lundi 14 avril 2014

Quel leadership à l’ère des réseaux sociaux ?

mardi 8 avril 2014
Jean luc moissanPar Jean-luc Moisan, Directeur Avant-Vente EMEA de Technomedia








Les réseaux sociaux sont bien plus qu’un media de communication. Les employés sont devenus des collaborateurs ne se contentant pas d’une situation où l’informatique interne leur interdit l’accès à Internet à partir de leur poste de travail : il leur suffit de se connecter via leur smartphone et de continuer de partager leurs sentiments, du coup de cœur au coup de gueule. Face à cette nouvelle intelligence collective, la question se pose : le leadership actuel est-il en mesure d’en relever les défis ?


Aujourd’hui 2,5 milliards d’êtres humains sont connectés à Internet (1). Chaque minute de chaque jour voit 100 000 nouveaux tweets sur Twitter, 30 heures de vidéo ajoutées sur YouTube. Plus d’un milliard d’utilisateurs de Facebook y passent en moyenne 6 heures 30 par jour (2). Des chiffres gargantuesques sachant qu’il n’y a à peine plus d’une décennie, personne ou presque n’y était. L’actualité récente de Facebook, rachetant 19 milliards de dollars une société ne faisant quasiment pas de chiffre d’affaires, mais dont le produit est utilisé par 450 millions d’internautes, démontre clairement que nous devons changer de repères.


Les réseaux sociaux investissent les entreprises – et vice-versa !
Les dirigeants savent qu’ils ne peuvent ici faire l’impasse. Près de 6 entreprises sur 10 (58%) sont ainsi d’ores et déjà actives sur les réseaux sociaux, et 21% supplémentaires envisagent de lancer prochainement des initiatives en la matière (3). Pour la première fois, le temps passé sur Internet à partir d’un appareil mobile est supérieur à celui des connexions via ordinateur personnel. La révolution semble donc derrière nous.


Pourquoi cet engouement ? Parce que dans l’économie actuelle, basée sur la création et la communication, la richesse et la performance d’une entreprise se mesurent avant tout par son intelligence collective. Ce sont donc ses collaborateurs qui comptent avant tout, ces mêmes individus qui partagent, innovent et se développent sur les réseaux sociaux.


Leadership : la rupture est proche
L’entreprise incapable de favoriser l’échange – entre collaborateurs, mais aussi avec les clients et les fournisseurs – ne sera pas en mesure d’imaginer ses produits et services de demain ; elle passera au travers de cette vague de fond où le collaborateur est contributeur de la richesse collective. La solidité financière n’est même pas une assurance : n’oublions pas le nombre dérisoire de sociétés du Fortune 100 qui ont plus d’un siècle.

Finalement, le plus grand défi pour l’entreprise n’est pas celui que l’on croit : il ne réside pas dans le fait d’investir les réseaux sociaux. Il dépend de sa capacité à remettre en cause son leadership et à y intégrer le sentiment d’engagement induit par cette contribution permanente, elle-même rétribuée par la reconnaissance de la créativité.

En la matière, nous sommes aujourd’hui dans une phase de rupture. Les entreprises sont dans l’entre-deux, dans ce passage entre ce qui était et ce qui est en train de devenir. Et il reste énormément à faire pour arriver de l’autre côté.


3 millions d’années séparent le leadership situationnel du leadership relationnel

Bien que l’étude du leadership soit une démarche récente, nous avons aujourd’hui à notre disposition plus de 900 programmes éducatifs de niveaux variés sur le sujet. Ils analysent notamment son évolution à travers les âges, remontant jusqu’à l’époque des premiers hommes.

Au Néandertal, le chef d’une équipe de chasseurs était celui qui était le plus apte à tuer l’animal. Il s’agit du leadership situationnel, ou théorie des traits comme le soutiennent les travaux de Stogdill ou Mann.
La révolution néolithique et la sédentarisation ont apporté le leadership hérité : les terres et leur contrôle étaient transmis de génération en génération. Notre management moderne vient quant à lui de l’ère industrielle, vieille de déjà 300 ans, et de ses leaders de pouvoir. Sous la doctrine « C’est moi le patron, je sais et décide », il n’y a pas de place à l’imagination ou aux nouvelles idées pour les employés.

Or, depuis une génération, nous sommes entrés dans l’ère de la création et de la communication immédiate et permanente. Aujourd’hui, 80% des actifs travaillent avec leur tête, et non plus avec leurs mains. Dans ce cadre, l’entreprise ne peut se développer que grâce à son intelligence collective, c’est à dire les connaissances, les performances et la motivation de ses collaborateurs.

Cet état de fait requiert un leadership différent, relationnel. Il doit intégrer des notions de soutien et de partage (« Comment puis-je aider mes collaborateurs à créer de la valeur ? ») ; d’autonomie d’une part et de confiance de l’autre (en termes d’engagement, de qualité du travail fourni, d’horaires de travail, etc.) ; et d’ouverture, y compris en termes de sentiments (« Je ressens une grande joie à l’idée de progresser avec vous »). Cela appelle de nouveaux types de compétences managériales : là où le leader de pouvoir sait, maîtrise, répond et impose, le leader relationnel écoute, apprend, questionne et donne envie ; là où le premier cache ses émotions, le second les utilise.

Plus tôt les entreprises prendront conscience de la nécessité d’un nouveau style de management pour gérer des collaborateurs toujours plus connectés, plus tôt elle s’engagera pour de bon dans le virage des réseaux sociaux. Mais il faudra pour cela qu’elles sortent de leur zone de confort ou leurs clients rechercheront l’innovation ailleurs.


(1) La dynamique d’internet. Prospective 2030, Centre d’analyse stratégique
(2) What Happens in an Internet minute, Intel
(3) The New Conversation: taking Social Media from talk to action, Harvard Business Review

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