samedi 5 mai 2012

Dieux Egyptiens



Maât, la Déesse

Maât est, dans la mythologie égyptienne, la déesse de l'ordre, de l'équilibre du monde, de l'équité, de la paix, de la vérité et de la justice. Elle est l'antithèse de l'isfet (le chaos, l'injustice, le désordre social, …).

Maât est une entité symbolisant la norme universelle : l'équilibre établi par le Créateur, la justice qui permet d'agir selon le droit, l'ordre qui fait conformer les actes de chacun aux lois, la vérité, la droiture et la confiance.
Maât est toujours anthropomorphe, comme la plupart des concepts abstraits personnifiés : c'est une femme, en général assise sur ses talons, ou debout. Elle est la plupart du temps vêtue de la longue robe collante des déesses et porte leurs bijoux habituels. Maât confère aux autres dieux certaines de ses qualités, mais ne leur prête pas son aspect et ne prend pas non plus l'apparence d'autres divinités. Son attribut est la plume-nom (la même est portée par Shou). Elle tient souvent le signe de vie. L'élément de Maât est l'Air et la couleur de sa peau est ocre jaune.
Au-delà de cette première approche, le concept est un peu plus complexe. Maât est d'abord de dimension divine : elle est la mère de dont elle est aussi la fille et l'épouse, elle est aussi la sœur mystique de pharaon, elle assure l'équilibre cosmique et c'est donc grâce à elle que le monde fonctionne de façon harmonieuse. Elle est également la lumière que Rê apporte au monde.
De ce fait, elle est fondamentalement liée à l'institution pharaonique, le premier devoir de pharaon étant de faire respecter la loi de Maât dans toute l'Égypte. C’est pourquoi, sur les murs des temples, pharaon est représenté faisant l'offrande de Maât à une divinité : c’est dire que, dans ses actes, il se conforme aux exigences de la déesse. Ainsi, lorsque Séthi Ier, dans le temple d'Abydos, offre Maât aux dieux principaux, sous forme d'une statuette de la déesse, il leur démontre sa compétence ; en retour, les dieux lui procurent vie et domination (Osiris) et force victorieuse (Horus).
La mission de pharaon relève de Maât : « in maât » (amener Maât, organiser le pays et assurer son unité), « der isfet » (repousser Isfet, notamment repousser les ennemis) ; la célèbre palette de Narmer transcrit cette double mission. On peut évoquer aussi l'hymne solaire du Moyen Empire :
« Ré a installé le souverain sur la terre des vivants à jamais et à toute éternité de sorte qu'il juge les hommes et anéantisse Isfet. »
— B. Menu
Précisément, et c'est sa seconde dimension, terrestre celle-là, Maât est aussi l'expression sociale et juridique de l'ordre établi et le symbole de la justice et de l'équité. Dans les faits, c'est le rôle du vizir, qui porte le titre de « Prophète de Maât », que de rendre la justice au nom de la déesse et donc de pharaon qui l'incarne :
« Pratique la justice et tu dureras sur terre.
Apaise celui qui pleure ; n'opprime pas la veuve ;
Ne chasse point un homme de la propriété de son père ;
Ne porte point atteinte aux grands dans leur possession ;
Garde-toi de punir injustement. »
— F. Daumas
Dans la pesée de l'âme, Maât, aussi légère qu'une plume, est le contrepoids du cœur qui doit être aussi léger qu'elle pour que le ka, l'âme du défunt, puisse accéder au monde des bienheureux. Elle est représentée par une femme coiffée de la plume d'autruche ou simplement par cette plume elle-même.
À une époque plus tardive, « maât » signifie également la vérité ou la connaissance juste de soi.

La loi de Maât

La loi de Maât peut être retrouvée dans le chapitre 125 du livre des morts des Anciens Égyptiens, aussi appelée les « 42 lois de Maât », la « déclaration d'innocence » ou les « confessions négatives ».

Horus, Un dieu complexe

Horus est l’appellation latine d’une des plus anciennes divinités égyptiennes, le dieu faucon Ḥr, dont le nom signifie probablement « celui qui est au-dessus » ou « celui qui est lointain ». Le culte d’Horus remonte sans doute à la préhistoire, car la liste royale du Canon royal de Turin qualifie de Suivants d’Horus les rois légendaires qui gouvernèrent l’Égypte après le règne des dieux (on peut noter ici que Horus au serekh est le plus ancien roi égyptien qui puisse être nommé). Aux débuts de l’époque historique, le faucon sacré est figuré sur la palette du roi Narmer et dès lors il sera constamment associé à la monarchie pharaonique.

Horus est un dieu à multiples facettes, au point qu’on s’est demandé si le nom ne désigne pas en fait des divinités distinctes :
  • Il est le faucon céleste dont l’œil droit est le soleil et l’œil gauche la lune. C’est sous cet aspect qu’il recevait un culte à Nekhen, l’Hiérakonpolis grecque.
  • À Héliopolis, il était vénéré en tant que Horahkty, l’Horus de l’Horizon, concurremment avec . En tant que tel, il était à la fois le soleil du matin et le soleil du soir. Dans les textes des pyramides, le roi défunt ressuscite sous cette apparence de faucon solaire. Par un syncrétisme fréquent dans la religion égyptienne, Horakhty finit par fusionner avec le démiurge héliopolitain, sous la forme de Rê-Horakhty.
  • Dans le mythe osirien enfin, Horus est le fils d'Osiris et d'Isis. Osiris, assassiné par son frère Seth, est ramené à la vie, le temps d'une union, grâce aux efforts conjugués d'Isis et de Nephtys. C'est de cette union miraculeuse que naît Horus l’Enfant, que les Grecs appelleront Harpocrate, ou Harsiésis, Horus fils d’Isis.
Pour venger la mort de son père Osiris, Horus affronte son oncle Seth, il gagne le combat et reçoit le trône d'Égypte en héritage. D'où son surnom de « vengeur de son père ». Il est par-là même le premier des pharaons après son père. Cependant, sa légitimité sera sans cesse contestée par Seth. Horus est borgne : lors du combat qui l’oppose à Seth, Horus a perdu son œil gauche, qui est reconstitué par Thot. Appelé Oudjat, cet œil, que les Égyptiens portèrent sous forme d’amulette, possédait des vertus magiques et prophylactiques.

À l'opposé donc de Seth, qui représente la violence et le chaos, Horus pour sa part incarne l’ordre et, tout comme pharaon, il est l’un des garants de l’harmonie universelle ; cependant, il ne faut pas réduire la théologie complexe des Égyptiens à une conception manichéenne du Bien et du Mal, car, dans un autre mythe, Seth est l’auxiliaire indispensable de dans son combat nocturne contre le serpent Apophis. Bien et mal sont des aspects complémentaires de la création, tous deux présents en toute divinité. (Voir Personnification du principe du mal).
Les « quatre fils d'Horus ».
Quels que soient son aspect et son rôle — faucon céleste, dieu créateur ou fils d’Osiris — Horus est le dieu dynastique par excellence. Depuis Narmer, le roi porte le nom dit d’Horus. Il s’agit du premier élément de la titulature pharaonique, du ren maâ, le nom authentique par lequel pharaon définit sa nature. Sous les trois premières dynasties, le nom d’Horus s’inscrivait dans un rectangle surmonté de l’oiseau sacré, le serekh, dont le registre inférieur représente la façade stylisée du palais royal. La signification du serekh est évidente : le roi dans son palais est l’Horus terrestre, à la fois l’incarnation du dieu et son successeur légitime sur le trône d’Égypte. À partir de Khéops, la titulature royale est augmentée d’un autre titre, le nom d'Horus d'or, dont l’interprétation est toutefois incertaine.
Les « quatre fils d'Horus » sont des divinités inférieures représentées sur les vases canopes :

Une lutte sans fin

À Horus, fils et héritier d'Osiris, la couronne d'Égypte revient de droit. Mais Seth, jaloux, s'en empare par la force. Horus, appuyé de sa mère Isis, fait convoquer le tribunal des dieux à toute fin de régler ce contentieux. préside, tandis que Thot tient le rôle du greffier.
Bas-relief du combat d'Horus, aidé par Isis, harponnant Seth sous la forme d'un hippopotame devant l'assemblée des dieux dans le déambulatoire ouest, temple d'Edfou, Égypte
Quatre-vingts ans s'écoulent pourtant sans que le débat ait progressé. Le tribunal est même partagé entre les tenants de la royauté légitime (revenant à Horus), et Rê qui voit en Seth son perpétuel défenseur contre Apophis (le dieu serpent qui est depuis toujours l'ennemi de Rê). Les débats, qui tournent en rond, nécessitent un avis extérieur. C'est donc à Neith, déesse de Saïs, réputée pour son infinie sagesse, que Thot s'adresse. Sa réponse est sans ambiguïté : la couronne revient à Horus. Cependant pour ne pas pénaliser Seth, Neith propose de lui offrir les déesses Anat et Astarté comme épouses.
Si le tribunal se réjouit de cette solution, Rê, lui, reste sceptique. Horus ne serait-il pas un peu jeune pour assumer la direction du royaume ? Isis, excédée par tant de tergiversations, propose de déplacer les débats à Héliopolis devant Atoum et Khépri. Seth, furieux, s'y oppose et ordonne que les débats se fassent en l'absence d'Isis. Mais c'était compter sans la ténacité de la déesse.
Elle se réintroduit dans l'enceinte du tribunal sous les traits d'une belle jeune femme qui ne manque pas d'attirer rapidement l'attention de Seth. Tous deux finissent même par converser. Troublé par tant de beauté, Seth s'égare dans des propos compromettants, reconnaissant même sous la cape la légitimité filiale d'Horus ! « La rusée » Isis se dévoile alors. Le coup de théâtre laisse Seth sans voix. Quant à Rê, il a pu juger de l'imprudence de Seth, qui se confia sans prendre garde à une inconnue. Aussi la couronne revient-elle à Horus des mains de Rê lui-même.
Mais Seth, éternel jaloux, ne semble pas décidé à en rester là. Il propose à Horus des jeux sportifs. Parmi eux, une épreuve aquatique où les deux dieux se transforment en hippopotames. À celui qui restera le plus longtemps sous l'eau pourra devenir roi. Mais Isis, qui suit de près les mésaventures de son fils, perturbe la partie et s'attire au final le mécontentement des deux protagonistes : les trois dieux se déchirent en violentes disputesb 1.
, désespérant d'assister enfin à une réconciliation, les invite à faire la paix autour d'un banquet. Mais une fois encore, les luttes ne cessent de se multiplier. Seth va même jusqu'à essayer de féminiser Horus pour le rendre indigne du pouvoir aux yeux des autres dieux en se masturbant pour éjaculer et verser son sperme sur les cuisses de son neveub 2.
Représentation de Horus à gauche au temple de Dendérah en Égypte.
Osiris, resté silencieux, intervient alors et met directement en cause le tribunal qu'il juge trop laxiste. En tant que dieu de la végétation, il menace de couper les vivres à l'Égypte. Les dieux, bousculés par tant d'autorité, ne tardent pas à rendre un verdict favorable à Horus. Mais Seth n'est pas oublié. Placé aux côtés de Rê, il devient « celui qui hurle dans le ciel » pour que soit fait place devant le dieu créateur.
Les six dieux-rois sont
  1. ,
  2. Shou,
  3. Geb,
  4. Osiris,
  5. Horus,
  6. Thot (incertain).

Étude psychologique d'Horus

Après avoir fait une étude psychologique sur la nature du moi, Roland Khater y a isolé deux tendances antagoniques, l’une, initiale, portée vers l’égoïsme et l’autre, naissant du besoin de se faire accepter par autrui et de s’impliquer dans la cohérence générale, vers le respect du droit d’autrui. Ayant rapproché ces deux tendances des deux divinités ennemies de la religion de l’Égypte antique, il a remarqué que ces deux tendances correspondent exactement à Seth (l’égoïste) et à Horus (celui qui respecte autrui). À partir de là, l’auteur a essayé, dans son livre Décryptage de la religion de l'Égypte Ancienne, de trouver dans les divinités égyptiennes les composantes actives du psychisme humain.

Apophis



Apophis (en grec ancien Ἀπόφις / Apóphis) est un dieu de la mythologie égyptienne.
Il est le dieu des forces mauvaises et de la nuit, la personnification du chaos et du mal cherchant à anéantir la création divine. Son nom Aapep ou Aapef (en égyptien ancien) signifiait « géant » ou « serpent géant ». Il est représenté justement sous la forme d'un serpent gigantesque qui s'attaque quotidiennement à la barque de voguant sur le Noun, afin de mettre fin au processus de la création, mais il est chaque fois vaincu. Chaque lever du soleil marquait ainsi la victoire de sur Apophis.
était aidé pour repousser Apophis par d'autres divinités : Seth était désigné par Rê pour défendre la barque divine à l'aide d'un harpon, Isis, à l'avant de la barque solaire, utilisait ses pouvoirs pour priver Apophis de ses sens dans le but de le désorienter, ce qui permettait au chat de Rê, personnification de la déesse Bastet, de décapiter le serpent. Dans des rites destinés à repousser Apophis et les autres puissances nuisibles, des petites figurines sur lesquelles était gravé le nom d'Apophis étaient jetées au feu. On trouve fréquemment des images d'Apophis ligoté et transpercé de flèches.
Il est possible que ce soit l'explication qu'ont trouvée les Égyptiens de l'Antiquité pour expliquer les phénomènes d'éclipse de soleil qui représentaient autant de combats momentanément perdus par le dieu .

Seth

Seth est une divinité guerrière de la mythologie égyptienne. Par Seth grondent les orages, il s'oppose toujours à l'harmonie des choses et des arrangements, il est la force brûlante, capable de détruire toute forme de vie. Il a été associé au Typhon grec, qui pouvait de ses mains étendues toucher l'Orient et l'Occident.
C'est l'un des dieux les plus complexes et ambigus ; les mythes relatifs à Seth le dépeignent comme un dieu ambitieux, comploteur, manipulateur, quand il ne se résume pas tout simplement à un assassin. Bien peu de vertus sont donc à l'actif de ce personnage que , le Maître de Monde, défendit contre l'avis de toute sa famille, la protection de venant du fait que Seth est le protecteur du Soleil.
De son père Geb, un des quatre éléments primordiaux, il a reçu la terre stérile, tandis que son frère Osiris bénéficiait des sols fertiles ; également par sa mère, Nouth, un autre élément originel, il se rattache à la Grande Ennéade héliopolitaine.
Sa figure animale n'a pas été formellement identifiée. Bien que l'on ait souvent considéré qu'il s'agissait d'un animal imaginaire, une hypothèse y verrait l'oryctérope du Cap, un animal nocturne d'Afrique subsaharienne1 ou le chacal.
On l'appelle aussi le « dieu rouge », le dieu « grand de force » (ˁȝ phty), maître du tonnerre, de la foudre et du désordre, dieu du désert et de l'aridité, des pays étrangers : les Égyptiens s'en méfiaient beaucoup, sauf sous les Ramessides où il était vénéré quasiment sur un pied d'égalité avec Horus : les Égyptiens le vénéraient tout en le redoutant.
Les personnes aux cheveux roux ou châtains étaient considérées de son obédience. D'autres Égyptiens lui vouaient des cultes secrets qui exigeaient des sacrifices humains ; ces sectes furent toujours maudites et poursuivies par les pharaons. Dans un certain sens, le christianisme a récupéré Seth sous le nom du « diable ».
Seth est associé à deux grands mythes :
  • Le mythe héliopolitain qui le met en scène avec , dont il est le petit-fils né de l'union de Geb et de Nout la déesse du ciel. Il est ainsi vu comme un dieu bénéfique représentant la force et l'énergie, défenseur de la barque solaire contre Apophis le serpent, le Mal incarné qui menace l'équilibre du monde.
  • Le mythe osirien où il assassine son frère Osiris (Ausare), pour régner à sa place et s'oppose à Isis et au fils qu'elle a eu d'Osiris, Horus qui réclame le trône et l'héritage de son père. Les ruses dont il fait preuve, le procès auquel il se trouve confronté, tout dans sa vie fait de lui un dieu au profil très humain.
La principale source pour le mythe osirien est le long texte narratif du papyrus Chester Beatty I (XXe dynastie), publié en 1931, que les égyptologues connaissent sous le titre moderne des « Aventures d'Horus et Seth » (« Contendings of Horus and Seth »)2.


La prétention de Seth

Seth (à gauche) et Horus (à droite) adorant Ramsès II à Abou Simbel
Jaloux de son frère qui règne sur l'Égypte, Seth organise un complot et tend un piège à Osiris3. Il l'assassine en le noyant dans le Nil. Isis, l'épouse d'Osiris, retrouve le dieu noyé, l'embaume et lui donne une sépulture dans le delta du Nil. Seth retrouve la sépulture de son frère, et de rage, le dépèce et disperse les morceaux du corps dans toute l'Égypte. Isis, infatigable veuve, retrouve treize des quatorze parties de son bien-aimé (la partie manquante étant le sexe d'Osiris, dénommé à cette occasion son « talisman »). Puis Isis le reconstitue, lui insuffle le souffle de la vie éternelle, et par sa magie conçoit avec lui un fils, Horus (Hor).
Au-delà de l'assassinat d'Osiris par Seth, sans cesse poussé par son insatiable jalousie, Seth eut tôt fait de reporter sa haine sur Horus.

Seth et Horus ; une lutte sans fin

Horus, fils d'Osiris, en est aussi l'héritier : la couronne d'Égypte lui revient donc de droit. Mais Seth, jaloux et considérant la primauté de ses propres droits, s'en est emparé par la force et ne lui cède rien. Horus, appuyé de sa mère Isis, fait convoquer le tribunal des dieux à toute fin de régler ce contentieux. préside, tandis que Thot tient le rôle du greffier.
Quatre-vingts ans s'écoulent pourtant sans que le débat ait progressé. Le tribunal est même partagé entre les tenants de la royauté légitime (revenant à Horus), et qui voit en Seth son perpétuel défenseur contre Apophis. Les débats, qui tournent en rond, nécessitent un avis extérieur. C'est donc à Neith, déesse de Saïs, réputée pour son infinie sagesse, que Thot s'adresse. Sa réponse est sans ambigüité : la couronne revient à Horus. Cependant pour ne pas pénaliser Seth, Neith propose de lui offrir les déesses Anat et Astarté comme épouses.
Si le tribunal se réjouit de cette solution, , lui, reste sceptique. Horus ne serait-il pas un peu jeune pour assumer la direction du royaume ? Isis, excédée par tant de tergiversations, propose de déplacer les débats à Héliopolis (Onou) devant Atoum et Khépri. Le ton monte ! Seth, furieux, s'y oppose et ordonne que les débats se fassent en l'absence d'Isis. Mais c'était compter sans la ténacité de la déesse.
Elle se réintroduit dans l'enceinte du tribunal sous les traits d'une belle jeune femme qui ne manque pas d'attirer rapidement l'attention de Seth. Tous deux finissent même par converser. Troublé par tant de beauté, Seth s'égare dans des propos compromettants, reconnaissant même sous la cape la légitimité filiale d'Horus. Isis se dévoile alors. Le coup de théâtre laisse Seth sans voix. Quant à , il a pu juger de l'imprudence de Seth, qui se confia à une inconnue sans prendre garde. Aussi la couronne revient-elle à Horus des mains de lui-même.

La revanche

Seth, éternel jaloux, ne semble pas décidé à en rester là. Il propose à Horus des jeux sportifs. Parmi eux, une épreuve aquatique où les deux dieux se transforment en hippopotames. À celui qui restera le plus longtemps sous l'eau de devenir roi. Mais Isis, qui suit de près les mésaventures de son fils, perturbe la partie et s'attire au final le mécontentement des deux protagonistes. Les trois dieux se déchirent en violentes disputes.
, désespérant d'assister enfin à une réconciliation entre l'oncle et le neveu, les invite à faire la paix autour d'un banquet. Seth fait mine de se réconcilier avec Horus ; il l'attire chez lui pour y « passer un bon moment » ; la journée passe, les deux dieux se couchent et, durant la nuit, Seth pénètre Horus et jouit sur ses cuisses (ou entre les mains d'Horus) :
« Cependant, le soir tombé, on leur prépara le coucher ; ils s’allongèrent, les deux hommes, mais pendant la nuit, Seth durcit son membre et le glissa entre les cuisses d’Horus. Horus plaça ses mains entre ses cuisses et recueillit le sperme de Seth. »
L'attentat, destiné à féminiser Horus et à le rendre indigne du pouvoir, finit par se retourner contre Seth. Et la querelle reprend de plus belle. Osiris, resté silencieux, intervient alors et met directement en cause le tribunal qu'il juge trop laxiste. En tant que dieu de la végétation, il menace de couper les vivres à l'Égypte. Les dieux, bousculés par tant d'autorité, ne tardent pas à rendre un verdict favorable à Horus. Mais Seth n'est pas oublié. Placé aux côtés de , il devient « celui qui hurle dans le ciel » pour que soit fait place devant le dieu créateur. Alors Rê-Horakhty dit : « Que Seth me soit donné, pour qu'il vive avec moi et soit mon fils. Il tonnera dans le ciel, et il sera redouté. »

Seth, défenseur de la barque solaire

Linteau d'une porte du temple de Seth de Noubt - Règne de Thoutmosis Ier - Musée du Caire
Depuis le premier jour, voyage dans le ciel à bord de sa barque qui l'emmène le jour d'est en ouest, puis la nuit d'ouest en est. Si le voyage diurne se fait sans ambages, la traversée nocturne du monde de dessous s'avère beaucoup plus périlleuse. Car, noyée dans l'obscurité qu'elle fend à vive allure, la barque est épiée depuis les profondeurs des ténèbres par Apophis, le serpent du chaos. Terrifiant, rapide, le monstre surgit et se dresse, gigantesque devant l'esquif solaire. Mais c'est compter sans Seth placé à la proue de la barque et qui, d'un coup de pique, envoie le serpent monstrueux s'en retourner aux confins du monde.
Hélas, la scène est sans cesse recommencée, au même titre que les nuits et les jours alternent indéfiniment. Cette lutte perpétuelle symbolise la victoire de l'ordre sur le chaos. On comprend dès lors que ait pour Seth une certaine estime. Une estime telle qu'elle vaut à ce dernier d'être soutenu par le dieu des dieux, même lorsque son cas est indéfendable.

La bisexualité de Seth

Seth, dieu bisexuel4, est marié à la déesse Nephtys, et s'est aussi engagé dans des relations sexuelles avec Horus.
Cet épisode avec Horus dans les Aventures5 a longtemps passé pour un trait ribaud isolé qui témoignerait de la culture populaire, ipso facto vulgaire, de l'Égypte tardive (la période des Ramsès étant l'apogée, et les derniers feux de la période pharaonique) ; ainsi l'éditeur princeps, Alan Gardiner, critiquait la valeur à la fois littéraire et morale de l'œuvre, qu'il imaginait récitée par un conteur, à la veillée, devant des auditoires de paysans6. De même, on a pu estimer que les Aventures, en raison de cet épisode de promiscuité et d'autres passages scandaleux comme la décollation d'Isis, appartiennent à une branche spéciale de la littérature égyptienne7. Mais deux autres passages homosexuels, l'un connu depuis plus d'un siècle, le papyrus de Lahun / Kahun (du Moyen Empire égyptien), où Seth interpelle Horus en vantant la belle croupe de ce dernier, à la suite de quoi Horus raconte à Isis que Seth veut le prendre sexuellement et celle-ci explique à son fils comment le duper durant le rapport ; l'autre annoncé seulement en 1977 et publié en 2001 (un des textes des pyramides inédit, datant de la Ve dynastie (trouvé dans l'antichambre de la pyramide de Pépi Ier), où Seth et Horus sont décrits en toutes lettres comme se sodomisant mutuellement, démentent cette conclusion et laissent à penser que l'homosexualité8 de Seth, tour à tour sexuellement agressif et passif (hmty), doit être un trait de sa personnalité divine comme figure de la confusion et du chaos9,10.
Dans les textes des pyramides, une scène raconte comment Seth eut une relation homosexuelle avec Horus, en tenant avec celui-ci le rôle actif11. Par ailleurs, une autre tradition mythologique attribue à Seth une relation homosexuelle, prolongée et consentie cette fois-ci, avec le dieu libyen Ach12.

Principaux lieux de culte du dieu Seth

Temple dédié à Lieu
Seth Avaris/Pi-Ramsès
Seth Noubt/Naqada
Seth Deir el-Hagar (Oasis d'Ad-Dakhlah)
Seth Mut el-Kharab (Oasis d'Ad-Dakhlah)
Seth Khargeh

Seth, aujourd’hui

En comparant Seth et Horus à deux tendances qu'il a isolées dans le moi, Roland Khater a vu en Seth la tendance égoïste du moi qui agresse la tendance à s’intégrer dans l’ordre général et à respecter autrui (Horus). Ce Seth complexe et ambigu fait le mal mais il est pourtant un dieu et non un démon. En fait, il correspond exactement à la tendance du moi que l’auteur a décrite comme étant nécessaire et raffermissante du moi. Petit à petit, cette tendance égoïste devra se réformer jusqu’à se concilier avec l’activité respectueuse du moi (Horus). Sa fonction est de consolider le moi dans ses acquisitions et sa progression alors que la fonction de la tendance à respecter autrui (Horus) est de permettre au moi de s’ouvrir au monde qui l’entoure. Si Seth est mauvais, il ne l’est pas pour toujours et sa destinée est de changer et de jeter ses armes destructrices. C’est ce que la religion osirienne traduit en disant qu’il est un dieu et non un démon et qu’il finira par être émasculé par Horus.

Notes

  1. P. de Maret, L’oryctérope, un animal « bon à penser » pour les Africains est-il à l’origine du dieu égyptien Seth ?, Bulletin de l’Institut français d'archéologie orientale, 105, 2005, p. 1-20.
  2. Texte, traduction et notes en sont donnés en dernier lieu chez M. Broze, Mythe et roman en Égypte ancienne, p. 13-124
  3. Ouser, Weser, Ausare en égyptien ; dieu roi de l'Égypte
  4. (en)Set (Seth), God of Storms, Slayer of Apep, Equal to and Rival of Horus [archive], touregypt.net
  5. Broze 1996.
  6. Gardiner 1931, p. 10-11.
  7. Patanè 1991, p. 91-93.
  8. Colin Spencer, Histoire de l'homosexualité, p. 36-37, Pocket, 1999
  9. Velde 1967, p. 32-53.
  10. Velde 1967, p. 43 : « Seth has sexually abused Horus, and Horus has tricked Seth. Thereby cosmic powers have been wasted. Seth's homosexual act threatens to change the cosmos into chaos. »
  11. George Hart, Mythes égyptiens, p. 64-66, Seuil, 1993
  12. Set dans egyptiandreams [archive]

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