Partie 1 : Manager les hommes = insuffler du sens Le manager est celui qui non seulement doit fixer des objectifs, donner des ordres cohérents mais il est aussi celui qui doit insuffler du sens – et donc exercer son rôle avec un réel sens hiérarchique. Il lui faut exercer ce rôle dans une double dimension : celle qui conduit l’action individuelle et collective vers l’atteinte de résultats (dimension praxéologique) mais aussi celle qui la conduit en prenant en compte les idéaux de ses collaborateurs comme ceux de son organisation (dimension idéologique). Comme l'ont montré les philosophes et les psychosociologues, nous sommes en effet tous guidés par nos idéaux. Chacun de nous donne du sens et de la valeur à certaines croyances et pas à d’autres parce que les croyances auxquelles nous adhérons étayent nos valeurs qui donnent du sens à nos actes.
Selon le dictionnaire historique de la langue française (Le Robert). « hiérarchie » signifie au sens premier « gouvernement des choses sacrés ». Par extension, « hiérarchiser » signifie « classer selon un ordre de valeur ou d’importance ». Ainsi littéralement, le manager « hiérarque » est celui qui sait discerner du sens, de la valeur à ce qui en a et ce qui n’en a pas, tant pour son groupe social d’appartenance que pour les autres groupes. Le manager hiérarque est celui qui dans son management reconnaît le sens et la valeur de ce qui est « sacré » pour chacun des acteurs sociaux. Le manager hiérarque sait mettre chacun en mouvement selon ses idéaux.
Ainsi, certains managers sont plus hiérarques que d’autres, du fait qu’ils savent prendre en compte les idéaux et valeurs d’autrui sans estimer qu’elles valent moins que les leurs. Ils savent tout autant maîtriser le risque d’entrer en conflit avec les idéaux ou valeurs d’autrui – littéralement en conflit « idéologique ». Le manager hiérarque sait mettre en veille (et non en berne) son propre système de valeur pour reconnaître les valeurs d’un groupe d’acteurs sociaux, celles qui les mobilisent dans l’action ou au contraire les figent dans la résistance. Plutôt que de mener ou conduire les individus à l’aune de ses propres idéaux, de sa propre « idéologie », il reconnaît d’abord les autres dans ce qu’ils « vénèrent » le plus parce que c’est ce qui fait sens pour eux, c’est-à-dire leurs idéaux et valeurs sous-jacentes. Le manager hiérarque n’impose pas sa vision, il la partage avec celle d’autrui en identifiant les valeurs communes des différents sous-groupes. Il sait fédérer autrui autour d’une vision commune – qui peut être différente ou complémentaire de sa propre vision personnelle – en phase avec les intérêts et valeur du groupe social de référence et de l’organisation.
Le terme de « hiérarchie » peut alors s’entendre dans un sens tout à fait différent que lui prête habituellement le sens commun, celui « d’ordre et subordination des rangs, des pouvoirs dans une société ». La hiérarchie, pris au sens de « classement selon un ordre de valeur / valeurs », peut s’entendre comme la « hiérarchisation » des managers selon leur degré de sensibilité, plus ou moins élevé ou plus ou moins maîtrisé, à reconnaître les idéaux des collaborateurs, les valeurs des groupes sociaux en présence, le sens sous-jacent à l’action collective. Dit autrement, la hiérarchie et le sens hierarchique ne se déterminent pas selon la largeur des galons des managers mais selon qu’ils donnent du sens ou du non-sens au travail, selon qu'ils sont suffisamment hiérarques ou carrément toxiques. Il y va de la performance de l'organisation, comme nous allons le voir dans le volet qui suit.
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