La question cruciale de la théorie de la double causalité
L'idée
que ce qui se réalise dans notre futur individuel dépend en bonne
partie de notre état d'esprit est largement admise dans le schéma
conceptuel exclusif où l'on explique que nos pensées déterminent
nos comportements, qui à leur tour conditionnent nos réactions
en face des opportunités qui se présentent devant nous. Une personne
optimiste verra ainsi ses chances de réalisation augmentées par
rapport à ce qu'il en serait pour une personne pessimiste, même
si elles semblent faire exactement la même chose. On dira que la première
attire la chance en attribuant cette chance à une aptitude à saisir
les opportunités dont le pessimiste serait dénué, son pessimisme
le rendant aveugle aux occasions favorables.
Oui
mais, nous avons tous remarqué que certaines personnes croient en un
facteur d'influence additionnel, que je qualiferais de "non causal"
pour ne pas le qualifier d'emblée de "magique", ce qui signifierait
que je le range dans l'irrationnel. Par exemple on brule des cierges par çi,
on fait des prières par là ou l'on applique simplement la méthode
Coué. En gros, ces gens là pensent que leur esprit est capable
de déposer une demande à l'univers qui pourrait être prise
en compte indépendamment de toute préparation active qui pourrait
favoriser la demande.
Ma
question est: un tel facteur d'influence non causal de réalisation de
nos intentions existe-t-il objectivement ? Autrement dit, possède t-il
une explication rationnelle ?
Ma
réponse est oui, et je vais tenter ici de fournir cette explication en
partant d'une conception du temps dont les éléments de base sont
les suivants:
- Notre futur est déjà réalisé sous forme d'une ligne temporelle A (notre destin),
- Cette ligne temporelle coexiste parmi d'autres lignes temporelles qui représentent tous nos destins alternatifs possibles,
- Notre futur peut alors être modifié, si par exemple notre destin bascule de la ligne temporelle A vers la ligne temporelle B.
Jusque
là, sans même répondre à cette question, je pense
qu'on peut déjà mettre tout le monde d'accord sur le schéma,
pour peu que l'on prenne en compte les progrès de la physique qui rendent
aujourd'hui tout à fait crédible cette représentation du
temps réalisé avec des lignes temporelles qui peuvent basculer.
Je n'ai pas encore dit ce qui est à l'origine de ce basculement ou bifurcation:
hasard ? déterminisme ? intention ? Tout reste possible.
Avant
de lire la suite, je recommande tout de même de lire cette
page en référence.
Dans
ce cadre conceptuel, la question qui se pose, et que l'illustration ci-dessus
schématise, est alors la suivante: A l'instant T1, si je prend la décision
d'aller vers un nouveau destin B, au lieu d'aller vers un ancien destin A (que
je ne connais pas nécessairement), quand est-ce que mon destin va changer
?
- Est-ce que mon destin va changer au moment T2 où, fort de mes nouvelles résolutions B, je vais rencontrer l'opportunité de prendre cette nouvelle orientation B, initialement forgée à l'instant T1 ?
- Ou est-ce que mon destin va changer immédiatement, c'est à dire au moment T1 ?
Ce très léger décalage signifie qu'entre T1 et T2, il n'existe aucune autre différence entre les lignes temporelles A et B que le simple enregistrement de mes nouvelles résolutions quelque part dans mon cerveau. Je peux même oublier totalement, de l'instant T1 à l'instant T2, que j'ai modifié mes résolutions en T1, et ne plus y penser (à B). Il suffira simplement qu'à l'instant T2 il se présente une opportunité qui me ramène B à la conscience pour que je fasse en conscience le choix décisif, le moment étant venu de saisir l'occasion. Mais il se pourrait aussi bien que ce "choix" soit inconscient, à partir du moment où mes résolutions sur B, devenues inconscientes, restent capables de me faire opérer le choix décisif de manière réflexe.
J'ai choisi volontairement ici une situation de changement de vie (par bifurcation) où le hasard n'intervient pas à priori, étant donné que l'occasion qui se présente au point de non retour est la même, que l'on considère A ou B: elle est déterministe.
Revenons donc, sans considérer l'influence du hasard, à la question cruciale qui est la suivante:
A quel moment mon destin bascule t-il de A vers B ?
Si vous jugez que mon destin bascule au moment T2, alors ma démonstration est terminée, car vous ne pourrez pas admettre la suite. Si par contre vous estimez qu'il est juste de considérer que mon destin a déjà basculé au moment T1, alors vous pouvez poursuivre votre lecture.
Que se passe t-il donc au moment T1 pour que mon intention d'aller vers B ait non seulement laissé une trace dans mon cerveau, mais également, semble-t-il, laissé une trace dans l'univers, puisque ce dernier va devoir se réorganiser de manière à prendre en compte le fait que je vais aller vers B plutôt que A ?
Si mon futur n'existait pas déjà, ça ne poserait pas de problème et la réponse serait qu'il ne se passe rien d'autre (que cette trace de nouvelle résolution B imprimée dans mon cerveau). Mais le problème ici est qu'il semblerait que l'univers ait à réagir instantanément au fait que, si je vais vers B plutôt que A, alors je vais non seulement influer sur ma vie entière mais aussi sur celle des autres. Auquel cas ça va lui occasionner un sacré travail de réorganisation !
Sans même introduire l'hypothèse du libre arbitre, nous avons là une grosse difficulté. La seule façon de la résoudre simplement est de considérer que toute évolution est déterministe et que la différence entre A et B n'existe pas. Nous n'aurions alors aucun libre arbitre qui ne soit pas purement et simplement illusoire. Dans ce cas, ma résolution B était déterminée d'avance par mon conditionnement mental et la ligne temporelle A n'existait pas, laissant seule B dans l'univers.
Mais dans ce cas, même le hasard indéterministe serait interdit, car ce hasard produirait le même paradoxe ! Toute évolution, y compris le hasard, serait déterministe, et les mondes parallèles de la mécanique quantique ne serviraient strictement à rien, sauf à fabriquer d'autres univers dans lesquels des reproductions de nous-mêmes pourraient coexister en même temps que nous, ici et maintenant, mais dont nous n'aurions pas la moindre conscience.
C'est la position dominante en physique à l'heure actuelle, semble-t-il, et c'est la raison pour laquelle les physiciens restent en majorité déterministes malgré les résultats de la physique moderne, toujours plus en faveur de l'indéterminisme. Il y aurait alors quelque chose de crucial qu'on aurait pas encore compris.
Cette position soulève en effet une difficulté majeure: la mécanique quantique nous apprend depuis belle lurette que l'évolution de l'univers à l'échelle des particules est indéterministe et que cette évolution quantique s'étend même à l'échelle macroscopique (nous vivrions dans un monde quantique). En renfort de de ce monde quantique, la physique classique elle-même est soumise au problème de l'indéterminisme dès que l'on considère des trajectoires dispersives ou chaotiques, ce qui est le cas général: un gaz est dispersif, la météo est dispersive et chaotique. Pour éviter l'indéterminisme, il faudrait supposer que toutes les positions et vitesses de toutes les particules de l'univers ont une précision infinie, ce qui est peu concevable et contredit surtout la majorité des modèles les mieux acceptés de l'univers, lesquels infligent une distance minimale indépassable en précision: la longueur de Planck, égale à 10 puissance moins 33 cm.
Je propose donc qu'il faut avoir le courage d'accepter les résultats de la physique pour oser regarder en face les conséquences d'un réarrangement perpétuel du futur de l'univers où des lignes temporelles telles que A et B coexistent de manière distincte.
Muni de ce courage, on se trouve alors rapidement confronté au constat suivant: étant donné que le hasard indéterministe, considéré seul, produit des effets qui sont inconcevables en terme de désordre infligé en permanence dans le processus de réarrangement perpétuel du futur de l'univers, il est absolument nécessaire de trouver une sorte de mécanisme régulateur qui va l'éviter. Sinon on voit mal comment notre futur pourrait être autre chose qu'une bouillie infame devant laquelle on comprendrait alors encore plus mal comment il parviendrait malgré tout à se dessiner devant nos pas.
Je pose en conséquence l'hypothèse suivante: il existe un mécanisme régulateur du futur de l'univers qui est tout simplement notre conscience à travers laquelle va pouvoir s'exprimer notre libre arbitre. Il s'agit d'une conséquence directe du fait de considérer que l'instant T1 agit, donc bien avant l'instant T2, sur la restructuration du futur consécutive au fait que notre nouvelle intention a programmé notre cerveau de façon définitive. Il s'agit donc d'un raisonnement déterministe et matérialiste, contrairement à ce qu'on pourrait croire.
Pourquoi nos consciences, ayant donc ce pouvoir matérialiste et déterministe via notre cerveau, moyennant un libre arbitre relatif (car illusoire dans la majorité des cas), seraient-t-elles régulatrices ? Eh bien parce qu'elles permettraient de dessiner un futur structuré, évitant ainsi l'infame bouillie qui résulterait de ce que le hasard soit seul à opérer.
Pour ce faire, on peut parfaitement imaginer que l'univers ne se structure pas d'un seul coup, instantanément, mais seulement petit à petit. Nos consciences n'auraient pas un effet immédiat, nos intentions ne s'y imprimeraient pas "comme par magie", il y aurait cependant un effet immédiat qui consisterait, métaphoriquement parlant, à poser des pierres. Une vague intention poserait de la poussière, une intention déterminée et bien focalisée poserait une vraie pierre. La prière serait justifiée. Le futur serait en formation de la même façon qu'un organisme, et l'univers recevrait ses informations de l'ensemble des êtres qui le composent, à différents degrés dépendant de la conscientisation de leur libre arbitre. Un homme mu par son ego n'aurait ainsi aucune action, puisque son fonctionnement serait mu par l'ego, c'est à dire déterministe. L'ensemble de l'univers serait un organisme en croissance. Le libre arbitre serait assorti d'une intensité, d'une amplitude mesurant sa capacité d'oeuvrer directement sur le futur. Cette capacité, cette intensité, cette amplitude, ce serait tout simplement l'Amour. L'amour serait une réalité fondamentale au même titre que la lumière, l'energie ou la matière, si ce n'est plus fondamentale encore.
L'essence du moteur du libre arbitre serait alors l'Amour. Pour vous faire une idée plus précise du mécanisme de programmation du futur de l'univers que je propose sous la forme d'une métaphore, vous pouvez lire cet extrait de mon livre: Le Cycle de l'Amour.
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