Alam Bibi :
14 ans à gauche, 33 ans à droiteSes yeux verts disent la douleur d'un peuple martyrisé par des années de guerres, de privations et d'obscurantisme
Prise en 1983 par Steve McCurry dans un camp de réfugiés afghans proche de Peshawar, au Pakistan, la photo de gauche fit la "une" de la revue National Geographic – qui l'a élue parmi ses photos du siècle – , puis le tour du monde. A droite, la même personne retrouvée en mars 2002
Pour les courants intellectuels et politiques progressistes, héritiers de la philosophie des Lumières, l’obscurantisme est une attitude d'opposition à la diffusion du savoir, dans quelque domaine que ce soit.
Définition
Le terme est exclusivement péjoratif. Un obscurantiste est une personne qui prône et défend une attitude de négation du savoir (refuser de reconnaître pour vraies des choses démontrées), de restriction dans la diffusion d'une connaissance (sans nier la véracité d'une chose, considérer qu'elle ne peut être diffusée pour des raisons de toutes sortes : intérêt personnel, craintes sociales, etc.), ou de propagation de théories dont la fausseté est avérée.
Ainsi, l'astrologie est aujourd'hui considérée comme obscurantiste car elle repose sur des interprétations qui sont incompatibles avec les observations scientifiques1, mais ça n'était pas le cas il y a quelques siècles, les connaissances scientifiques et notamment astronomiques étant alors insuffisantes pour invalider les interprétations astrologiques (les deux disciplines étaient alors confondues)2. Pour certains athées, les religions sont des croyances obscurantistes.
L'obscurantisme est souvent évoqué à propos du Moyen Âge avec l'Inquisition et les autodafés, ainsi que pour l'époque des Grandes découvertes et des Lumières pour désigner les anciennes idées politiques et religieuses.
Les Lumières et l'obscurantisme
Lorsque, à la fin du XVIe siècle, s'est posée la question du passage d'une représentation du monde géocentrique à une représentation héliocentrique, les scientifiques de l'époque, qui dépendaient tous d'établissements qui n'étaient pas séparés de l'Église catholique romaine, étaient partagés entre ces deux hypothèses tant que l'on n'avait pas obtenu la preuve optique de la trajectoire orbitale de la Terre autour du Soleil.
Les erreurs commises par certains théologiens du XVIIe siècle3 ont provoqué une critique de la part de certains philosophes. Par exemple, Descartes s'est lancé dans son projet philosophique après avoir reçu, en 1634, le dialogue sur les deux grands systèmes du monde, qui avait valu à Galilée sa condamnation en 1633 (commuée en assignation à résidence par Urbain VIII). Dans le Discours de la méthode, il parlait, au sujet de la scolastique et d'une façon péjorative, d'une « philosophie spéculative qu'on enseigne dans les écoles »4.
L'opposition de certaines autorités de l'Église catholique romaine aux XVIIe et XVIIIe siècles aux nouvelles idées scientifiques (caractérisée ponctuellement par l'Index) a engendré un sentiment de rejet de l'Église chez une partie de la bourgeoisie naissante, d'autant plus que l'extension des procédés de l'imprimerie et de la presse permettait de se rendre compte des découvertes des sciences fondamentales (gravitation), et de diffuser ce savoir pour obtenir des applications pratiques dans le domaine technique.
La lutte contre l'« obscurantisme » fut ainsi le principal cheval de bataille des penseurs que l'on associe à la période des Lumières, correspondant sensiblement au XVIIIe siècle. C'est dans cet esprit que Voltaire écrivit De l'horrible danger de la lecture (1765).
C'est en effet l'idée centrale des Lumières que le progrès général dans le comportement humain, y compris dans le domaine politique, est conditionné par une diffusion la plus large possible de toutes les connaissances. Et qu'il y a une coalition de facto entre d'une part l'ignorance et la servitude, et d'autre part entre la connaissance et la liberté.
Tout le projet encyclopédique de d'Alembert et de Diderot incarne cette idée, illustrée par le célèbre opéra de Wolfgang Amadeus Mozart : la flûte enchantée.
Le discours obscurantiste
À en croire le discours obscurantiste tel que l'ont présenté les philosophes des Lumières :
- tout propos sortant des normes est trompeur : il attente donc à la vérité, il est hérésie, blasphème et, une fois ce crime matérialisé, il mérite sanction (bûcher, anathème, etc.)
- tout discours intellectuel cherchant à imposer son point de vue sans discussion.
- le véritable savoir ne s'acquiert vraiment que par la réflexion, l'ouverture aux idées et à la diversité du savoir.
- les pratiques religieuses qui nient tout progrès et tout nouveau savoir, qui s'opposent à la science et à la diffusion des idées nouvelles et progressistes.
Méthodes
L'obscurantisme emploie les méthodes suivantes :
- l'alliance avec le pouvoir ce qui permet la censure, la violence ;
- le discrédit de l'intelligence, de l'étude et de l'érudition non par la critique rationnelle mais par la critique essentialiste ;
- l'argument d'autorité élaboré par ses clercs organiques, selon un savoir canonique[réf. nécessaire].
Pour Pierre Bourdieu, notre société n'est pas à l'abri du phénomène : « L'obscurantisme est revenu mais cette fois, nous avons affaire à des gens qui se recommandent de la raison. Face à cela, on ne peut pas se taire. » 5
Notes et références
- controverse autour de la thèse de sociologie délivrée à Élisabeth Teissier. Voir à ce sujet la
- Enquête sur l'astrologie [archive] », L'Express, 22 mai 1997 Frédéric Lenoir, «
- Galilée. voir l'article
- sixième partie du Discours de la méthode Voir la
- Propos recueillis par Isabelle Rüf, pour l'émission de Lison Méric « Fin de siècle » du 31/01/1999. Reproduit in Le Temps, 25/01/2002
Voir aussi
Articles connexes
- Révolution copernicienne
- Censure
- Crise moderniste, Index
- Pierre Bourdieu, Antonio Gramsci
- Misonéisme
- Secte
- Religion
- Fanatisme
- Historique des critiques des théories de l'évolution, Créationnisme, Dessein intelligent
Liens externes
- 1984 George Orwell (anglais, cherchable en ligne...)
- Discours de la servitude volontaire Étienne de La Boétie.
- Bibliothecae Selectae sur le désir de posséder des livres interdits par des hommes de science et philosophes du XVe au XIXe siècle.
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