Pendant plus de dix jours, la guerre Copé-Fillon a fait la une de tous les journaux.
(FRANCETV INFO)
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Si ce feuilleton fait l'ouverture des journaux et éclipse le reste de l'actualité depuis plusieurs jours, c'est peut-être parce que ses protagonistes ont justement pensé à y mettre tous les éléments d'une captivante série télévisée ! Décryptage.
Une entrée en matière tonitruante
Tout a commencé sur une double surprise au soir du vote des militants, dimanche 18 novembre. Alors que les sondages attribuent une popularité triomphale à François Fillon auprès
de l'ensemble des sympathisants UMP, les adhérents du parti font part
d'un tout autre avis. Les scores sont si serrés qu'il faut attendre
4 heures du matin pour que la commission électorale se déclare incapable
de proclamer un résultat dans l'immédiat.En découle la deuxième surprise : sans attendre cette proclamation, Jean-François Copé décide de convoquer à la hâte un point presse pour annoncer lui-même sa victoire avec un millier de voix d'avance. Dans le quart d'heure qui suit, François Fillon contre-attaque et revendique à son tour la présidence de l'UMP grâce à un écart de 224 voix. Dans un message qui ressemble à une déclaration de guerre, l'ancien Premier ministre prévient qu'il "ne laissera pas voler la victoire aux militants". Retransmises en temps réel par les chaînes d'information en continu et par les sites d'actualité, les hostilités sont officiellement ouvertes. Mais qui sera le vainqueur de cet ubuesque affrontement entre les deux prétendants ?
Une famille qui se déchire en public
Pour voir la fin de cette intrigue inattendue, il va falloir être patient. Et se passionner pour un véritable lavage de linge sale en famille,
comme le ferait tout fan de "soap opera" digne de ce nom.
François Fillon restreint ses prises de parole directes à quelques
points presse, et préfère envoyer ses lieutenants au front. Mot
d'ordre : dénoncer, en vrac, "une fracture morale", "un vol", "un putsch médiatique", et même "une mafia".Comme pendant la campagne, Jean-François Copé préfère monter lui-même au front. France 2, BFMTV, Europe 1, RTL, conférence de presse quasi quotidiennes... Il occupe la scène médiatique, et laisse à ses lieutenants le service après-vente. Son message : "Le comportement de François Fillon, c'est l'histoire d'un mauvais perdant, qui vient donner des leçons de morale sans jamais se les appliquer à lui-même." Et le président proclamé et ses proches de dénoncer "des bourrages d'urnes", et "les turpites délibérées de l'entourage zélé" de François Fillon.
Les deux candidats à la présidence de l'UMP, Jean-François Copé et François Fillon, le 18 novembre 2012 à Paris.
(AFP / MONTAGE FTVI)
A chaque jour sa nouvelle intrigue et sa surenchère
Au-delà des noms d'oiseaux, il y a cette surenchère permanente dans l'affrontement
des deux camps. A chaque soir son "cliffhanger" : que se passera-t-il
demain ? Jusqu'où oseront-ils aller ? A chaque fois que le bras de fer
semble trouver un gagnant, celui qui est à la limite de la rupture
parvient à renverser la balance.Copé se déclare vainqueur ? Fillon aussi ! La commission électorale confirme la victoire de Copé ? Fillon récuse les résultats ! Copé dénonce "des allégations qui sortent de nulle part" ? Fillon menace de saisir la justice ! Copé saisit la commission nationale des recours pour sceller sa victoire ? Fillon la juge illégitime et claque la porte ! Juppé propose de jouer les médiateurs ? Copé refuse ! Sarkozy demande que les militants soient consultés pour savoir s'ils veulent un nouveau vote ? Fillon crée un groupe parlementaire dissident à l'Assemblée, et Copé refuse de mettre en place une direction collégiale, comme le réclame son rival !
Pour les médias, ces rebondissements à répétition sont du pain bénit. Les acteurs de la série sont aussi les auteurs de leur propre scénario, et rien ne semble ralentir le rythme effréné de la saga. Que demander de mieux ?
Un dénouement inspiré par la série "Lost" ?
Reste
qu'au bout de douze jours de psychodrame, les spectateurs semblent se
lasser de ce feuilleton tragi-comique. Depuis mercredi midi, sur les
sites d'actualité et dans les chaînes d'info en continu, on constate un
essouflement. Sur les réseaux sociaux, le désintéressement se traduit
par des commentaires de moins en moins nombreux. Sur Twitter, l'UMP a disparu des sujets les plus commentés.Car à mesure que la situation s'enlise, le feuilleton tourne en rond. Ce qu'a résumé Xavier Bertrand dans un coup de colère poussé mercredi matin sur Europe 1 : "Moi, j'en ai marre de ce foutoir !" Alors comment le soap opera va-t-il prendre fin ? Visiblement en eau de boudin. Alors que chaque clan s'arc-boute sur ses positions, Jean-François Copé et son entourage ont assuré que le sujet était clos, que pour eux, la page était tournée. François Fillon semble avoir perdu son combat. Tout ça pour ça.