Le vrai risque, actuellement, ce serait de ne pas prendre de risque. » Fort de cette formule, qu'il a remise au goût du jour, Nicolas Sarkozy joue la rupture en cette fin de mandat : alors qu'on attendait une campagne, fondée sur un projet pour les cinq ans à venir, comme c'est naturel à 100 jours d'une élection présidentielle, le président sortant promet le vote de réformes majeures dans les deux mois à venir.
Cet activisme qui comporte à l'évidence une part de bluff - d'un strict point de vue technique, il est quasiment impossible de faire adopter des réformes avant la vacance du parlement, début mars-, vise bien sûr à faire passer l'adversaire François Hollande pour un candidat inerte et sans propositions. Ou à obliger le socialiste à préciser son programme, pour mieux l'attaquer, sans que le futur candidat Sarkozy ne dévoile pour autant le sien.
Le débat sur la TVA sociale étant médiatiquement lancé, avec tous les risques afférents -peut-on gagner une élection sur la hausse de la TVA ?-, place à la taxe Tobin, frappant les transactions financières. La France "n'attendra pas que tous les autres soient d'accord pour la mettre en oeuvre", a martelé Nicolas Sarkozy, dans un discours prononcé à la veille du week-end. Il y aura "un texte financier en conseil des ministres probablement en février" pour faire passer cette taxe, a précisé dimanche le secrétaire d'État au logement, Benoist Apparu. Ajoutant, histoire de jouer à fond sur le ressentiment des électeurs à l'égard des banquiers : "ce n'est pas parce que les financiers disent non qu'on va les écouter".
Les anglais n'en veulent pas
Angela Merkel, que le président français retrouve ce lundi à Berlin pour un déjeuner de travail, se montre plus que troublée par cette annonce inopinée. Car si l'Allemagne soutient l'idée d'une taxe sur les transactions financières, elle défend le projet conçu par la commission européenne et juge indispensable d'obtenir un consensus au sein de l'UE sur celui-ci, ce qui prendra bien sûr un certain temps. "Il faut commencer par clarifier les positions des uns et des autres", a déclaré le porte parole de la chancelière. On sait les britanniques farouchement opposés à ce projet. "Une taxe sur les transactions que ne serait mise en place qu'en Europe nous coûterait des emplois, nous priverait de revenus fiscaux, nous verrions partir énormément d'organismes financiers", a déclaré dimanche le premier minitre britannique, David Cameron.
Imaginée et théorisée par le prix Nobel James Tobin au début des années 1970 pour lutter contre la spéculation financière à court terme, cette taxe visait initialement les marchés des changes. Aujourd'hui, elle est vue comme beaucoup plus large, frappant la plupart des transactions, autres que les dérivés. Selon un rapport du cabinet 99 Partners, cette taxe pourrait rapporter jusqu'à 12,5 milliards d'euros à la France. Alors que France et Allemagne devraient dévoiler le 23 janvier leurs propositions communes sur l'assiette de cette taxe, la France, encouragée par le ralliement de certains de ses voisins européens à cette cause, comme l'Italie, peut-elle vraiment faire cavalier seul ? Cela paraît difficile, le risque étant grand de fragiliser le rôle de la place financière de Paris.
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