La commande de jeudi, par l'armateur MSC, consolide le renflouement de la
navale nazairienne, après une période de gros temps. Une sortie de crise
entamée à Noël 2012 avec le bien nommé Oasis.
Une bouffée d'oxygène providentielle pour une entreprise au bord de l'asphyxie, au point que beaucoup craignent pour son avenir malgré la présence de l'État au capital (33 %). À l'époque, la commande la plus récente date de janvier 2011.
Le mirage des « Viking »
Entre ces deux contrats, c'est l'attente, interminable, ponctuée d'une menace de chômage partiel qui finira à terme par concerner plusieurs centaines de salariés. Et d'un énorme coup de massue : en décembre 2011, le norvégien Viking ocean cruises confie à STX la construction de deux navires de luxe... pour se rétracter quelques mois plus tard, puis se tourner vers l'italien Fincantieri. Un mirage dans le désert.Car si Saint-Nazaire peine à remplir son carnet de commandes, les concurrents européens, eux, surfent allègrement sur un marché de la croisière en bonne santé. Où la différence se joue-t-elle ? Une chose est sûre, le contrat Viking a achoppé sur l'incapacité française à monter un plan de financement. L'État est alors clairement montré du doigt.
C'est donc peu dire que l'Oasis de Noël 2012 soulage les esprits, d'autant que Bercy a, cette fois-ci, joué un rôle prépondérant. Mais tout n'est pas réglé pour autant, loin de là. Le temps que la construction démarre, en septembre 2013, le chômage partiel a continué de produire ses effets et plusieurs sous-traitants ont mis la clé sous la porte.
Et puis un seul paquebot n'a jamais rempli toutes les bassins de Penhoët, comme à l'époque faste et révolue du Queen Mary 2, au début des années 2000, avant la décrue... Pour tenter d'enclencher un nouveau cycle vertueux, il fallait donc consolider le plan de charge. C'est fait avec la double commande d'hier. Davantage qu'avec celles, récentes, des ferries de la BAI et surtout de la fragile SNCM.
L'idéal serait que, de surcroît, se confirme tout prochainement l'option d'un nouveau géant Oasis. STX a encore de l'appétit et de la place dans ses cales.
Un contrat, deux navires, trois ans de négos
Décrocher une commande de paquebots est rarement chose simple. Celle-ci n'a pas fait exception à la règle : les chantiers ont débuté leurs discussions avec MSC il y a trois ans ! « Il y a eu des hauts et des bas, des moments actifs et d'autres moins », confiait hier soir Laurent Castaing.Pourquoi une si longue négociation ? Parce que décrocher un tel financement, malgré les garanties et les conseils de Bercy, nécessite de convaincre des banques, plus frileuses depuis la crise. Et parce que la concurrence marchait à plein : les propositions de STX subissaient les contre-propositions des concurrents. Résultat : les bureaux d'études ont planché sur douze moutures différentes du projet ! « L'offre de Fincantieri était agressive, résume le directeur général des chantiers, évoquant le chantier italien. Mais on avait de l'avance sur le plan technique. C'est grâce à cela, au prix proposé et au financement bouclé, que nous avons pu y arriver. »
Mais le suspense aura duré jusqu'au bout. « Dans le TGV pour Paris, on discutait encore de quelques ajustements », raconte Laurent Castaing. La petite histoire retiendra que l'ultime e-mail a été envoyé à 20 h 50, mercredi, entre les deux parties.
La grande histoire se souviendra de la signature de ces deux partenaires qui se connaissent si bien. Et qui se retrouveront à nouveau à la table des négociations, puisque la lettre d'intention signée hier prévoit deux paquebots en option, en plus des deux fermement commandés.
Une option qui sera ou non confirmée un peu avant la livraison du premier navire, au premier semestre 2017. « MSC commande toujours ses paquebots par quatre », note en forme de bon présage Laurent Castaing. Il faut dire qu'avec cette option, STX espère gagner de l'argent. Alors qu'avec la commande d'hier, les chantiers rentrent simplement dans leur frais.
MSC Croisière, l'armateur fidèle à Saint-Nazaire
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Avant l'annonce d'hier, l'armateur Mediterranean shipping compagny (MSC Cruises) avait déjà commandé dix paquebots aux chantiers navals français entre 2003 et 2013. Soit un paquebot livré en moyenne chaque année ! En 2008, trois paquebots MSC affichaient en même temps leur silhouette dans le paysage de la ville. Ce nouveau contrat signé jeudi confirme cette fidélité à la navale nazairienne, alors que le chantier concurrent italien Fincantieri avait de gros espoirs de s'imposer. Il espérait même, à tort, que la compagnie italo-suisse jouerait la carte nationale.Même s'il est un client exigeant et dur en affaire, l'armateur MSC est en effet un partenaire prisé, car en bonne santé économique. La compagnie a connu 15 % de croissance en 2013 et a des objectifs prometteurs pour 2014. Son chiffre d'affaires a connu une progression trois fois supérieure à la moyenne du secteur depuis 2008. En 2013, elle a transporté 150 000 passagers français contre 130 000 en 2012, soit une hausse de 15 %.
Son directeur pour la France, Erminio Eschena, a réaffirmé, en décembre, la volonté du groupe d'investir durablement en France dans le marché de la croisière en investissant dans un nouveau siège à Montrouge (Hauts-de-Seine), faisant passer le nombre d'employés au siège de 32 à 104.
MSC est la 3e compagnie de croisières la plus importante au monde avec 15 500 employés répartis dans 45 pays. En 2014, les douze navires de la flotte à la pointe de la technologie accueilleront près de 1,7 million de passagers dans le monde. Dont 170 000 Français.
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