonce pour la vente de moto du militaire toulousain. Selon Claude Guéant, toujours, c'est de chez sa mère qu'il aurait contacté le militaire vendeur de moto. L'ordinateur dont il s'est servi a été retrouvé depuis chez le frère de l'individu, qui serait lui aussi d'une tendance salafiste radicale. Dés le premier meurtre, on savait donc qui il était, et où il habitait. Etonnant premier aveu ministériel. Mais visiblement on n'est donc pas intervenu : pourquoi, voilà bien tout le problème, où le début du mystère Guéant. Le même Claude Guéant, toujours, affirmant peu après qu'il savait beaucoup de choses sur l'individu. Sans avoir pour autant décidé d'intervenir après déjà quatre meurtres... Et en attendant d'en avoir quatre de plus, davantage représentatifs dans l'opinion pourrait-on dire, selon le dessein souhaité (la fabrication d'un dégoût et d'un rejet très fort). Rappelons que le premier meutre de Toulouse, qui avait mis la puce à l'oreille à beaucoup d'observateurs, par sa méthodologie particulière (une balle en pleine tête au travers du casque d'un motard qui était aussi le maréchal des logis-chef Imad Ibn-Ziaten) remonte au 11 mars, soit il y a aujourd'hui 10 jours exactement. Ce jour-là, avec l'adresse IP obtenue du site du "Bon Coin", les policiers français savaient déjà qui était le meurtrier, et où il habitait. Une telle recherche ne prend pas trois jours, loin de là Surtout quand on connaît le degré d'équipement de la police française, équipée du matériel retrouvé, je vous le rappelle, en Libye. Un internaute bien au fait de la chose le précise en effet : "soulignons aussi que les enquêteurs ont pu utiliser le décret relatif à la conservation des données, paru au JO en mars 2011. Celui-ci précise que les hébergeurs, comme Leboncoin.fr par exemple, doivent conserver une foule d’informations afin de simplifier les enquêtes judiciaires : identifiant, protocoles de connexion, adresses IP, dates et heures des opérations, etc. Ce décret était attendu depuis 2004, date de la promulgation de la LCEN, la loi sur la confiance dans l'économie numérique". Là, ils pouvaient même le faire légalement...

Mieux encore, ou plutôt pire. Mohmmed Merah, à défaut d'être connu en France par les services de Claude Guéant, était déjà connu ailleurs. Au Pakistan. Qui avait transmis courant 2011 une fiche précise et inquiétante sur ces activités dans le pays. Là où visiblement on lui avait appris à se servir d'un 11,43 et d'une Uzi, ce qui me l'avait fait confondre avec un militaire entraîné. "Le suspect a séjourné deux fois au Pakistan, en 2010 et en 2011. Il a été arrêté à Kandahar, dans le sud de l'Afghanistan, sans doute lors de son second séjour en 2011. Les autorités afghanes ont prévenu la police française, qui a inséré son nom à partir de cette date dans les fichiers des renseignements généraux," précise même le Figaro. Les autorités françaises étaient donc au courant depuis l'année dernière qu'un individu extrêmement dangereux et entraîné aux armes de guerre habitait en France, à Toulouse. Elles avaient son nom, Mohammed Merah, et l'adresse de son habitation. On imagine difficilement qu'il n'ait pas été surveillé, comme le précise ce matin sur BFM, Rachid M'Barki, le présentateur, qui, visiblement à d'excellents contacts avec la police (à un moment, ce matin il fera comprendre à son collègue qu'il possède des infos émanant d'une source spéciale), un M'Barki affirmant sans hésiter que la DCRI le surveillait depuis longtemps déjà. Une DCRI ou un certain Squale, le fameux Bernard Squarcini mouillé jusqu'au coup dans l'imbroglio Pakistanais du versement de commission occulte et d'une enquête elle aussi pipée) si proche du pouvoir (c'est un intime de Sarkozy) fait le jour et surtout la nuit. On imagine mal ce même Squarcini ne pas s'être mêlé du cas Merah. Et de ne pas en avoir fait part à celui qui aujourd'hui se retrouve fort disert devant les caméras de télévision. Incroyable ministre de l'intérieur, qui affirme calmement que ça faisait longtemps qu'il connaissait a dangerosité de l'individu, en rappelant ses exploits au Pakistan. L'homme était manifestement fiché, ce que confirme encore BFM, qui indique même que le suspect était connu pour avoir manipulé des armes au Pakistan : là où il est devenu aussi adroit qu'un militaire, pourrait-on dire.

"Selon le Point, la sous-direction antiterroriste de la PJ a fouillé parmi une liste d'une centaine de personnes proches de la mouvance islamiste qui s'étaient rendues en Afghanistan et au Pakistan. Une dizaine était localisée dans la région toulousaine. Selon une source proche de l'enquête, l'homme pourrait avoir été arrêté en Afghanistan pour des "faits de droit commun", sans que l'on puisse en savoir plus. "Le suspect était sous surveillance de la DCRI", a indiqué ce mercredi Claude Guéant" précise déjà l'Express. Des voies de fait à l'étranger, dans un dossier transmis à la France avec un tampon "individu dangereux à surveiller"... et que l'on aurait laissé aller à sa guise sans exercer dessus de surveillance particulière ? Impossible à croire, à moins d'avoir une police en dessous de tout. Ou d'en avoir une avec quelqu'un au dessus... qui avait décidé de laisser vaquer à ses occupations bientôt meutrières.

L'autre point étant plus récent, celui de la demande de repeindre le scooter dans une concession Yamaha de la région, peut-être bien celle qui avait été intelligemment interviewé par des journalistes avant hier, et qui annonçait que ces vérifications étaient "normales". Celui-là était déjà au courant de beaucoup de choses, très certainement. L'homme aurait en plus demandé de retirer le tracker GPS de son scooter... "une puce permettant de géolocaliser l'engin en cas de vol, a indiqué une de ces sources. Le dernier modèle de scooter TMax est en effet équipé en série de ce système de localisation" précise encore l'Express. Un scooter volé, donc, dont on pouvait savoir où il se déplaçait ! Un scooter lui aussi utlilisé dès le premier assassinat : difficile d'imaginer que la police n'est pas songé à vérifier le déplacement de ce véhicule. Au premier décès de cette histoire on avait donc le nom, l'adresse de l'auteur et mêle les déplacements de sa machine... avouez que l'on peut, au moins pour les 6 victimes suivantes, une faillite complète de l'action de la police. Ou un attentisme décidé en haut lieu, ce qui revient au même à vrai dire. Pourquoi avoir autant attendu, pourquoi avoir attendu que l'individu s'en prenne à une école juive, qui aurait pu ainis être épargnée, voilà bien le problème ce matin, à entendre pérorer un ministe de l'intérieur bien au courant de tout... depuis le 11 mars dernier.

Pour appuyer l'impression de manipulation, au même moment au sortir de l'Elysée avec un conseil des ministres avancé exprès (pour des raisons autre que l'événement en cours paraît-il, celle comme quoi Nicolas Sarkozy voulait recevoir des membres représentatifs du culte) c'est Luc Chatel, on le sait membre du cercle présidentiel restreint, qui s'avance et non un autre pour affirmer que la police à été remerciée lors de ce conseil des ministres "pour avoir agi aussi vite". Alors qu'au même moment on apprenait qu'elle aurait mis plus d'un an à s'en occuper de près, du personnage ! Il y a bien une instrumentalisation des événements qui a été décidée, il y a bien tentative d'emballer un paquet d'information ne marchant que dans un seul sens. Un sens connu : un sens "bushien".

Une impression dont les traces sont apparues hier soir, avec ce très étrange entretien d'un autre personnage qui n'a pas su tenir sa langue et failli même faire tout capoter. Hier, à 18H42, un Claude Guéant beaucoup moins disert annonçait encore qu'il possédait bien des informations : « Beaucoup d'informations arrivent aux services », a indiqué le ministre de l'Intérieur à sa sortie du commissariat central de Toulouse où sont regroupés les enquêteurs. Claude Guéant a précisé que « toutes nécessitent un approfondissement » et que « certaines pistes sont plus crédibles que d'autres », selon notre journaliste sur place. « L'enquête avance », a indiqué le ministre, sans souhaiter donner plus de précisions." Quelque temps aurparavant, les enquêteurs avaient annoncé que la piste d'extrême droite que j'avais évoquée n'était plus au premier rang des recherches. Exit l'extrême droite, cela voulait déjà dire la piste islamiste, la seconde depuis le début. Mais c'est un autre individu qui allait intriguer : "un rabbin de Neuilly", comme l'avait appelé Le Nouvel Obs. "L'enquête avance à grands pas", a déclaré mardi à Toulouse le rabbin David Zaoui, directeur du Beth Loubavitch de Neuilly-sur-Seine, en précisant qu'il connaissait "intimement" le président Nicolas Sarkozy et qu'il l'avait eu au téléphone récemment. "L'enquête avance de manière très certaine et très rapide", a affirmé le rabbin Zaoui, au lendemain de la fusillade qui a fait quatre morts dont trois enfants dans un collège juif de Toulouse. "Je ne peux pas vous en dire plus mais on a des affirmations que l'enquête avance à grands pas", a-t-il assuré." Celui-là ; c'est sûr, on lui avait avoué quelque chose en très haut lieu. L'information étant datée de 15H50, on peut supposer que le fameux rabbin Zaoui ait été averti vers l'heure du déjeûner de la progression de l'enquête. Par qui, cela reste à déterminer : or c'est quelqu'un qui connait particulièrement bien Nicolas Sarkozy, comme le prouve de nombreuses photos de rencontres, bien avant qu'il ne devienne président. Hier, vers midi, quelqu'un savait déjà que l'histoire aurait une fin proche.

L'équipe au pouvoir vient donc manifestement de nous rejouer un épisode sur lequel je vais revenir, celui de la Gare du Nord en 2007, qui avait précédé l'annonce de l'entrée en lice de Nicolas Sarkozy dans la candidature présidentielle. Là aussi, on pouvait parler de manipulation, ce que je vais vous démontrer bientôt, à l'époque où Sarkozy n'était que ministre de l'intérieur. Il sera très intéressant dans les jours à venir de vérifier comment le salafisme de Mohammed Merah a été alimenté. L'idée d'aller les chercher du côté des sites connus, type SITE Group ou Intel Center est à travailler. Pendant longtemps, on l'a vu, la veuve de celui qui avait tué Massoud avait alimenté un blog où venaient s'inscrire les djihadistes qui se faisaient tous après pincer à leur retour du Pakistan. Un système bien rôdé. Depuis, elle est en prison pour 8 ans en Belgique, après avoir connu une impunité totale en Suisse, avant de revenir à Bruxelles. Aujourd'hui, un autre ministre de l'intérieur nous annonce avec un aplomb incroyable qu'il a fini par retrouver après plein d'efforts de sa police un individu qu'un autre état lui avait recommandé de surveiller pour sa dangerosité. Il en connaissait le nom et en avait l'adresse depuis plus d'une année. Je laisserai maintenant à Claude Guéant et à Nicolas Sarkozy le temps de formuler des excuses ou leur repentir pour leur inaction coupable ayant mené à l'assassinat de juifs dans le pays. La même chose pour les militaires tués eux aussi de sang froid. lls possédaient toutes les clés pour empêcher ces tueries. Et ne les ont manifestement pas utilisées.

Le même Nicolas Sarkozy qui vient paraît-il de "féliciter les services de police pour la rapidité de l'enquête", mercredi lors d'une déclaration après sa rencontre avec les représentants des communautés juive et musulmane, tandis que le suspect était toujours cerné dans un quartier résidentiel de Toulouse'" apprenait-on. Ou l'art d'être cynique, ajouterais-je. Du grand art, que ce duo Guéant-Sarkozy, du grand art... dans la manipulation, à ressortir des limbes Al-Qaida, cité à plusieurs reprises ce matin par Claude Guéant, un mouvement que tout le monde a annoncé moribond : cela faisait au moins une année qu'ils connaissaient tous deux les penchants terroristes de l'individu qui vient de leur offrir sur un plateau la grande peur dont s'est servi G.W.Bush pour se faire réélire en 2008. Ce dernier avait alors exhumé une vidéo grotesque d'un Ben Laden la barbe teinte, en espérant se faire élire sur le thème de la peur entretenue. La bande vidéo mentionnait le président français, laissant entendre qu'elle a été réalisée après son élection en mai 2007. Le son, en réalité, était en décalage complet avec les mouvements des lèvres avaient noté les observateurs.

"La campagne américaine 2004 fut d’une dureté incroyable, reposant sur des bases extrêmement populistes et qui s’appuya sur les attaques de 2001 pour faire oublier un très mauvais bilan économique et social. De plus, Georges W Bush et son équipe travaillèrent à totalement déconstruire l’adversaire démocrate John Kerry, en le présentant comme un homme lâche, un menteur et un faible. La campagne Sarkozy version 2012 est identique en tous ces points. Même le conseiller Karl Rove peut être vu comme un Patrick Buisson à l’américaine" avaient finement noté des journalistes. Aujourd'hui, on a devant nous un coupé-collé de la deuxième campagne de G.W.Bush. "Comme le président français, l’américain était en 2004 dans une mauvaise posture et battait des records d’impopularité. Cependant, avec l’aide de son conseiller spécial Karl Rove, il a déplacé la campagne sur des enjeux sociétaux et nationaux, en affirmant sa nette opposition au mariage gay et à l’avortement, mais aussi en se posant comme le seul homme capable de défendre les Etats-Unis face à la menace terroriste. Un virage à droite toute qui rappelle singulièrement celui que Nicolas Sarkozy est en train d’effectuer".
Il ne manquait que le volet terroriste avant hier encore. Ce qu'il manquait encore à Sarkozy, Guéant l'a fait, pour paraphraser une publicité célèbre. Aujourd'hui, on assiste à un coupé-collé de cette campagne au ras des pâquerettes menée outre-Atlantique. Souhaitons que les français fassent de même que ce qu'ont pu faire les américains en choisissant un autre personnage que ce G.W.Bush bis, prêt à toutes les manipulations de l'opinion pour réussir ses noirs desseins...
Je ne pensais même pas hier encore qu'ils oseraient. Ils ont osé.

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