LE CERCLE. Dans un contexte où le secteur de la sécurité privée va certainement connaître prochainement sa plus grande réforme législative depuis trente ans, on peut se demander s’il n’est pas surprenant pour l’heure qu’il n’y ait aucune mention de l’intelligence économique dans le projet de loi ? N’y a-t-il pas une convergence d’intérêt entre le monde de l’intelligence économique et de la sécurité ?
En 2007, Serenus Conseil, l'un des leaders français de
l'intelligence économique avait décidé de s’associer à la création d’une
entreprise de la sécurité, Amarante. Le leitmotiv à l’époque : « assurer aux entreprises le même niveau de prestations que celui offert à l'État par ses meilleurs spécialistes
». Amarante visait ainsi un positionnement haut de gamme pour la
protection du patrimoine des entreprises dans les zones sensibles en
fournissant en amont du conseil, de l’audit et de la formation. Certains
acteurs de la profession jugeaient à l’époque que ce type de
rapprochement avait du sens et que la maturité du secteur allait
entrainer une multiplication des opérations de ce genre ... mais il
faudra attendre sept ans pour voir un nouveau rapprochement notable
entre des acteurs de la sécurité et de l’intelligence économique, à
savoir le rapprochement entre Risk&Co et Epsilon (rapprochement
finalisé en janvier 2014).
Je suis pour ma part convaincu que nous allons assister à une accélération des rapprochements entre ces deux secteurs d’activités qui jusque là s’ignoraient, voire se méprisaient, les experts de l’intelligence économique considérant qu’ils participaient à la stratégie de l’entreprise, tandis qu’ils voyaient bien souvent les experts de la sécurité comme de simples techniciens. A l’inverse, les experts es sécurité considéraient que l’intelligence économique était un concept « flou » et par conséquent sans grande utilité. Naturellement les choses changent et ce pour trois raisons.
Premièrement, les entreprises ne peuvent plus raisonner stratégie sans prendre en compte simultanément les questions de sécurité. Le développement à l’international, question souvent primordiale pour la survie de nos entreprises, ne peut se faire qu’en ayant parallèlement en tête les questions de protection des personnes, des infrastructures et des informations sensibles. Il serait plus qu’hasardeux à la fois pour la protection des personnes en mobilité mais également pour la pérennité des investissements réalisés à l’étranger de considérer qu’il est possible de faire du business à l’international sans mettre en place une politique de sécurité d’envergure. Or l’accompagnement à l’international qui était au départ dans le giron de l’intelligence économique ou de la direction de la stratégie rentre progressivement dans le périmètre de responsabilité de la direction sécurité. Avec un corollaire : de plus en plus souvent les directions sécurité traitent elles-mêmes certains aspects de l’intelligence économique. Par conséquent, si les cabinets d’intelligence économique ne veulent pas disparaître, ils doivent s’associer avec des experts de la sécurité. Et ce n’est sans doute pas un hasard si l’ADIT, leader de l’intelligence économique en France, a confié à Jean-Pierre Vuillerme, l’un des directeurs de sécurité les plus reconnus de la place de Paris (ancien directeur de la sécurité du groupe Michelin), la création et l’animation d’un pôle « Management des Risques » !
Deuxièmement, en s’associant, l’intelligence économique et la sécurité peuvent naturellement devenir des opérateurs crédibles aux yeux des multinationales qui recourent surtout aujourd’hui à des prestataires de sécurité anglo-saxons, acteurs globaux de la sécurité puisque proposant des services aussi divers que des due diligence, de la protection de personnalités ou encore assurant la protection d’infrastructures. Dans un monde de géants de la sécurité, nos entreprises sont encore des nains alors que les marchés en la matière sont gigantesques. En augmentant leur taille, elles parviendront également, grâce à des économies, des synergies, à gagner en profitabilité, attirant alors des fonds d’investissement qui les accompagneront dans leur croissance. Dans cette perspective, ce n’est pas non plus fortuit si plusieurs fonds d’investissement français ont pris récemment des parts majoritaires (ou non) dans des groupes de sécurité (Risk&Co repris par Latour Capital, Néo Security par Fiducial…).
Enfin, comme le démontrait Mark Casson dans son livre The Entrepreneur : an economic theory en 1982, ce qui intéresse en règle général les entreprises, ce n’est pas le marché tel qu’il existe, mais tel qu’elles le créent. Autrement dit, le seul marché de référence d’une entreprise est sa clientèle potentielle. Sa clientèle potentielle est la grande entreprise qui a besoin d’acteurs de la sécurité à la fois flexibles, souples et capables de se projeter rapidement à l’international avec des compétences diversifiées et des moyens de sécurité conséquents. L’entreprise française de sécurité de demain devra être capable de rivaliser avec les leaders du marché actuel (Control Risks, Garda, G4S…) qui proposent à la fois du transport de valeurs, des services de protection internationaux, du conseil en management des risques et des analyses d’intelligence économique.
Voilà donc un marché qui va connaître une révolution ; elle sera sans doute rapide dans les prochaines années. Dans ces conditions, la réforme prévue par le Ministère de l’Intérieur de la loi relative à la sécurité privée datant de 1983 (livre VI du code de la sécurité intérieure) devrait accompagner cette tendance en anticipant ces changements, c’est-à-dire en pensant une approche globale et transversale de la sécurité(1). L’Etat pourrait alors être considéré comme un Etat stratège, capable d’anticiper les mutations et d’aider le marché français à se structurer face à la concurrence internationale.
(1) Or à ce jour, dans le pré-projet de loi dont la rédaction de la version définitive, n’est pas encore, il est vrai, stabilisée, figurent quatorze types d’activités de sécurité et une quinzième est à l’étude : il ne s’agit pas de l’intelligence économique, grande absente du projet mais de la surveillance au moyens de drones civils.
Je suis pour ma part convaincu que nous allons assister à une accélération des rapprochements entre ces deux secteurs d’activités qui jusque là s’ignoraient, voire se méprisaient, les experts de l’intelligence économique considérant qu’ils participaient à la stratégie de l’entreprise, tandis qu’ils voyaient bien souvent les experts de la sécurité comme de simples techniciens. A l’inverse, les experts es sécurité considéraient que l’intelligence économique était un concept « flou » et par conséquent sans grande utilité. Naturellement les choses changent et ce pour trois raisons.
Premièrement, les entreprises ne peuvent plus raisonner stratégie sans prendre en compte simultanément les questions de sécurité. Le développement à l’international, question souvent primordiale pour la survie de nos entreprises, ne peut se faire qu’en ayant parallèlement en tête les questions de protection des personnes, des infrastructures et des informations sensibles. Il serait plus qu’hasardeux à la fois pour la protection des personnes en mobilité mais également pour la pérennité des investissements réalisés à l’étranger de considérer qu’il est possible de faire du business à l’international sans mettre en place une politique de sécurité d’envergure. Or l’accompagnement à l’international qui était au départ dans le giron de l’intelligence économique ou de la direction de la stratégie rentre progressivement dans le périmètre de responsabilité de la direction sécurité. Avec un corollaire : de plus en plus souvent les directions sécurité traitent elles-mêmes certains aspects de l’intelligence économique. Par conséquent, si les cabinets d’intelligence économique ne veulent pas disparaître, ils doivent s’associer avec des experts de la sécurité. Et ce n’est sans doute pas un hasard si l’ADIT, leader de l’intelligence économique en France, a confié à Jean-Pierre Vuillerme, l’un des directeurs de sécurité les plus reconnus de la place de Paris (ancien directeur de la sécurité du groupe Michelin), la création et l’animation d’un pôle « Management des Risques » !
Deuxièmement, en s’associant, l’intelligence économique et la sécurité peuvent naturellement devenir des opérateurs crédibles aux yeux des multinationales qui recourent surtout aujourd’hui à des prestataires de sécurité anglo-saxons, acteurs globaux de la sécurité puisque proposant des services aussi divers que des due diligence, de la protection de personnalités ou encore assurant la protection d’infrastructures. Dans un monde de géants de la sécurité, nos entreprises sont encore des nains alors que les marchés en la matière sont gigantesques. En augmentant leur taille, elles parviendront également, grâce à des économies, des synergies, à gagner en profitabilité, attirant alors des fonds d’investissement qui les accompagneront dans leur croissance. Dans cette perspective, ce n’est pas non plus fortuit si plusieurs fonds d’investissement français ont pris récemment des parts majoritaires (ou non) dans des groupes de sécurité (Risk&Co repris par Latour Capital, Néo Security par Fiducial…).
Enfin, comme le démontrait Mark Casson dans son livre The Entrepreneur : an economic theory en 1982, ce qui intéresse en règle général les entreprises, ce n’est pas le marché tel qu’il existe, mais tel qu’elles le créent. Autrement dit, le seul marché de référence d’une entreprise est sa clientèle potentielle. Sa clientèle potentielle est la grande entreprise qui a besoin d’acteurs de la sécurité à la fois flexibles, souples et capables de se projeter rapidement à l’international avec des compétences diversifiées et des moyens de sécurité conséquents. L’entreprise française de sécurité de demain devra être capable de rivaliser avec les leaders du marché actuel (Control Risks, Garda, G4S…) qui proposent à la fois du transport de valeurs, des services de protection internationaux, du conseil en management des risques et des analyses d’intelligence économique.
Voilà donc un marché qui va connaître une révolution ; elle sera sans doute rapide dans les prochaines années. Dans ces conditions, la réforme prévue par le Ministère de l’Intérieur de la loi relative à la sécurité privée datant de 1983 (livre VI du code de la sécurité intérieure) devrait accompagner cette tendance en anticipant ces changements, c’est-à-dire en pensant une approche globale et transversale de la sécurité(1). L’Etat pourrait alors être considéré comme un Etat stratège, capable d’anticiper les mutations et d’aider le marché français à se structurer face à la concurrence internationale.
(1) Or à ce jour, dans le pré-projet de loi dont la rédaction de la version définitive, n’est pas encore, il est vrai, stabilisée, figurent quatorze types d’activités de sécurité et une quinzième est à l’étude : il ne s’agit pas de l’intelligence économique, grande absente du projet mais de la surveillance au moyens de drones civils.
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