lundi 18 février 2013

La révolte d'une start-up contre le pillage des grands groupes

Charles Nouÿrit, entrepreneur, n'accepte plus que les grands groupes amorcent des partenariats avec des start-ups pour piller leur savoir-faire. Il a porté plainte contre La Poste. Explications.

Charles Nouÿrit (C) Sipa
Charles Nouÿrit (C) Sipa
 
Charles Nouÿrit, entrepreneur de 39 ans, part en guerre contre les grands groupes qui, selon lui, amorcent des partenariats avec des start-ups dans le seul but de piller leurs idées ou concepts. Il a porté plainte contre La Poste, et milite pour la création d’une charte éthique.

 - Que vous-est-il arrivé ?
J’ai créé une société spécialisée dans la certification d’identité numérique, Myid.is.certified, qui permet d’authentifier les identités sur Internet. En 2009, la Poste est venue nous voir dans le cadre d’un appel d’offres afin de tester dans l’Essonne le procédé de ma société. Pour l’occasion, un consortium (accord NDLR) entre trois entités a été créé : La Poste, un Centre de recherche et moi-même.

 - Que s’est-il passé ensuite ?
Nous avons normalement travaillé pendant deux ans, puis les deux autres membres du consortium ont tout simplement voté mon exclusion... Mais à peine un mois après mon exclusion du consortium, La Poste a sorti quasiment le même produit que le mien, nommé idn.laposte.fr. Il est incontestable qu’il s’agissait bien de notre technologie car certaines de ses pièces sont communes en propriété intellectuelle avec celles du consortium.

 - Quelle a été votre réaction ?
Bien entendu, j’ai d’abord voulu négocier, par le biais d’un avocat. Peine perdue. La Poste n’a rien voulu entendre. J’ai donc été contraint de porter plainte pour “exclusion illicite du consortium”, et “atteinte au droit de propriété intellectuelle”. La première audience a eu lieu le 24 janvier de cette année, et la procédure suit actuellement son cours.

- Quel est le problème que pose ce type de situation ?
De plus en plus, les grands groupes français se servent de leur coopération avec de jeunes start-ups pour aspirer leurs innovations et leur savoir-faire. Puis, quand le fruit est bien pressé, ils s’empressent de créer leur propre structure... Il existe plusieurs autres exemples que le mien : je peux citer par exemple la coopération entre Apps Gratuites et un opérateur mobile, ou encore celle de tech.Toch.TV et la Caisse des dépôts. D’une part, c’est profondément injuste. D’autre part, un grand groupe n’a aucun intérêt à copier l’idée car la valeur de celle-ci repose sur l’équipe dirigeante et créatrice de la start-up qui l’a développée. Sans l’équipe des fondateurs, le grand groupe ne dispose plus de leur vision technique et stratégique. Sans aller jusqu’à imiter les Etats-Unis, où l’on peut presque déposer des idées, ou en tout cas des processus, comme le bouton “achat en 1-clic” d’Amazon, il faudrait envisager la création d’une charte éthique. Cette charte aurait pour but d’encadrer les rapports entre les grands groupes et les start-ups auxquelles ils sont associés. Il faut vraiment que ce qui est arrivé à ma société aide d’autres start-ups à mieux encadrer et sécuriser leurs relations avec les grands groupes.

Note de la rédaction.
Contactée, La Poste répond que "la solution présentée par M. Nouÿrit présentait des failles de sécurité importantes. Nous avons demandé des modifications : elles n'ont pas été apportées. Quant à l'accusation de "pillage", La Poste signale simplement que notre système d'identification numérique s'appuie sur d'autres process que le sien. Enfin,  depuis 2003, la Poste a mis en place une politique très dynamique en faveur des start-ups, avec la société de capital-risque X Ange, qui étudie 100 dossiers de financement de start-ups par an, et a financé 70 start-ups depuis sa création. Ce n'est pas l'intérêt de la Poste que de ne pas respecter les start-ups."

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