dimanche 15 avril 2012

Comment en finir avec Mélenchon ?

"L’Express, se demande comment en finir avec Mélenchon ? Et bien ce n’est pas possible !"

Lors de son discours du Prado à Marseille samedi 14 avril, Jean-Luc Mélenchon a alterné critique des médias et compassion envers les journalistes qui y travaillent. Il a notamment visé l’Express, "le plus extrémiste des hebdomadaires" citant un éditorial de Christophe Barbier titré "Pour en finir avec Mélenchon ?" Ce n’est pas possible", a répondu à la tribune le candidat en désignant les milliers de personnes rassemblées sur les plages du Prado.


Pour en finir avec Mélenchon

Jean-Luc Mélenchon

AFP PHOTO PATRICK KOVARIK

Verbe haut et idées courtes, mi-tribun, mi-guignol, le candidat du front de gauche, Jean-Luc Mélenchon, monte dans les sondages.

Dans les salons bourgeois comme dans les cours d'usines - et d'ailleurs plus dans les salons que dans les usines -, la mode est au mélenchonisme. Sarkozy fatigue par son trop-plein et Hollande ennuie par son trop-vide, Le Pen demeure infréquentable sous le vernis du prénom, et la campagne de Bayrou ressemble à la tournée d'adieux d'un chanteur familier: le neuf, c'est Mélenchon ! Le printemps approche, la couleur de saison est le rouge, les idées se portent courtes et le verbe haut, voici le temps du nouveau Che.

Il y a en Jean-Luc Mélenchon des contrastes vivifiants, un mélange de folklore tribunicien, de bolchevisme light et de juste colère. Mélenchon plaît parce qu'il est la bouche fumante du mécontentement social, parce qu'il y a en lui de la légitimité populaire et un air, si français, de barricades. Le succès dans les sondages de ce candidat furibard, c'est l'annonce, aussi, des conflits et des tensions qui déchireront à coup sûr la France dès après l'élection présidentielle, au plus tard à l'automne. Mélenchon est, posé au sommet du débat public, ce que la petite soupape chuintante est sur le couvercle de la Cocotte-Minute: son bruit rassure et amuse, mais il peut aussi annoncer l'explosion...

Républicain irréprochable, laïcard intransigeant et patriote lyrique, Jean-Luc Mélenchon a gagné l'estime de ses concitoyens. En revanche, candidat du système, nourri aux fromages de tous les mandats et au gâteau du carriérisme politicard, il suscite l'ironie quand il part à l'assaut du monde auquel il appartient: Mélenchon, c'est un peu un meunier déguisé en Don Quichotte. Enfin, il ne mérite aucune indulgence quand il se vautre dans l'invective et dans l'injure. Même s'il aboie sans jamais mordre, car sa prudence parle plus fort que son courage, il est impardonnable et ridicule quand il s'affuble d'un masque de pitbull.

Jean-Luc Mélenchon aime les effets de manches, y compris les manches de pioche, mais le plus grave est ailleurs: son idéologie, trotsko-marxo-protecto-nationaliste, pourrait bien polluer l'éventuel quinquennat de François Hollande. En effet, si la prime au méchant vaut à Mélenchon de créer la surprise dans les urnes, le nouveau président devra faire avec. Déjà handicapé par un programme imprécis et mal financé, le socialisme de gestion serait alors pris en otage sur sa gauche. Car Mélenchon, ténor les meilleurs jours et guignol les pires, a déjà réussi un exploit: ressusciter le Parti communiste. Le communisme mordu par Mélenchon, c'est un peu comme un vieux dragon qui aurait attrapé la dengue - ou la rage: il s'agite sans grande cohérence, mais crache à nouveau du feu. Pas assez pour incendier ce palais d'hiver qu'est la France, mais suffisamment pour faire bouillir l'eau tiède du PS.

Quand une présidentielle se résume à un duel ennuyeux, on cherche le troisième homme. Quand les débats de fond déçoivent, on se console avec le spectacle. Quand la gauche de gouvernement fuit le risque dans les idées et la précision dans les programmes, la gauche de protestation se régale. Le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon s'appelle François Hollande.

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