Numéro deux du réseau social et cinquième femme la plus influente du monde selon "Forbes", cette mère de famille invite les femmes à se prendre en main.
C'est une mère capable de rater un dîner d'affaires pour traiter les têtes pleines de poux de ses chérubins. C'est aussi la directrice d'exploitation de Facebook, qui a remis de l'ordre dans l'entreprise. Et une femme qui a fait de son mot d'ordre un livre qui passionne l'Amérique, "En avant toutes" (dont elle a vendu plus de 300.000 exemplaires). Il a des défauts, mais une qualité : son auteur ne se la joue pas.Sheryl Sandberg a 43 ans et un CV en or : diplômée de Harvard et de la Harvard Business School (première de sa promotion), elle est à 29 ans directrice de cabinet du secrétaire du Trésor puis devient vice-présidente de Google. En 2008, Mark Zuckerberg la fait "mécano de la General" chez Facebook. A la fac, elle fait partie de la fraternité d'élite Phi Beta Kappa ; en 2005, elle est invitée au "sommet des femmes les plus puissantes" organisé par "Fortune" ; en 2011, elle est 5e de la liste de "Forbes" des "100 femmes les plus influentes du monde".
Le label féministe
Le genre tête à claques ? "Elle ne se contente pas de mener une carrière exemplaire et d'être une mère aimante avec ses deux jeunes enfants, relève Clara Shih, PDG de la start-up Hearsay Social. Elle fera tout pour aider les autres." Entendez les femmes. Elle raconte :A l'université, j'aurais nié avec la plus grande fermeté être une féministe sous quelque forme que ce fût. Et aucune de mes copines de fac ne se voyait non plus comme féministe. Nous pensions à tort qu'il ne restait plus rien à combattre. Aujourd'hui, je revendique fièrement le label de féministe."
Son cri du coeur est celui d'une révolution inachevée. Acte I, l'éducation supérieure. A l'université, les Américaines sont désormais plus nombreuses que les hommes, raflent 60% des masters, 51% des doctorats, 48% des diplômes de médecine, 47% de ceux de droit. Acte II, la vie active. Elles sont toujours aussi peu nombreuses à atteindre les sommets de l'entreprise. Sur les 500 plus grandes sociétés, 479 sont dirigées par des hommes. Les femmes occupent 14% des postes de direction et 17% des sièges de conseil d'administration.Le "syndrome de l'imposteur"
Bref, "les hommes dirigent toujours le monde", résume Sandberg. La domination masculine est partout au travail. Dans ces salaires que les femmes négocient moins agressivement, ces mains qu'elles lèvent moins dans les réunions. Les femmes souffrent du "syndrome de l'imposteur", d'un "fossé dans l'ambition du leadership", explique-t-elle.Son livre s'en tient, hélas, à une explication "individuelle" du retard des femmes : "Elle sous-estime gravement le facteur sociétal. A la lire, on a l'impression qu'il suffit de "réparer les femmes" plutôt que le système", critique Lotte Bailyn, professeur au Massachusetts Institute of Technology. En 2012, Anne-Marie Slaughter, proche de l'ex-secrétaire d'Etat du président Obama, Hillary Clinton, avait créé un électrochoc en expliquant pourquoi elle avait quitté le Département d'Etat en 2011. "Combiner un job gouvernemental de haut niveau avec les besoins de [mes] deux garçons adolescents n'était pas possible." Slaughter lui reproche d'avoir "choisi de se concentrer sur les obstacles 'internes'".
Liberté de choix et fortune
Sandberg effleure bien les responsabilités de la société américaine - le stress des salariés, les horaires de travail, le manque d'aides à l'harmonisation des vies familiale et professionnelle. Elle relève que seulement cinq Etats garantissent un paiement des congés de maternité, 40% des salariées ne peuvent prendre ni congés maladie ni congés payés, 50% n'ont pas droit à un arrêt de travail pour s'occuper d'un enfant malade. Sheryl Sandberg cite des chiffres, mais ne place pas cette réalité au coeur du débat.Sa légèreté est d'autant moins pardonnable que des millions d'Américaines n'ont ni sa liberté de choix ni sa fortune. Ni celles de Marissa Mayer, PDG de Yahoo !, encensée par Sandberg, qui s'est payé une garderie privée pour son bébé avant d'interdire à ses salariés de travailler à la maison. "En avant toutes" est donc un slogan qui s'appliquerait parfaitement aux entreprises américaines.
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