vendredi 6 janvier 2012

Accomplir les écritures
























A propos de l’ouvrage de Paul Beauchamp,
L’un et l’autre Testament, tome 2, Accomplir les Écritures,
Paris, Seuil, 1990, 445 p.

1. Qui est l’auteur ? quelles sont ses pistes de recherche ?

L’auteur (1924-2001) est jésuite. Après un séjour de quelques années en Chine, il a enseigné l’exégèse. Il a essayé de conjoindre dans son geste exégétique des considérations empruntées aux sciences humaines (psychanalyse, linguistique entre autres). Ainsi, il a travaillé régulièrement avec le psychanalyste Denis Vasse.

2. Quel problème biblique et théologique de fond se pose l’auteur ?

Dans le tome 2 de L’un et l’autre Testament, Beauchamp continue de se poser la question de l’articulation entre le nouveau et l’ancien Testament, ou plutôt, pour reprendre Beauchamp, entre l’un et l’autre Testament : Beauchamp utilise cette expression pour souligner la dépendance réciproque entre les deux Testaments, dépendance que le couple (nouveau / ancien) ne rend pas ; au contraire, le couple (nouveau / ancien) peut sous-entendre que l’ancien disparaît lorsque paraît le nouveau. En déclinant au singulier le mot « Testament », Beauchamp entend souligner l’unité du Testament à travers la distinction duelle traditionnelle.
Le problème biblique et théologique de Beauchamp consiste à préciser cette articulation entre l’un et l’autre Testament, sachant qu’elle pose question, dans le cadre de la mission qui nous préoccupe : si le nouveau Testament appelle l’ancien, cela signifie-t-il que les autres cultures devront passer par l’ancien Testament pour accéder au nouveau ? Il en résulte une tension entre l’universalité de l’Évangile appelé à être proclamé dans toutes les cultures du monde, et la particularité de son enracinement dans une culture donnée et localisée, la culture juive : la particularité ne risque-t-elle pas de faire obstacle à l’universalité ? Concrètement, pour annoncer Jésus Christ aux Chinois, faut-il en passer par les catégories bibliques du Messie et de son attente, étrangères à la culture chinoise ?

Plus spécifiquement, le tome 2 essaie de dire ce que l’on peut entendre par « accomplir les Écritures ». Beauchamp part de Jésus Christ et de sa geste pour relire les Écritures, c’est-à-dire, à l’époque de Jésus et des premières communautés chrétiennes, l’ancien Testament. D’un point de vue biblique, que signifie la proposition que Jésus Christ (sa geste, sa personne) accomplit les Écritures ?

« N’allez pas croire que je sois venu abroger la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abroger, mais accomplir . » (Mt 5,17 dans la T.O.B.)

Dans le verset matthéen [1], Jésus refuse le terme « abroger » : l’accomplissement [2] semble donc plus du côté de la continuation – mais si Jésus accomplit la Loi, pourquoi est-il condamné à mort par les autorités responsables de cette même Loi ? La continuité doit s’articuler avec la rupture, une rupture qui éclate dans la violence mauvaise et le versement du sang. Nous découvrons une nouvelle tension, celle entre continuité et rupture, à propos de l’accomplissement.
Par ailleurs, l’accomplissement repose la question du rapport entre universalité et particularité vue plus haut : en quoi la geste de Jésus, référée comme accomplissant les Écritures juives, peut-elle signifier universellement dans toutes les cultures un accomplissement (du projet de Dieu, de l’homme) ?

Pour récapituler, disons que Beauchamp se confronte à une problématique de l’accomplissement des Écritures selon deux axes :

- tension entre rupture et continuité d’une part,

- tension entre universalité et particularité d’autre part.
Schématiquement, la première tension se situe plutôt selon une dimension diachronique (l’accomplissement comme achèvement, comme telos), tandis que la seconde joue plutôt en synchronie (l’accomplissement comme plénitude, comme plerôme)

3. Quelle thèse propose-t-il à partir de ce problème ?

La thèse de Beauchamp joue à l’intérieur d’un périmètre précis : Beauchamp ne fait pas jouer le nouveau Testament ; par ailleurs, il entend traiter l’accomplissement des Écritures sous l’angle de l’accomplissement des « figures » dans les récits de l’ancien Testament [3], tout en sachant que la Bible ne se réduit pas aux récits [4].

Sa thèse repose sur une théorie du récit, que nous articulerons en huit points :

- 1. l’accomplissement peut être défini comme un processus, un trajet entre une origine et une fin ; Beauchamp voit le processus d’accomplissement comme le travail de l’Un [5].

- 2. les récits disent l’origine sous la forme du commencement ; les commencements doivent « chuter » [6] pour faire place à l’origine, encore présente et vivifiante « aujourd’hui », faute de quoi ils deviennent mortifères en enfermant dans la répétition du passé, du même ;

- 3. le commencement contient une promesse, qui provoque à regarder vers l’avenir, vers une fin, objet de la promesse ;

- 4. l’effet de nouveauté du récit naît lorsque le récit est capable de faire revenir à l’origine par delà le commencement, pour entendre « à nouveau » la promesse et repartir vers la fin ;

- 5. les récits font fonctionner des « figures », des « types » en grec [7] ; ces figures, répétées de récits en récits, tendues entre commencement et fin, creusent un espace où peut s’inscrire l’ « antitype », l’accomplissement des types, que ceux-ci voilent en même temps qu’ils le dévoilent ;

- 6. le récit demande que le narrataire prenne une décision, dans la mesure où le récit fait référence au présent, comme « aujourd’hui », comme « jusqu’ici » ; la décision est une décision de foi , puisqu’il s’agit de croire à l’ « aujourd’hui » ;

- 7. le récit reste insatisfaisant, dans la mesure où la fin manque, non qu’elle soit absente mais parce qu’elle n’est pas accomplie : la fin que dit le récit ne rend pas compte sans reste de la promesse du commencement ; cette insatisfaction ressort dans les tensions qui traversent le récit, et qui montrent l’insatisfaction du narrateur ;

- 8. l’accomplissement renvoie à un au delà du récit, traité par Beauchamp sous la catégorie de la rencontre, couplée à la révélation [8]. Lorsque le sens en excès atteint son terme indépassable (la mort est un terme indépassable du récit [9]), le récit devient hyperbolique : il cède le pas à l’au-delà, à l’indicible.

En appliquant cette théorie, Beauchamp dit l’accomplissement des Écritures par Jésus Christ à partir de la répétition du « récit fondateur » constitué par le commencement du monde, les cycles des pères, la sortie d’Égypte – c’est-à-dire la Torah, le Pentateuque [10].
Jésus Christ accomplit les récits dans les Écritures au sens où il amène au jour ce que les figures du récit fondateur tendaient à dire sans le savoir, il rend patente la vérité latente en elles, et qui les travaillait [11]. Citons quelques figures de l’ancien Testament que Jésus accomplit :

- Jésus rejoue la geste d’Adam tenté, mais pour triompher de la tentation par son obéissance « jusqu’au bout » ;

- Jésus est le nouvel Adam, qui en sortant du sommeil de la mort, s’unit à la nouvelle Ève, l’Église ;

- Dans la reprise de la Pâque (que nous développerons plus bas), Jésus, en mourant sur la croix comme maudit, comme « hors-la-Loi » (du moins c’est ce que croient à tort ses frères qui le rejettent), réconcilie Israël et les Nations, c’est-à-dire l’élu et le non-élu, comme il les fait fils du même Père [12], ou aussi, en utilisant le terme de « rencontre » cher à Beauchamp, il fait se rencontrer Israël et les Nations [13]. Ce faisant, il accomplit la raison de l’élection d’Israël [14].

4. Quelle(s) méthode(s) emploie-t-il pour argumenter à partir de sa thèse ?

Beauchamp pratique « l’exégèse typologique », en application de sa théorie de la figure, du « type ».
Il distingue entre le procédé littéraire de la typologie et celui de l’allégorie [15] : d’un côté, l’accomplissement du récit allégorique est réalisé par l’application d’un code au récit, qui permet de produire sur un autre plan le récit décodé ; de l’autre, l’accomplissement des récits typologiques demande le passage par la répétition des figures, sans qu’il soit besoin d’un code extérieur à elles : l’antitype agit dans les « types » à l’origine, aussi le rapport entre eux n’est-il pas extérieur comme l’est le code dans l’allégorie [16].

Beauchamp applique l’exégèse typologique à la Genèse (chap. 3 et 6) et à l’Exode (chap. 7). Nous nous attacherons à l’exégèse typologique d’Exode.

a) L’homme-récit Jésus Christ accomplit la Pâque de l’Exode.
Le récit de la geste de Jésus rend patent ce qui était latent dans l’Exode : Beauchamp récapitule ce qui était à l’origine et cherchait à se dire dans le commencement de la Pâque dans l’Exode : « des deux, il a fait un seul » [17].
Pour Beauchamp, le narrateur de l’Exode voulait dire Israël et l’Égypte en relation amoureuse [18] ; Beauchamp précise que le narrateur n’avait pas nécessairement conscience de cette réalité, mais qu’en disant ce qu’il savait, il manifestait une insatisfaction : insatisfaction que Pharaon ait perdu la vie, insatisfaction que l’Égypte ne soit pas montée avec Israël pour rendre le culte à Dieu. Cette insatisfaction dessine en creux, en négatif, le désir et l’attente d’Israël : que l’élu (Israël) et ses frères (l’Égypte, mais aussi toutes les autres nations), soient unis pour rendre ensemble le culte.
Jésus accomplit ce désir en traversant la mort et en ressuscitant : sa geste est l’antitype de la traversée de la Mer Rouge, qui elle-même répète la séparation originelle des eaux dans le récit de Génèse. Il y a répétition de la figure, mais avec une nouveauté : dans l’Exode, Israël a échappé à l’Exterminateur, mais non les premiers nés de l’Égypte ; avec Jésus, le premier-né qui meurt n’est pas égyptien mais juif [19]. La nouveauté réside dans ce que Dieu laisse l’injuste mettre à mort le Juste.
L’injuste désigne Pharaon et l’Égypte, mais aussi le peuple d’Israël qui murmure contre Moïse, et cela dès le début [20]. Il y a une connivence malsaine entre Israël et l’Égypte, que Moïse va trancher en séparant Israël de l’Égypte – sans annuler pour autant le désir d’ « être-ensemble » [21], d’union entre les deux peuples. Jésus accomplit la promesse d’une jonction saine, promesse qui se tenait au commencement, désormais en lui Israël et le non-Israël peuvent s’unir.
L’homme-récit Jésus accomplit les figures par lesquels l’Un travaille à son accomplissement :

- Israël était élu de Dieu pour qu’il représente les non-élus auprès de Dieu, et Dieu auprès des élus ; or il suscitait la jalousie des non-élus (figuré par l’Égypte) ; lui-même ne se tenait pas la hauteur de son élection, s’opposant à Moïse dès le début et, engagé dans le désert, aspirant à retrouver la « jonction malsaine » avec l’Égypte.

- Moïse, cet homme à la double filiation, égyptienne et juive, n’arrive pas non plus à poser la « jonction saine » malgré sa position de « médiateur » : s’il tranche la jonction malsaine avec l’Égypte, il laisse Pharaon mort sur le rivage [22], et Israël monte vers le lieu de culte avec une dette à régler envers l’Égypte (quand Israël monte vers le lieu de culte, il emporte avec lui les bijoux et l’or de l’Égypte : il se trouve donc en dette vis-à-vis de l’Égypte [23]).

- Jésus accomplit le type de Moïse : il subit l’opposition mortelle et de ses frères juifs, et des païens romains ; mort et ressuscité, il abat le mur de haine qui les séparait, faisant des deux un seul. Unique, il unifie tous les peuples en son corps : le travail de l’Un est accompli en l’homme-récit Jésus, qui dénoue la tension entre l’Un et le multiple, entre Dieu et les hommes et entre l’élu et les non-élus, dans la fraternité de tous en lui, et la filiation au même Père.

b) La précédence du patent sur le latent.
Jésus brise le mur de haine qui séparait les peuples d’avec le peuple élu, sa mort et résurrection accomplit la promesse des commencements en levant l’obstacle au prix de son sang. Beauchamp pose la question de savoir quel rapport entretient la figure d’accomplissement ultime avec les figures qui l’ont précédée. Paradoxalement, ce qui vient au terme de l’histoire des figures, la croix du Christ, se tient dès le commencement, à l’origine, dit Beauchamp en citant Paul : les Israélites au désert mangeaient une nourriture spirituelle et buvaient une boisson spirituelle, qui provenaient du Christ [24].

Quel est l’intérêt d’une telle affirmation, que Beauchamp étaye seulement par un passage, extrait d’une lettre de Paul ? A notre sens, cette affirmation permet de supporter la tension entre continuité et rupture.
La répétition des figures trouve son accomplissement dans une figure provoquée par la rupture que constitue la rencontre imprévisible avec l’homme-récit Jésus [25] ; la rencontre éclaire a posteriori les figures passées qui tendaient vers leur antitype sans le savoir, le préparant [26] en creux, dans leurs déficiences, dans l’insatisfaction repérable des narrateurs (continuité éprouvée a posteriori). Réciproquement, l’accomplissement trouve dans les récits la chair de son expression, de sa mise en mots.
Cependant, l’accord entre les figures et leur accomplissement, entre le négatif des récits préparatoires et le positif de la rencontre, ne résulte pas du hasard fortuit : ce qui se déploie au terme était contenu dans les promesses du commencement. Ce qui advient ultimement (accomplissement comme achèvement, comme telos) n’est pas le fruit d’une décision arbitraire au cours du temps, il résulte d’une progression des figures à partir d’une logique interne aux figures : continuité donc, qui résulte de l’engagement à l’origine de l’Un, qui a propulsé l’histoire vers son accomplissement tout en respectant les décisions des narrataires. Beauchamp lit dans cet accord de convenance entre les figures et leur antitype l’effet de l’amour [27] : la nécessité ne contraint Dieu que parce qu’elle est l’effet de l’amour qui en a décidé ainsi. De même, la nécessité ne s’impose pas aux narrataires parce que l’amour n’impose pas ses preuves, il demande l’interprétation, la décision.

5. Comment évaluez vous de manière critique le rapport question / thèse / argumentation géré par l’auteur ?
Prenons du recul par rapport au geste de l’auteur. Fait-il oeuvre d’exégèse ? Comme Beauchamp le dit lui-même dans son premier tome [28], ce livre est le livre d’un exégète, et non un livre d’exégèse, : la technique exégétique joue comme instrument au service d’une thèse qui emprunte ses ressorts à l’extérieur de l’exégèse [29]. Avec cette démarche, Beauchamp se rend capable d’entrer en dialogue avec la culture contemporaine. Nous ne saurions dire si sa démarche a rencontré un écho.
Par ailleurs, un lecteur juif se poserait sans doute la question de savoir si la lecture typologique permet de rendre compte de l’irréductibilité de l’ancien Testament par rapport au nouveau : même si Beauchamp s’en défend, ne renoue-t-il pas avec la lecture allégorique des Pères de l’Église, qui permet d’interpréter sans reste l’ensemble de l’ancien Testament au chiffre de la Croix : mais justement, demandera le juif, est-ce qu’un tel type de lecture laisse de la place à d’autres interprétations, dont la mienne, qui n’est pas chrétienne ?
Une question subsidiaire serait celle de savoir si Beauchamp a fait école, ou si son geste lui est propre et non répétable. La question est celle de la méthode employée par Beauchamp [Ces deux derniers points m’ont été soufflés par mon correcteur].

Par ailleurs, l’écriture de Beauchamp demande au lecteur une attention soutenue, dans la mesure où Beauchamp croise plusieurs thèmes, qui s’entrecroisent, disparaissent puis réapparaissent : cette construction empêche d’atteindre le sens du livre au travers d’une seule lecture, pratiquée de manière linéaire ; il faut relire le livre à plusieurs reprises, s’arrêter et revenir sur tel ou tel passage, avant que le dessein d’ensemble émerge. Il nous semble que Beauchamp vise à la suggestivité du texte, à sa capacité à éveiller des pistes de recherche chez son lecteur, plus qu’à la rigueur d’un exposé universitaire qui avance de manière linéaire. Sans doute Beauchamp souhaite-t-il que son livre pointe vers un hors-livre, qu’il désigne un au-delà de son livre, à la façon dont, selon lui, les récits renvoient à un hors-récit.

La thèse de Beauchamp représente une réponse possible à sa problématique : son exégèse typologique permet d’articuler unicité et universalité, rupture et continuité dans le processus d’accomplissement des Écritures par Jésus Christ. Nous regretterons cependant que Beauchamp n’ait pas développé la dimension eschatologique de l’accomplissement en Jésus Christ. Sans doute la réservait-il pour la suite de son travail, le tome 3, qui n’est pas sorti.

Nous notons que la théorie des figures de Beauchamp repose sur deux hors-récits : l’origine et la rencontre. Nous apprécions ce dispositif qui se refuse à une explication totalisante, à un « tout est récit » : la totalité du sens ne naît pas des récits, qui sont traversés de part en part par du hors-récit ; un tel dispositif rend possible et demande la surprise, conjointe paradoxalement à l’attente (la rencontre, promise au commencement, était attendue, mais elle surprend – heureusement – quand elle se produit), et au désir (accompli mais non comblé, au sens où l’on comblerait une source pour l’empêcher de jaillir).

L’argumentation de Beauchamp repose sur une pratique de l’exégèse typologique : le lecteur trouvera plus ou moins convaincant le déploiement des figures de l’ancien Testament proposé par Beauchamp ; peut-être louera-t-il la virtuosité de Beauchamp à nouer les figures entre elles, à défaut de louer la précision de son argumentation. Nous apprécions quant à nous la position de foi chrétienne de Beauchamp, qui se donne à lire à travers son exégèse.

Nous conclurons en répondant à la question du début au sujet des chinois, et qui a trait à la mission. A suivre Beauchamp, aucun accès à l’identité de Jésus ne nous est ouvert, hormis le passage par l’ancien Testament qu’il vient accomplir [30], et ce du fait que Dieu a choisi dès l’origine [31] de se dire dans l’histoire et la culture juives, - et dans aucune autre si nous comprenons bien Beauchamp [32]. L’Un peut accomplir toutes les cultures et leurs figures en histoire, de manière seconde (mais non secondaire), parce que d’abord il accomplit la culture juive [33]. Par conséquent, il est demandé aux Chinois de passer par la Pâque juive avec le Christ comme herméneute, s’ils veulent accéder à son identité. Il en résulte une certaine gêne si telle est bien la pensée de Beauchamp. Analysons-la sommairement : elle nous semble la gêne de la raison confrontée à un Un, à un universel qui s’exprime entièrement et sans reste dans un particulier : il nous semble opportun de conclure - provisoirement - sur un passage de Paul, qui dit le paradoxe, la folie pour les grecs, de l’accomplissement en Jésus Christ (dit selon le mode de la plénitude) :


« Veillez à ce que nul ne vous prenne au piège de la philosophie, cette creuse duperie à l’enseigne de la tradition des hommes, des forces qui régissent l’univers et non plus du Christ.
Car en lui habite toute la plénitude de la divinité, corporellement,
et vous vous trouvez pleinement comblés
en celui qui est le chef de toute Autorité et de tout Pouvoir. » [34]
Notes

[1] Beauchamp cite le verset au début de son article « Accomplir les Écritures » dans LACOSTE, Jean-Yves, Dictionnaire Critique de Théologie, PUF, 2002

[2] Il convient d’entendre « accomplissement » non comme un état statique, comme un terme, qui ferait qu’alors le désir serait éteint (cf. p. 427) mais comme un processus dynamique, si l’on veut suivre Beauchamp qui a intitulé son tome 2 : « Accomplir les Écritures » et non : « Accomplissement des Écritures ».

[3] Pour une articulation entre récit et figures, voir par exemple p.225 : « Tout récit est une coordination rythmée de figures successives. Appliqué à l’ensemble biblique, le mot « figure » désigne l’une des phases ou l’une des étapes que traverse le récit total avant son dénouement. ». Nous reprenons ces points plus bas, d’une autre manière.

[4] Cf. p. 220

[5] l’Un comme unique (celui qui échappe à la répétition et à la comparaison) et l’Un comme unifiant (celui vers qui toutes les choses pointent et par qui elles s’ordonnent entre elles, le « centre transcendant ») Cf. p.194 ; 234 ; 236

[6] Voir p. 59. Beauchamp « transplante » ici un concept issu de la psychanalyse.

[7] Voir aussi p. 233-234, où Beauchamp assigne cinq critères à la figure.

[8] Cf. p.426-427. Voir aussi p.83.

[9] Cf. p. 116-117

[10] P. 196

[11] L’expression est traditionnelle : cf. Constitution dogmatique Sur la révélation divine, Dei Verbum, 1965, n°16 : « Dieu donc, inspirateur et auteur des livres des deux Testaments, s’y est pris si sagement que le Nouveau Testament était caché dans l’Ancien, et que l’Ancien devenait clair dans le Nouveau ». Elle provient de saint Augustin, Questions sur l’Heptateuque, 2, 73 : P.L., 34, 623.

[12] Cf. p.403. Beauchamp reprend la théologie paulinienne de la réconciliation.

[13] Cf. 417 et p.137s.

[14] « La vocation d’Israël à s’unir au non-Israël est l’âme de son élection » p. 255

[15] Cf. p.272

[16] Il faudrait se demander en quoi la distinction de Beauchamp est pertinente dans les faits : le nouveau Testament contient explicitement une « allégorie » en Gal 4,24 à propos de Sarah et d’Agar, lues comme les figures allégoriques des deux alliances : Beauchamp n’y verrait-il pas une lecture typologique ?

[17] Citation de Ep 2,16 p. 292. Voir aussi p. 262 ; 267

[18] cf. p. 283

[19] Cf. p. 291

[20] Ex 2, 13

[21] Cf. p.280-281

[22] Cf. p. 275

[23] Cf. p. 282-283

[24] Cf. p. 293-294 renvoyant à 1 Cor 10,2-4

[25] Sur la rupture, voir p. 294-295

[26] Cf. Praeparatio evangelica de l’herméneutique des Pères. Cette remarque se veut seulement suggestive, nous ne développons pas.

[27] Cf. p. 295

[28] Cf. p.9 de l’avant-propos dans Beauchamp Paul, L’un et l’autre Testament, Essai de lecture, Seuil, 1977, 319 p.

[29] Beauchamp commence son livre par des considérations anthropologiques en dehors de l’exégèse : les chapitres 1 et 2 sont consacrés à l’acte de parler et à l’acte d’écrire. Nous avons vu l’emprunt des concepts psychanalytiques d’origine, de chute. Beauchamp emprunte aussi à la philosophie, et en particulier celle de Hegel : sa théorie typologique fait penser au travail hégelien du concept qui établit sa vérité absolue dans, à travers et sous le parcours des figures (de l’Esprit) en histoire ; le parcours ressemble au cercle, dans la mesure où la vérité qui se dit au terme se tenait déjà au commencement.

[30] « Ce qui m’a, plus que tout, mis en mouvement, et même uniquement, c’est de croire que la relecture de l’Ancien Testament est le seul passage qui nous soit ouvert pour dire aujourd’hui l’identité de Jésus Christ telle que notre foi la déclare. » p.15.

[31] Rappelons que l’origine s’entend au delà de ses représentations, les commencements.

[32] « Ce que le cosmos, mais souvent aussi les nations, doivent écouter, en pareil cas, c’est bien le récit d’Israël. » p.244 dans Beauchamp Paul, Le Récit, la Lettre et le Corps, Editions du Cerf, coll. " Cogitatio fidei ", 2ème édition augmentée, Paris, 321 p.

[33] Voir dans ce sens Beauchamp Paul, Le Récit,..,op. cot., p. 299 ; 308.

[34] Col 2,8-10 dans la T.O.B.

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