vendredi 22 juin 2012
Burn out: "Impossible de sortir de chez moi pour aller travailler..."
P. (50 ans) témoigne des longs mois passés à soigner cette maladie loin d'un travail qu'il refait aujourd'hui malgré le feux rouge dépassé... Il nous parle de cette expérience.
Quelle était votre activité lorsque votre burn out s'est déclaré?
"Je travaille dans le secteur associatif. Je suis un travailleur social de première ligne depuis plus de 25 ans. Cela signifie que je gère et que je m'occupe des gens afin de les orienter au mieux vers des formations adéquates en fonction de leur niveau. La masse de personnes et de dossiers traités du mois août au mois de septembre est tout simplement énorme."
Quel est le profil de vos "clients"?
"Il s'agit de personnes qui éprouvent d'énormes difficultés à s'insérer dans la marché de l'emploi. On parle de paupérisation, d'analphabétisme... Je suis donc sans cesse en contact avec la misère humaine et des personnes en grande demande."
Quels furent les premiers voyants oranges?
"Cela faisait plusieurs années que je voulais prendre un peu de recul par rapport au type de population dont j'avais l'habitude de m'occuper. La situation s'est empirée... Et puis un jour chaque arrivée au travail concordait désormais avec des nausées, des maux de tête, des douleurs au dos... Je devenais irritable et totalement insupportable. Ajoutez au tableau des relations tendues avec ma hiérarchie et une absence totale de reconnaissance de mon travail et de la situation difficile que je vivais. Un jour, il ne m'a tout simplement plus été possible de me présenter au travail. Et je n'avais plus aucune envie, aucune joie dans ma vie privée également..."
Vous avez alors décidé de démissionner?
"Non. Juste avant de partir, j'ai rencontré le directeur des ressources humaines en lui expliquant ma situation et mon besoin de prendre une semaine de repos. Cette semaine s'est transformée en trois semaines et puis en plusieurs mois d'indisponibilité en accord avec mon médecin. Durant cette période, j'en ai profité pour entreprendre une thérapie à la clinique du stress de l'hôpital Brugmann."
De quoi s'agit-il concrètement?
"Brugmann possède un service spécial dédié au burn out. On m'a fait passer des tests psychologiques et physiologiques pour déterminer s'il s'agissait bien d'un burn out professionnel et non d'une "simple" dépression. Cela m'a permis de mettre un nom clair sur ce que j'éprouvais. Dès lors, j'ai suivi un module s'étalant sur quatre mois et composé d'une hospitalisation d'un jour par semaine. Grâce à son excellent travail, l'équipe thérapeutique m'a totalement remise sur pied."
Comment ont réagi vos collègues?
"J'ai toujours été en contact avec eux pendant mon absence. Ils ont été compréhensifs et bien conscients du boulot que j'abattais à leur côté avant ma chute."
Votre employeur a-t-il tiré les conclusions de cette situation de burn out au sein de son effectif?
"Une semaine après mon départ, de nouvelles procédures de suivi et de supervision étaient mises en place pour prévenir ce genre de situation... Trop tard pour moi malheureusement!"
Quelle est votre situation actuelle? Vous êtes de retour chez votre employeur?
"Je dois avouer que la tentation de définitivement quitter cette société et même le milieu social en général fut grande... Mais, je suis resté réaliste: à 50 ans et avec principalement mon type d'expérience, on ne m'attend pas forcément ailleurs. Comme j'avais gardé de bons contacts avec les ressources humaines, nous sommes arrivés à la situation suivante: j'effectue encore mon ancienne mission en part time et j'ai une nouvelle affectation pour l'autre mi-temps."
Comment cela se passe-t-il?
"La situation est globalement bonne. J'arrive à mieux gérer le stress et à plus penser à mon bien-être. Le travail réalisé au coeur de la cellule burn out de Brugmann m'a beaucoup apporté."
Un cliché assez répandu, c'est le côté "le burn out est une maladie à la mode". Votre avis?
"C'est vrai que l'on entend souvent ce raccourci. Mes proches et mes collègues peuvent parler de mon expérience. Il l'ont vécu à mes côtés... En ce qui me concerne, j'ai été profondément soulagé de pouvoir mettre un nom sur ce qui m'arrivait..."
Le burn out est donc loin de ne toucher que certaines catégories de travailleurs: commerciaux, cadres, managers...
"C'est simple, dans mon groupe thérapeutique de nombreux secteurs et fonctions étaient touchées: directeur des ressources humaines, employés de banque, employé du secteur de la santé, manager..."
Vos conseils aux autres pour en sortir rapidement?
"Parlez-en, faites-vous accompagner et si nécessaire passez par la case clinique sans aucune hésitation. Evitez en tout cas de mettre trop de barrières autour de vous en vue de repousser ce problème à plus tard. Il ne fera que revenir et plus fort..."
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