Pierre-Yves Gomez est docteur en gestion et professeur de management stratégique à l’EM Lyon Business School. Cet économiste de renom nous donne quelques pistes pour atteindre un objectif de vie à la portée de tous.
Vous êtes professeur depuis de nombreuses années dans une des
plus prestigieuses écoles de management en France et vous rencontrez
beaucoup d’étudiants et de managers. Qu'est-ce que pour vous réussir sa
vie professionnelle ?
Pierre-Yves Gomez : "D'abord, je pense que c'est une bonne chose de se poser la question, surtout lorsqu'on est jeune, au moment de son orientation, mais aussi tout au long de sa vie : est-ce que je peux imaginer "réussir ma vie" sans tenir compte de la profession que je vais exercer et du temps que je passe dans mon métier? En sens inverse, est-ce que je suis prêt à réussir professionnellement en échouant dans ma vie privée, ma vie affective, ma vie relationnelle... ?
Je rencontre beaucoup de personnes qui ont des problèmes graves parce qu'elles ne se sont pas assez posé ces questions. Elles se sont laissé aller... elles ont cru qu’on pouvait séparer la vie professionnelle de la vie privée, citoyenne ou d’autres engagements extérieurs. Et, à un moment donné, ça craque ou ça explose. Elles se rendent compte qu'elles ont tout sacrifié à leur boulot ; ou, au contraire, que leur travail ne les intéresse pas ou qu’elles travaillent dans une ambiance déprimante et qu'elles ont perdu leur temps à travailler bêtement pendant des années".
Pierre-Yves Gomez : "D'abord, je pense que c'est une bonne chose de se poser la question, surtout lorsqu'on est jeune, au moment de son orientation, mais aussi tout au long de sa vie : est-ce que je peux imaginer "réussir ma vie" sans tenir compte de la profession que je vais exercer et du temps que je passe dans mon métier? En sens inverse, est-ce que je suis prêt à réussir professionnellement en échouant dans ma vie privée, ma vie affective, ma vie relationnelle... ?
Je rencontre beaucoup de personnes qui ont des problèmes graves parce qu'elles ne se sont pas assez posé ces questions. Elles se sont laissé aller... elles ont cru qu’on pouvait séparer la vie professionnelle de la vie privée, citoyenne ou d’autres engagements extérieurs. Et, à un moment donné, ça craque ou ça explose. Elles se rendent compte qu'elles ont tout sacrifié à leur boulot ; ou, au contraire, que leur travail ne les intéresse pas ou qu’elles travaillent dans une ambiance déprimante et qu'elles ont perdu leur temps à travailler bêtement pendant des années".
"Réussir sa vie pro, oui, mais à condition de ne pas la séparer de la vie tout court"
"On ne se rend pas compte à quel point on peut devenir malheureux à
cause de cela. C'est une expérience que je constate couramment. Il faut
vraiment prendre au sérieux la question de la réussite de la vie
professionnelle.... Mais à condition, bien sûr, de ne pas la séparer de
la vie tout court. Avoir une vie de famille solide, des enfants, des
amis, une vie équilibrée dans laquelle s'intègre le travail, à sa juste
place : voilà l’objectif de vie qui est à la portée de tout le monde."
Mais il n'est pas facile de combiner les aspirations
personnelles avec les obligations de la vie professionnelle qui sont
parfois très dures. Quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui
cherchent un métier ou une orientation ?
P-Y Gomez : "Le premier conseil est de miser sur ses talents. Tout le monde a du talent. Tout le monde sait faire quelque chose un peu mieux que les autres. Il faut vraiment partir de là, se poser la question : "qu'est-ce que j'aime bien faire ?" ou "qu'est-ce que j'aimerais savoir bien faire ?". Le désir est très important. On ne réussit pas professionnellement s'il n'y a pas un désir de bien faire qui nous anime. On peut travailler toute sa vie pour s'améliorer, mais si on n'est pas animé par un désir, on peine, on en bave, on n’est pas heureux. Alors, il faut aller chercher ses talents…
Un jeune me disait : "c'est bien gentil mais moi ce que je sais bien faire c’est jouer de la guitare avec mes copains. Alors je ne vois pas bien ce que je pourrais faire professionnellement !" Je lui ai répondu : "Évidemment, sauf à devenir guitariste professionnel, pourquoi pas, mais c’est plutôt dur… Mais as-tu réfléchi aux talents que tu exerces quand tu joues de la guitare avec tes copains ? Il n'y a pas que la musique qui est en jeu, il y a aussi ta capacité à travailler avec d'autres, à te coordonner avec eux, à organiser pour eux, à régler les conflits entre vous… Il faut aller un peu plus loin que ta musique et prendre conscience que tu sais faire beaucoup plus de choses que tu ne le penses. Et ces compétences, tu peux les mettre au service de ta vie professionnelle. Sors un peu de ton cadre et regarde-toi : tu es déjà plus talentueux qu'un simple guitariste !"
P-Y Gomez : "Le premier conseil est de miser sur ses talents. Tout le monde a du talent. Tout le monde sait faire quelque chose un peu mieux que les autres. Il faut vraiment partir de là, se poser la question : "qu'est-ce que j'aime bien faire ?" ou "qu'est-ce que j'aimerais savoir bien faire ?". Le désir est très important. On ne réussit pas professionnellement s'il n'y a pas un désir de bien faire qui nous anime. On peut travailler toute sa vie pour s'améliorer, mais si on n'est pas animé par un désir, on peine, on en bave, on n’est pas heureux. Alors, il faut aller chercher ses talents…
Un jeune me disait : "c'est bien gentil mais moi ce que je sais bien faire c’est jouer de la guitare avec mes copains. Alors je ne vois pas bien ce que je pourrais faire professionnellement !" Je lui ai répondu : "Évidemment, sauf à devenir guitariste professionnel, pourquoi pas, mais c’est plutôt dur… Mais as-tu réfléchi aux talents que tu exerces quand tu joues de la guitare avec tes copains ? Il n'y a pas que la musique qui est en jeu, il y a aussi ta capacité à travailler avec d'autres, à te coordonner avec eux, à organiser pour eux, à régler les conflits entre vous… Il faut aller un peu plus loin que ta musique et prendre conscience que tu sais faire beaucoup plus de choses que tu ne le penses. Et ces compétences, tu peux les mettre au service de ta vie professionnelle. Sors un peu de ton cadre et regarde-toi : tu es déjà plus talentueux qu'un simple guitariste !"
"Ce qui compte, c'est l'envie de faire quelque chose, d’être utile"
Au concours d'entrée de mon Ecole, je constate qu'il y a souvent
des jeunes qui seront de bons managers parce qu'ils ont déjà fait des
choses très précieuses avec d'autres, même si elles n'ont rien à voir
avec l'entreprise : monter un groupe de musique ou de théâtre, organiser
des voyages, s’investir dans un organisme ou une association, etc.
Soyez donc généreux avec vous-mêmes et regardez-vous au-delà de ce que
vous croyez savoir faire. En exploitant vos talents, vous allez
apprendre plein de choses nouvelles."
Mais on n'est pas seul ! Il y a de la concurrence, des gens qui réussissent mieux que nous, qui sont plus talentueux, plus doués… c'est parfois perturbant, notamment lorsqu'on a l'impression de réussir moins bien, scolairement compris.
P-Y Gomez : "Il ne faut pas trop exagérer les résultats scolaires que l'on obtient à un moment de sa vie. Ce qui compte, je le répète, c'est l'envie de faire quelque chose, de s'épanouir, de se réaliser dans sa vie professionnelle comme dans sa vie privée. Le travail fait partie de notre vie, il ne doit pas empêcher la vie privée et affective, il doit s'harmoniser avec elle. S'il y en a qui sont meilleurs, tant mieux ! Ce qui compte c'est que je sois bon dans ce que j’ai à faire. Un point c'est tout.
Et puis, on ne sait pas toujours très bien ce qui nous attend dans la vie professionnelle. C’est difficile de faire un choix.
P-Y Gomez : "Bien sûr, on ne sait pas toujours à quoi va correspondre un métier, une activité professionnelle future. C'est vrai lorsqu'on est jeune au moment de l'orientation, mais c'est vrai aussi tout au long de la vie ! Les métiers changent, les postes changent, les entreprises bougent ! On voudrait que toutes les choses soient claires, entrer dans une case et se laisser aller.... Mais non, ce n’est pas comme cela que ça marche ! Même pour des gens très expérimentés, ça bouge, ça évolue… Il faut s’adapter.
C’est pourquoi, ce qui compte, c'est d'abord l’envie de faire des choses, de s'améliorer, d’être utile. Un candidat au concours d’entrée qui explique au jury, aujourd'hui, ce qu'il veut faire vingt ans plus tard dans une entreprise, alors que nous savons très bien qu'il ne connaît rien à la vie professionnelle, n'est pas un bon candidat. En revanche, celui qui témoigne de curiosité, de talents même modestes et surtout du goût des autres, celui-là est un bon candidat : on sait qu'il s'adaptera à toutes les situations professionnelles."
Mais on n'est pas seul ! Il y a de la concurrence, des gens qui réussissent mieux que nous, qui sont plus talentueux, plus doués… c'est parfois perturbant, notamment lorsqu'on a l'impression de réussir moins bien, scolairement compris.
P-Y Gomez : "Il ne faut pas trop exagérer les résultats scolaires que l'on obtient à un moment de sa vie. Ce qui compte, je le répète, c'est l'envie de faire quelque chose, de s'épanouir, de se réaliser dans sa vie professionnelle comme dans sa vie privée. Le travail fait partie de notre vie, il ne doit pas empêcher la vie privée et affective, il doit s'harmoniser avec elle. S'il y en a qui sont meilleurs, tant mieux ! Ce qui compte c'est que je sois bon dans ce que j’ai à faire. Un point c'est tout.
Et puis, on ne sait pas toujours très bien ce qui nous attend dans la vie professionnelle. C’est difficile de faire un choix.
P-Y Gomez : "Bien sûr, on ne sait pas toujours à quoi va correspondre un métier, une activité professionnelle future. C'est vrai lorsqu'on est jeune au moment de l'orientation, mais c'est vrai aussi tout au long de la vie ! Les métiers changent, les postes changent, les entreprises bougent ! On voudrait que toutes les choses soient claires, entrer dans une case et se laisser aller.... Mais non, ce n’est pas comme cela que ça marche ! Même pour des gens très expérimentés, ça bouge, ça évolue… Il faut s’adapter.
C’est pourquoi, ce qui compte, c'est d'abord l’envie de faire des choses, de s'améliorer, d’être utile. Un candidat au concours d’entrée qui explique au jury, aujourd'hui, ce qu'il veut faire vingt ans plus tard dans une entreprise, alors que nous savons très bien qu'il ne connaît rien à la vie professionnelle, n'est pas un bon candidat. En revanche, celui qui témoigne de curiosité, de talents même modestes et surtout du goût des autres, celui-là est un bon candidat : on sait qu'il s'adaptera à toutes les situations professionnelles."
Que voulez-vous dire par "le goût des autres"?
P-Y Gomez : "Ça c'est le grand secret et c'est mon deuxième conseil. On ne fait rien de bon dans la vie, surtout professionnellement, si on ne s'intéresse pas aux autres, si on ne se sent pas utile pour eux. Je dis toujours aux jeunes, comme aux plus expérimentés : posez-vous la question : « à qui je veux être utile?". C'est vraiment un moyen infaillible pour réussir sa vie professionnelle. Vous ne pouvez pas vous épanouir personnellement et devenir très compétent si vous ne vous demandez pas à qui cet épanouissement et cette compétence sont utiles. Sinon, vous finirez par échouer. À un moment donné de votre vie, vous serez forcé d'admettre que tout cela ne sert à rien, que votre compétence et votre épanouissement n’intéressent personne.
P-Y Gomez : "Ça c'est le grand secret et c'est mon deuxième conseil. On ne fait rien de bon dans la vie, surtout professionnellement, si on ne s'intéresse pas aux autres, si on ne se sent pas utile pour eux. Je dis toujours aux jeunes, comme aux plus expérimentés : posez-vous la question : « à qui je veux être utile?". C'est vraiment un moyen infaillible pour réussir sa vie professionnelle. Vous ne pouvez pas vous épanouir personnellement et devenir très compétent si vous ne vous demandez pas à qui cet épanouissement et cette compétence sont utiles. Sinon, vous finirez par échouer. À un moment donné de votre vie, vous serez forcé d'admettre que tout cela ne sert à rien, que votre compétence et votre épanouissement n’intéressent personne.
''Réussir tout seul dans son coin, c'est la mort''
Inversement, quelle satisfaction lorsque vous vous rendez compte
que votre travail sert aux autres et qu’ils vous en sont reconnaissants !
Le grand drame de certains aujourd'hui, c'est qu'ils croient pouvoir
définir leur vie sans tenir compte des autres, de l'utilité qu’ils
peuvent avoir pour les autres. C’est un drame, croyez-moi ! J’en
rencontre pas mal qui, à 30, à 40 ans craquent soudain alors que leur
vie professionnelle est plutôt réussie en apparence. Mais ils ont le
sentiment qu’ils ne servent à rien. L'homme est fait pour être en
relation avec les autres. Réussir tout seul dans son coin, c'est la
mort. En revanche, se sentir utile crée un vrai sentiment de bonheur.
Tout le monde a expérimenté cela un jour dans sa vie... Eh bien c'est
vrai aussi pour le travail. Gardez donc toujours à l'esprit cette
question : « à qui je veux être utile ? ». C'est ça le goût des autres."
Souvent les jeunes disent qu'ils sont assez seuls au moment de prendre des décisions sur leurs orientations professionnelles.
P-Y Gomez : "Mon expérience est plutôt l'inverse. Je vois pas mal de candidats qui ne se sont jamais posé personnellement la question de leur orientation. Ils essaient d'entrer dans une grande école de management parce que ça fait bien, parce que leurs parents leur ont dit que c'était bien ou bien parce qu'ils ne savaient pas trop quoi faire. Il y en a même qui disent : "je n'ai pas pu être médecin, ni ingénieur, alors j'ai décidé de faire du management." Ils sont sûrs de ne pas entrer dans mon École avec une telle phrase ! Vous imaginez, on va former, pendant des années, des managers qui seront des responsables parfois importants et ils ne se sont jamais posé la question de leur future responsabilité, du pouvoir qu’ils vont exercer sur les autres ? Ils ne s'occupent que d’eux-mêmes et ils prétendent vouloir un jour diriger les autres ! Inutile de les retenir !"
Souvent les jeunes disent qu'ils sont assez seuls au moment de prendre des décisions sur leurs orientations professionnelles.
P-Y Gomez : "Mon expérience est plutôt l'inverse. Je vois pas mal de candidats qui ne se sont jamais posé personnellement la question de leur orientation. Ils essaient d'entrer dans une grande école de management parce que ça fait bien, parce que leurs parents leur ont dit que c'était bien ou bien parce qu'ils ne savaient pas trop quoi faire. Il y en a même qui disent : "je n'ai pas pu être médecin, ni ingénieur, alors j'ai décidé de faire du management." Ils sont sûrs de ne pas entrer dans mon École avec une telle phrase ! Vous imaginez, on va former, pendant des années, des managers qui seront des responsables parfois importants et ils ne se sont jamais posé la question de leur future responsabilité, du pouvoir qu’ils vont exercer sur les autres ? Ils ne s'occupent que d’eux-mêmes et ils prétendent vouloir un jour diriger les autres ! Inutile de les retenir !"
"Soyez généreux et vous serez de meilleurs professionnels..."
Vous savez, il y a une qualité qui ne trompe pas lorsqu'on
sélectionne les candidats, c'est leur générosité. Un candidat peut
n'avoir aucune expérience professionnelle en entreprise, mais s’il se
montre généreux, c'est déjà à moitié gagné. La générosité est une sorte
de sésame. C'est vrai pour tous les métiers et tous les niveaux. Je
connais le patron d'une petite entreprise de maçonnerie qui avait à
choisir entre deux apprentis. Eh bien, il a pris celui qui était le
moins expérimenté mais le plus généreux des deux. Il m’a dit que, pour
lui, ce n'était pas difficile d'apprendre à bien travailler. En
revanche, c'était très difficile d'apprendre la générosité. Et il faut
de la générosité pour faire un bon travail ! Elle est vraiment
indispensable pour bien travailler avec les autres. Cela veut dire qu'on
est prêt à passer un peu de temps pour les aider, pour les seconder ou
pour les soutenir ; on est aussi prêt à se dépasser, à dépasser nos
petites préoccupations personnelles. Pour un chef d’entreprise, cela
vaut parfois mille formations ! Alors lâchez-vous, soyez généreux et
vous serez de meilleurs professionnels."
Vous avez dit qu’il y a un équilibre entre vie privée, vie affective et vie professionnelle. Comment trouver cet équilibre ?
P-Y Gomez : "Évidemment, il n'y a pas de loi générale. Cela dépend des personnes et de leur capacité à gérer des activités multiples. Mais ce qui est vrai pour tout le monde, c’est que cet équilibre est indispensable. Et qu’il faut le trouver. Personne ne résiste à une vie déséquilibrée. Tôt ou tard, ça explose. Aujourd'hui, les entreprises se posent sérieusement la question de l'équilibre de vie de leurs salariés. On s'est rendu compte, par exemple, que des cadres qui avaient échoué dans leur vie familiale n'avaient pas de vie professionnelle très longue. Ils compensent leur manque d'affection par l'excès de travail et finissent par s'effondrer. Ou bien ils travaillent trop et de façon désordonnée, au point de détruire leur vie familiale… et, effet boomerang, ils finissent par se détruire eux-mêmes ! C'est devenu un vrai problème pour les entreprises. Le Medef, par exemple, a créé une commission spéciale pour travailler sur cette question.
Ce n’est donc pas seulement une question personnelle. La stabilité des relations familiales et affectives est beaucoup plus importante qu'on le croyait, y compris pour réussir sa vie professionnelle. Donc vous voyez, il n'y a pas à choisir entre l'un et l'autre. Celui qui réussit sa vie c'est celui qui réussit à équilibrer sa vie familiale et son travail : il développe ses talents, il se sent utile, il agit avec générosité. Cela vaut pour son travail comme pour sa famille."
Pour finir, beaucoup de jeunes se posent la question des meilleurs débouchés. Est-ce que vous avez des conseils sur les métiers d'avenir ?
P-Y Gomez : "Il faut toujours faire très attention à ce genre de conseil. Je connais des tas de gens qui ont choisi des débouchés rares mais qui y ont réussi parce que c'était leur voie. En revanche, c'est un peu absurde de choisir un métier uniquement parce qu'il y a beaucoup de débouchés ! Je préfère raisonner en termes d'utilité. Qu'est-ce qui sera utile aux autres dans l'avenir? Là, ça ouvre beaucoup plus de perspectives ! Les services à la personne, mais aussi les métiers du bâtiment vont manquer de personnel. Il en est de même pour la médecine et l'enseignement, notamment l’enseignement supérieur. Bien sûr, les problèmes d'écologie commencent à créer aussi beaucoup de nouveaux métiers autour de «l'économie verte ». Il est bon de s'intéresser à cela, notamment si on se dirige vers une carrière de management. Comment prendre en compte l'impact sur l'environnement des produits ou des services ? Dans l'entreprise, on aura aussi besoin de repenser l'organisation du travail et une nouvelle façon de concevoir les ressources humaines, parce que la population va vieillir et qu'on va travailler plus longtemps...
P-Y Gomez : "Évidemment, il n'y a pas de loi générale. Cela dépend des personnes et de leur capacité à gérer des activités multiples. Mais ce qui est vrai pour tout le monde, c’est que cet équilibre est indispensable. Et qu’il faut le trouver. Personne ne résiste à une vie déséquilibrée. Tôt ou tard, ça explose. Aujourd'hui, les entreprises se posent sérieusement la question de l'équilibre de vie de leurs salariés. On s'est rendu compte, par exemple, que des cadres qui avaient échoué dans leur vie familiale n'avaient pas de vie professionnelle très longue. Ils compensent leur manque d'affection par l'excès de travail et finissent par s'effondrer. Ou bien ils travaillent trop et de façon désordonnée, au point de détruire leur vie familiale… et, effet boomerang, ils finissent par se détruire eux-mêmes ! C'est devenu un vrai problème pour les entreprises. Le Medef, par exemple, a créé une commission spéciale pour travailler sur cette question.
Ce n’est donc pas seulement une question personnelle. La stabilité des relations familiales et affectives est beaucoup plus importante qu'on le croyait, y compris pour réussir sa vie professionnelle. Donc vous voyez, il n'y a pas à choisir entre l'un et l'autre. Celui qui réussit sa vie c'est celui qui réussit à équilibrer sa vie familiale et son travail : il développe ses talents, il se sent utile, il agit avec générosité. Cela vaut pour son travail comme pour sa famille."
Pour finir, beaucoup de jeunes se posent la question des meilleurs débouchés. Est-ce que vous avez des conseils sur les métiers d'avenir ?
P-Y Gomez : "Il faut toujours faire très attention à ce genre de conseil. Je connais des tas de gens qui ont choisi des débouchés rares mais qui y ont réussi parce que c'était leur voie. En revanche, c'est un peu absurde de choisir un métier uniquement parce qu'il y a beaucoup de débouchés ! Je préfère raisonner en termes d'utilité. Qu'est-ce qui sera utile aux autres dans l'avenir? Là, ça ouvre beaucoup plus de perspectives ! Les services à la personne, mais aussi les métiers du bâtiment vont manquer de personnel. Il en est de même pour la médecine et l'enseignement, notamment l’enseignement supérieur. Bien sûr, les problèmes d'écologie commencent à créer aussi beaucoup de nouveaux métiers autour de «l'économie verte ». Il est bon de s'intéresser à cela, notamment si on se dirige vers une carrière de management. Comment prendre en compte l'impact sur l'environnement des produits ou des services ? Dans l'entreprise, on aura aussi besoin de repenser l'organisation du travail et une nouvelle façon de concevoir les ressources humaines, parce que la population va vieillir et qu'on va travailler plus longtemps...
"Ne vous focalisez pas sur des techniques, restez attentifs à la société, aux besoins qui vont naître"
Vous voyez, plutôt que de raisonner sur de grands secteurs
d'activité supposés embaucher, il faut raisonner sur les services futurs
dont on aura besoin. Ils vont beaucoup tourner autour de la personne
humaine parce que notre société va connaître de grands changements
démographiques dans les vingt prochaines années. Je dirais donc à des
jeunes qui veulent s'orienter : ne vous focalisez pas sur des
techniques, restez attentifs à la société, à son évolution et aux
besoins qui vont naître dans les années futures. Ne vous enfermez pas
dans une technique qui sera, tôt ou tard, démodée. Apprenez plutôt
l’utilité d’une technique, à quoi elle sert. Si vous maîtrisez bien
cela, vous serez toujours compétents. Et puis soyez flexibles, curieux,
généreux !"
Pierre-Yves Gomez est
économiste, docteur en gestion, professeur de management stratégique à
l'Ecole de Management EM/Lyon business School. Spécialiste du
gouvernement des entreprises [corporate governance], il est également directeur de l'Institut français de gouvernement des entreprises.]b Il est auteur de plusieurs ouvrages.
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